A l'UNOC à Nice, élus et ONG guyanais plaideront pour une politique de lutte renforcée contre la pêche illégale et la gestion des ressources

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A l'UNOC à Nice, élus et ONG guyanais plaideront pour une politique de lutte renforcée contre la pêche illégale et la gestion des ressources

La troisième Conférence des Nations Unies sur l’Océan (UNOC) se tiendra à Nice du 9 au 13 juin 2025, dix ans après la signature de l’Accord de Paris sur le climat. Cet événement majeur réunira chefs d’État, scientifiques, représentants d’entreprises et ONG du monde entier. Plusieurs dizaines de milliers de participants sont attendus pour travailler à un objectif commun : renforcer la protection et l’utilisation durable de l’océan, des mers et de leurs ressources. La Guyane y sera représentée, notamment sur les problématiques de pêche illégale. Focus grâce à l’interview de Laurent Kelle, responsable du bureau WWF en Guyane, par nos partenaires de Radio Péyi.
 


Un pavillon spécifique sera consacré aux territoires d’Outre-mer. La Guyane y sera représentée par Jean-Paul Ferreira, premier vice-président de la Collectivité Territoriale de Guyane (CTG), ainsi que par des membres du WWF Guyane.
Parmi les sujets portés par la délégation guyanaise figure la promotion du dispositif TED (Turtle Excluder Device), un système de réduction des captures accidentelles en mer, adopté par les pêcheurs guyanais depuis une quinzaine d’années. Ce système reste néanmoins non obligatoire à l’échelle européenne, une situation que déplore Laurent Kelle, responsable du bureau WWF en Guyane. « En Guyane, c'est devenu obligatoire à la demande des pêcheurs. Il se trouve que ce n'est toujours pas obligatoire en termes de normes d'importation de la crevette sauvage au sein du marché communautaire européen. Donc ce qui veut dire concrètement que l'Europe continue d'importer de la crevette sauvage de la part de pêcheurs qui n'utilisent aucun système de sélectivité. Donc ça veut dire que quand ils pêchent en moyenne un kilo de crevettes, ils vont capturer 9 kilos d'autres prises accessoires, ça va être des poissons, des tortues, des requins, etc... ».

Le WWF Guyane souhaite que l’Union européenne adopte des critères environnementaux stricts pour l’importation des produits de la mer. « Une des demandes fortes dans le cadre de l'UNOC de cette conférence internationale, c'est que l'Union européenne adopte enfin un système de critères environnemental qui permettent d'interdire l'importation de crevettes en Europe qui ne sont pas pêchées avec le TED. Ce n'est pas faute d'avoir déjà porté le sujet. Il y a plusieurs directions générales au niveau de la commission européenne notamment la DGTrade qui semble prioriser encore et toujours la libre concurrence donc éviter toute forme de norme environnementale. C'est un des points forts sur lequel on va fortement insister avec notre délégation à l'UNOC avec la force du réseau WWF et de tous les partenaires », insiste Laurent Kelle.

Autre priorité de l’ONG : la lutte contre la pêche illégale, particulièrement préoccupante sur le plateau des Guyanes. « Il faut rappeler qu’en début de ce mois on a fait un nouveau survol et qu'on a égalé le record d'intensité de pêche illégale qu'on a constaté dans les eaux, 103 navires illégaux, 63 côtés Brésil et 40 côtés Surinam », rapporte le responsable.
Dans ce contexte, un nouveau projet, baptisé Great Ocean, verra le jour avec le soutien de l’Agence Française de Développement (AFD). « On va signer un accord pour un nouveau projet avec l'AFD qui va nous soutenir pour un projet qui s'appelle « Great Ocean » et qui va associer le Guyana, le Suriname et la Guyane, les sociétés civiles de ces 3 territoires, pour la mobilisation de jeunes ambassadeurs autour de la biodiversité marine, et la création d'un réseau d'observateurs de la pêche illégale dans chacun de ces territoires au sein de la société civile. L'idée étant que la Guyane ne soit pas un peu seule à se battre contre ce fléau alors la Guyane est la victime principale. Mais il ne faut pas oublier qu’au Suriname ainsi qu'au Guyana, la pêche illégale existe aussi, mais qu'elle est tout simplement moins documentée et du coup moins médiatisée. L'idée c'est de rééquilibrer les choses afin que chacun des gouvernements concernés soit en mesure, on l'espère, d'agir enfin à la hauteur du phénomène ».

Pour la première fois, une délégation conjointe du plateau des Guyanes — incluant la Guyane, le Guyana et le Suriname — participera à la conférence. « Notre rôle avec la délégation du plateau des Guyanes, c'est de s'assurer que les diplomates de chacun des pays concernés aient pleinement conscience de l'urgence de la mobilisation diplomatique autour de la pêche illégale sur le plateau des Guyanes et que les uns et les autres fassent leur travail pour que, in fine, ça fasse partie des mots clés de la déclaration finale », indique Laurent Kelle. Il ajoute : « Il faut garder en tête aussi que la précédente conférence du même type qui s'était déroulée à Lisbonne en 2022 avait accouché de 3 fois rien, donc la France, cette fois-ci avec le Costa Rica co-organisateur, annonce une volonté de concret et d'ambition. Ca reste, bien sûr là aussi, à définir, et encore une fois nous, sur le plateau des Guyanes, ce qu'on va surtout mesurer notamment via les survols aériens à venir c'est concrètement : est-ce que ça évolue ou pas en termes de lutte contre la pêche illégale ».

À l’issue de la conférence, un plan d’action devrait être adopté, incluant une déclaration politique et une liste d’engagements volontaires. Ce texte, cependant, est d’ores et déjà critiqué par certaines ONG, dont Greenpeace, qui dénoncent un manque d’ambition face à la crise des océans. 

La Guyane célébrée en juin dans le cadre de l'Année de la Mer 

Dans le cadre de l’« Année de la mer » proclamée par le gouvernement pour 2025, la Guyane sera mise à l’honneur tout au long du mois de juin. Cette initiative nationale vise à sensibiliser le public aux enjeux maritimes et à la richesse de l’univers marin, tout en encourageant une mobilisation collective pour la protection des océans.

Depuis janvier, le programme « La mer en commun » valorise les actions des territoires ultramarins grâce au dispositif du « Relais des outre-mer », qui met en lumière chaque mois un département ou territoire d’outre-mer. Après plusieurs mois d'événements à travers la France, le point culminant de cette mobilisation aura lieu à Nice, du 9 au 13 juin, avec la troisième conférence des Nations Unies pour l’océan.

En Guyane, une multitude d’événements labellisés seront organisés en juin par des associations, des collectivités locales, des services de l’État, ainsi que divers organismes engagés dans la préservation du milieu marin. Ces manifestations permettront de découvrir la richesse du littoral guyanais, d’échanger sur les enjeux écologiques, économiques et culturels liés à la mer, et d’encourager l’engagement citoyen.

Damien CHAILLOT