Chlordécone aux Antilles : L'appel à projets sur les sols et les écosystèmes lancé par l'ANR, la Collectivité territoriale de Martinique et la Région Guadeloupe

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Chlordécone aux Antilles : L'appel à projets sur les sols et les écosystèmes lancé par l'ANR, la Collectivité territoriale de Martinique et la Région Guadeloupe

L’Agence nationale de la recherche, la région Guadeloupe et la Collectivité Territoriale de Martinique ont annoncé le jeudi 10 mars 2022 le cofinancement et le lancement d’un 1er appel à projets conjoint « Chlordécone ». L'objectif est de développer une recherche transversale afin de poursuivre et de renforcer les mesures déjà engagées pour réduire l’exposition des populations à la chlordécone en Guadeloupe et en Martinique ainsi qu’à déployer des mesures d’accompagnement adaptées.



Annoncé en janvier dernier, le premier appel à projets « Chlordécone » a été officiellement lancé ce jeudi 10 mars. Ce premier appel, issu d’un travail collectif, s’appuie sur les recommandations du Comité de Pilotage Scientifique National (CPSN) en lien avec la coordination locale CLoReCA, et porte notamment sur la remédiation des sols. 

Un lancement dont s'est félicité Serge Letchimy, président du conseil éxécutif de la Collectivité territoriale de Martinique.  «Alors que la « Chlordécone » a contaminé 92% des martiniquais et près de la moitié des terres cultivables pour plusieurs centaines d’années, notre santé et celle des générations futures nous imposent d’agir dès maintenant pour créer les voies de sortie de cette catastrophe sanitaire. Par une participation financière maximale d’1,5 millions d’euros sur un appel à projet global de près de 6 millions d’euros, l’engagement de la Collectivité Territoriale de Martinique est sans faille aux côtés de l’ANR et de la Région Guadeloupe. Ces moyens importants permettront notamment de financer des projets de recherche sur la dépollution de notre environnement, de notre alimentation et de poser les bases d’une société post-chlordécone. Aujourd’hui, les recherches sur la chlordécone sont enfin érigées comme priorité stratégique de la politique de recherche publique française. C’est un début de cheminement vers la réparation. »

Sur un budget de 6 millions d'euros consacré à cet appel à projets, la Région Guadeloupe participe à hauteur d'1,5 millions d'euros. «  Sur une enveloppe globale de près de 6 millions d’euros pour cet AAP, l’Europe via les fonds européens FEDER pour la Région Guadeloupe interviendront à hauteur de 1,5 millions d’euros ce qui permettra de financer les équipes de recherche locales qui candidateront. L’acquisition de connaissances et les actions opérationnelles qui en découleront, restent notre meilleure arme pour faire face à cette contamination prévue pour durer des centaines d’années dans nos sols et dans nos eaux. », précise Ary Chalus, président de la Région Guadeloupe.

La chlordécone est un insecticide organochloré qui a été utilisé aux Antilles françaises jusqu’en 1993 pour lutter contre le charançon du bananier. Pendant plus de 20 ans, ce pesticide a contaminé durablement les écosystèmes, entraînant des conséquences délétères pour l'environnement et la santé. Depuis la fin des années 90, la présence et les effets du chlordécone font l'objet de recherches approfondies. La surveillance a révélé de fortes concentrations de chlordécone dans les ressources en eau potable, ainsi que sa présence continue dans les sols. On estime qu'en raison de sa persistance, il est probable que la contamination environnementale causée par la chlordécone dure des siècles. Des études épidémiologiques ont montré que la population des Antilles françaises a été fortement exposée, notamment au travers de la consommation de produits alimentaires. Les recherches menées depuis plus de 20 ans ont permis des avancées, toutefois des connaissances supplémentaires demeurent nécessaires pour mettre en place des actions efficaces et permettre la réalisation de l'objectif politique du plan gouvernemental sur la chlordécone.

En matière de recherche, l'Agence nationale de la recherche souligne que ce lancement d'appel à projets permet de mobiliser des communautés scientifiques à travers une approche « One health ». L'approche interdisciplinaire renforcée, capable d'améliorer les connaissances de l'impact de cette molécule et de ses dérivés sur la santé humaine et la société, sur la biodiversité fonctionnelle et les services écosystémiques est essentielle pour aboutir à une action efficace.  « Ce premier appel « Chlordécone » revêt une importance particulière pour l’ANR car d’une part il répond à un besoin social crucial relayée par le plan national chlordécone IV et d’autre part il est le fruit du renforcement de notre collaboration avec les régions antillaises permettant un effet levier pour répondre à des questions de recherche ancrées dans les territoires. », a indiqué Thierry Damerval, Président-Directeur général de l’ANR.

Les projets de recherche devront notamment viser  : 

- l’amélioration des connaissances pluridisciplinaires sur la prévention des expositions pour abaisser les causes et les facteurs de risque liés à la présence du chlordécone ; en particulier dans la chaîne alimentaire ;

- L'identification des freins et des leviers aux échanges et aux interactions entre science et société, c'est-à-dire entre la recherche scientifique sur la chlordécone et les acteurs des sociétés caribéennes ;

- Le développement de solutions innovantes, rentables et intégrées capables d'apporter résilience et durabilité dans le développement socio-économique caribéen

L’annonce des lauréats est prévue fin 2022. La réunion de lancement des projets sera couplée au colloque sur la chlordécone organisé par le CPSN, en lien avec la CloReCa, au mois de décembre 2022 en Guadeloupe. D’autres appels à projets seront lancés à l’issue de ce premier appel. Le financement global apporté par l’ANR aux équipes de recherche sur ces différents appels est fixé à 8,8 millions d’euros