Groupes politiques à l’Assemblée nationale : Les parlementaires des Outre-mer au cœur des tractations et spéculations

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Groupes politiques à l’Assemblée nationale : Les parlementaires des Outre-mer au cœur des tractations et spéculations

C’est le traditionnel jeu de spéculations et de négociations des rentrées parlementaires. Dans une Assemblée nationale sans majorité, marquée par des effets d’influence et de coalitions, la formation des groupes politiques prend un tournant particulier, dans lequel les député(e)s des Outre-mer sont très sollicités.

Passons les député(e)s élu(e)s sous une étiquette précise : Mikaele Seo siègera chez Renaissance, Frantz Gumbs au MoDem, Joseph Rivière et Anchya Bamana au RN, Philippe Naillet, Béatrice Bellay, Élie Califer et Christian Baptiste au PS, Jean-Philippe Nilor, Jean-Hugues Ratenon et Perceval Gaillard à LFI. Pour eux, qui ont fait campagne avec une investiture, la question se pose peu, voire pas du tout. Pour les seize restants, les pronostics sont ouverts. 

Formé en 2022 par, entre autres, des orphelins de l’UDI et de déçus de LaRem entre 2017 et 2022, le groupe Liot (pour Liberté, indépendants, Outre-mer et Territoires) devraient être reconduit. C’est en tout cas ce que laissent entendre les députés des Outre-mer qui y siègent -quatre sur cinq ont été réélus-. « Tout nous indique que le groupe continue » confirme Max Mathiasin, député de Guadeloupe, qui ne cache pas avoir reçu des « sollicitations » d’autres groupes.

« Je reste avec mon groupe Liot, j’aime l’idée de la liberté, et des Outre-mer. On a une capacité de parler entre nous (…) en toute tolérance. Nous avons été très bien entendus », a-t-il assuré. Outre lui, Olivier Serva, Estelle Youssouffa et Stéphane Lenormand y siègeront encore. La députée de Polynésie française, Nicole Sanquer devrait aussi les rejoindre. Et les députés ultramarins de Liot sont aussi à la manœuvre pour attirer de nouvelles recrues comme Moerani Frébault, député de Polynésie, qui toutefois a dit sa préférence pour la coalition présidentielle Ensemble.

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A gauche, c’est plus compliqué. Au sein du Nouveau Front Populaire s’est dessinée une concurrence entre LFI et le PS, tous deux en nombre quasi-équivalent de députés, sans compter les dissidents LFI que sont Alexis Corbière, François Ruffin ou Clémentine Autain. Et selon l’accord du NFP, c’est le groupe ayant le plus de députés qui doit désigner, dans ses rangs, un potentiel Premier ministre. Autant dire que les députés Outre-mer de gauche n’ayant pas d’étiquette nationale sont très sollicités de part et d’autre.

Et ils sont nombreux, notamment les huit députés réélus qui siégeaient à la Gauche démocrate et républicaine (GDR). Ce groupe, émanation parlementaire du Parti communiste français, semble en suspens en cette rentrée parlementaire. Il faut dire qu’il a perdu des têtes d’affiches : Fabien Roussel, patron du PCF, Sébastien Jummel, et en Outre-mer, Tematai Le Gayic, Steve Chailloux et Johnny Hajjar. Mais pour l’optimiste Marcellin Nadeau, « le groupe peut encore exister parce qu’il y à la fois le nombre nécessaire de députés communistes, et des élus d’Outre-mer ». Ses collègues sont plus nuancés. 

« On a une impression de déjà vu  et une impression de jamais vu : déjà vu parce qu’on connait l’Assemblée, et jamais parce qu’on ne la connait pas comme ça. Et cela va forcément influer sur la répartition dans les groupes. Les discussions vont avoir lieu, on a jusqu’au 18. On prendra le temps de la réflexion » a expliqué la députée de La Réunion Karine Lebon, proche de la présidente de la Région Huguette Bello, qui siégeait avec Frédéric Maillot et Émeline K/Bidi dans ce groupe. Selon nos informations, les trois députés réunionnais vont consulter leurs instances locales avant de se décider, car ils sont aussi sollicités par LFI.

« Je suis plutôt du genre loyal » a commenté de son côté le député de Guyane Jean-Victor Castor, qui concède une situation « complexe ». « On a bien sûr repris contact avec André Chassaigne. Mais la situation est un peu particulière pour le Parti communiste français ». Déjà en 2022, ce sont les dix députés ultramarins du groupe qui avaient permis sa formation, sous l’impulsion à l’époque de l’ancien député de Polynésie, Moetai Brotherson, qui y siégeait depuis 2017, avec Huguette Bello et Gabriel Serville, deux autres ténors de la gauche ultramarine. Aujourd’hui, il semblerait que ce soit Davy Rimane, député du Guyane, qui ait repris le flambeau des négociations au GDR.

Jean-Victor Castor évoque aussi le nom d’Emmanuel Tjibaou, premier député indépendantiste depuis 1986, comme potentiel nouvelle recrue pour le GDR. Ce qui pourrait éventuellement souder le groupe et éviter l’hémorragie vers LFI. Pour Jean-Victor Castor, le député kanak « restera très certainement en cohérence avec Robert Xowie », premier sénateur indépendantiste, élu en septembre 2023, et qui siège chez l’équivalence communiste au Sénat. « Si on peut refaire un groupe, on le refera » assure de son côté la députée de Polynésie, Mereana Reid Arbelot.

Quid d’un groupe Outre-mer, demandé par certains députés ? Un marronnier de la rentrée parlementaire, déjà entendu en 2017, « et même depuis 1995 » ironisait Huguette Bello. « Ça n’a pas vraiment de sens. Le minimum c’est qu’il y ait une base politique idéologique. Outre-mer ça ne veut rien dire en soit », a estimé hier Jean-Victor Castor. Pour l’heure, les discussions se poursuivent au Palais Bourbon. Les groupes seront actés mardi prochain, avant la conférence des présidents et l’élection, le 18 juillet, du président de l’Assemblée nationale.

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