Guadeloupe: les jeunes du projet Démos en concert devant Lilian Thuram

© Facebook Klo Fabulas Chaudrin Raboteur

Guadeloupe: les jeunes du projet Démos en concert devant Lilian Thuram

"Ça me rend joyeux de jouer": Thimothée, 11 ans, tient délicatement dans ses mains l'écrin de son violon, quelques heures avant sa première représentation en Guadeloupe samedi avec le projet Démos d'éducation musicale et orchestrale à vocation sociale. Le petit garçon résident de Baie-Mahault, commune du centre de l'archipel, prend des cours "depuis deux ans, tous les mardis et vendredis", dans le cadre du dispositif Démos, parrainé par l'ancien footballeur Lilian Thuram, venu pour l'occasion dans sa Guadeloupe natale.


Démos, présent partout en France hexagonale et dans trois départements d'Outre-mer (Guadeloupe, Réunion et Mayotte) s'est installé dans l'archipel sept ans plus tôt. Coordonné par la Cité de la musique-Philharmonie de Paris, il permet à des enfants issus de quartiers prioritaires d'apprendre à jouer d'un instrument de musique, avec quatre heures de cours par semaine et le prêt d'un instrument durant plusieurs années.
"Comme c'est cher, je l'aurais jamais fait" sans ce projet, reconnaît Anaé, 12 ans, son violon bien rangé avant la représentation du soir dans un gymnase du CREPS Antilles-Guyane.
 

Lors de la répétition générale, dans l'après-midi, Lilian Thuram, pantalon et T-shirt sombres, arrive discrètement et se présente: "Je suis votre parrain et, moi-même, je suis de la Guadeloupe, je suis d'Anse Bertrand !"
"Vous êtes merveilleux et, ce soir, ça va être fantastique. Alors c'est qui les meilleurs ?", lance-t-il à la centaine de jeunes présents, tel un coach bienveillant.
Le champion du monde de football, âgé de 51 ans, suit le projet Démos en France depuis 2010. "Je suis extrêmement fier: être parrain et être en Guadeloupe, c'est juste incroyable ! C'est donner l'opportunité aux enfants de se révéler à eux-mêmes, de développer quelque chose d'essentiel, l'estime de soi", confie-t-il à l'AFP.
"On est un peu stressés mais il a dit: c'est pas grave si on fait des erreurs. Moi, la musique, ça me fait du bien, ça me relaxe un peu", chuchote Rose, 10 ans, son alto sous le bras.
"Ça me fait du bien parce que ça m'entraîne pour respirer (...) ça te fait souffler plus longtemps, ça détend", renchérit Auriana, neuf ans, qui joue de la flûte traversière.

"objet populaire" 
 

Encadrer ces jeunes, "au début, ce n'est pas simple mais, maintenant, ça va bien", dit José Henry, coordonnateur de Démos-Guadeloupe depuis 2017.
"Il y a tout un travail en amont pour informer les parents de quelle est la tenue à avoir à la maison avec un instrument (...) il ne peut pas être dans la cuisine, sous une table, il doit être rangé dans la chambre de l'enfant". "Jusqu'à maintenant, on n'a jamais eu de casse ni de vol ! Les familles sont très précautionneuses", sourit-il.

Quelques heures plus tard, devant une salle comble, en jean et T-shirts blancs, 110 enfants et 25 musiciens professionnels, parmi lesquels leurs enseignants, interprètent des pièces adaptées par la Philharmonie et une pièce traditionnelle de Guadeloupe.
Raisonnent alors des voix plus fortes, en créole, sur fond de tambour. "C'est un choeur de mamans qui est formidable, cela donne la chair de poule ! On aimerait bien, d'ailleurs, qu'il y ait plus de papas", commente Gilles Delebarre, directeur délégué au projet Démos pour la Philharmonie de Paris. "On mêle les générations, on mêle les niveaux (...) on  fait de la musique classique un objet populaire, appropriable par l'ensemble de la population", précise-t-il.

Une trentaine de jeunes sont là depuis le début, d'autres ont pris leurs premiers cours à peine huit mois plus tôt.
Se posera ensuite la question de savoir "quelle empreinte cela va laisser sur le territoire" et "ce qui va se passer après", soulève-t-il. Avec, en toile de fond, le questionnement sur la création d'un conservatoire dans l'archipel.
Djorhi-an, yeux en amande et visage grave, le sait déjà : il est "tombé amoureux de la clarinette" et veut "devenir professionnel".

Avec AFP