Tourisme : Pour conserver son élan de fréquentation depuis 2023, la Polynésie veut conquérir de nouveau marchés

©Radio 1 Tahiti / Tahaa Pearl Resort

Tourisme : Pour conserver son élan de fréquentation depuis 2023, la Polynésie veut conquérir de nouveau marchés

Invité de la rédaction de nos partenaires Radio 1 Tahiti, le président du conseil d’administration de Tahiti Tourisme Bud Gilroy est revenu sur le nouveau record de fréquentation enregistré en Polynésie en 2024, et comment l’office entend conserver cet élan et tendre vers un équivalent de 600 000 touristes à l’horizon 2033, entre la conquête des marchés canadiens, mexicains, chinois, coréens et singapouriens.

Bud Gilroy, président du conseil d’administration de Tahiti Tourisme, est arrivé vendredi dans notre studio avec les chiffres définitifs de la fréquentation touristique 2024 : 263 766 visiteurs, soit 0,7% de plus qu’en 2023, qui était déjà un record.

Pour Tahiti Tourisme, chargé du marketing de la destination, la mission est de tendre vers un « équivalent 600 000 touristes » à l’horizon 2033 : c’est davantage un ordre de valeur qu’un nombre de visiteurs qui est visé, a expliqué le président du Pays à plusieurs reprises. Et pour aller chercher les touristes à forte valeur ajoutée, « contrairement à ce que l’on peut penser, on est en train de développer le marché nord-américain. Il n’y a pas que les États-Unis (d’où viennent plus de 40% des touristes, ndr), il y a également le Canada qui se développe beaucoup », dit Bud Gilroy.

Récemment entré au conseil d’administration d’Air Tahiti Nui, il indique que la ligne Papeete-Seattle n’est pas remise en question dans l’immédiat : « On a beaucoup de croisiéristes qui passent via Seattle. On a une forte demande de Windstar Cruises de maintenir la ligne parce qu’ils vendent les packages via Seattle. C’est un hub également de connexion avec d’autres aéroports et avec d’autres alliances. » Le Mexique, « qui est quand même la troisième plus grosse économie de l’Amérique du Sud », est aussi dans le viseur de Tahiti Tourisme. De nouveaux représentants ont été choisis pour dynamiser ces marchés.

Pour l’Asie, « il faut des lignes directes »

Pour « briser la dépendance » envers les États-Unis et l’Hexagone, Tahiti Tourisme regarde à nouveau vers l’Asie. Bud Gilroy confirme qu’Air Tahiti Nui maintient sa ligne vers Tokyo, « avec une petite interruption pour venir aider le marché américain en haute saison ». Outre la Chine, Bud Gilroy évoque Singapour et la Corée du Sud. Mais « les Asiatiques n’ont pas autant de congés que les Européens.  Les Chinois ou même les Singapouriens ne feront pas deux ou trois transits pour venir en Polynésie. Il faut des lignes directes. » 

Tahiti Tourisme a prévu une mission en Chine au mois de mars, pour étudier « comment être meilleur sur le tourisme asiatique », pour que la desserte de Tokyo, dont la reprise est « encourageante », devienne profitable. Quant à la concurrence des compagnies étrangères, Bud Gilroy partage la difficulté de « protéger notre compagnie aérienne » tout en ayant « plus d’ouverture pour notre tourisme international ». Mais « si on veut avoir l’ambition d’aller chercher trois fois plus de revenus pour le touristique, il faut qu’on ait plus de compagnies aériennes, c’est sûr. »

Hébergement : encore un peu de patience

Le manque de clés est toujours un problème. 2025 ne sera pas un grand cru, convient Bud Gilroy, on verra surtout des petites structures ouvrir, comme le Reva Tahiti sur l’avenue Prince Hinoi, ou le Bloody Mary à Bora Bora. La rénovation de l’ex Méridien de Punaauia ne devrait pas être terminée avant 2026. Bud Gilroy se félicite également du retour de la défiscalisation locale destinée aux rénovations d’hôtels, car « chaque année compte, on est dans un climat qui est quand même dur sur les infrastructures, donc c’est important de pouvoir préserver l’existant. »

Croisières : 25% d’escales en plus en 2026

Bud Gilroy est aussi le président du Tahiti Cruise Club et le directeur général de l’Agence maritime de Fare Ute. En 2024, les navires de croisière basés en Polynésie -Paul Gauguin, Windstar et Aranui- ont représenté 758 escales, tandis que les navires internationaux ont fait 318 escales. 2025 va voir une petite baisse, à 1 058 escales, en raison du carénage du Paul Gauguin qui ne reviendra qu’au mois de mai. « En 2026, on a déjà dans les calendriers 1 328 escales, donc une progression de 25%. »

Reste tout de même à contenter les croisiéristes qu’on accuse de ne rien dépenser à terre. « Avec le Tahiti Cruise Club, on va dans les îles rencontrer les prestataires, faire des réunions publiques », dit son président. « C’est important aujourd’hui de créer des choses qui n’y étaient pas avant. Par exemple, il n’y a pas dans toutes les îles un tour guidé à pied. Il n’y a pas, par exemple, quelqu’un qui vous explique comment lire les étoiles. Il y a tellement de potentiel pour des jeunes à créer de nouvelles entreprises, mais il faut être là, il faut être innovant. » 

Bud Gilroy rappelle l’orientation « tourisme durable », qui représente aussi des opportunités : « il s’agit de participer à la vie communautaire, d’aider à planter des arbres, de pouvoir rendre aux pays qu’on visite. Et je pense qu’on a encore beaucoup de travail à faire en termes de prestations touristiques sur ce niveau-là. »

Yachting : la question de l’acceptation sociétale

Si les grands yachts à moteur de luxe sont admirés et bien acceptés -ils font également vivre un certain nombre de prestataires- il n’en est pas de même pour les voiliers, qui ont dépassé les capacités limitées des infrastructures existantes, reconnaît Bud Gilroy. Il salue le travail de la DPAM sur la concertation avec les communes pour la mise en place de mouillages et sur la mise en œuvre de la plateforme « Escales » qui sera bientôt opérationnelle pour la petite plaisance. « Aujourd’hui on est dans une phase de structuration et je pense que c’est pour le mieux. Je pense qu’il y a de la place pour les voiliers en Polynésie française, il faut juste que cette place soit bien définie et qu’ils apportent aussi leur contribution à l’économie polynésienne. »

Les comités du tourisme, « gardiens de l’image de leur île »

Le gouvernement a donné, depuis 2023, une nouvelle mission à Tahiti Tourisme. « On a agréé 17 comités du tourisme et on en a trois à venir. C’est un point de relais tellement important pour nous dans les îles », dit le PCA de Tahiti Tourisme. « Ça dépendait souvent de quelques bénévoles qui faisaient tout quasiment pour leur île et on les remercie. Aujourd’hui on leur donne un budget pour se structurer, pour acheter un ordinateur, et on a des formations qui sont faites. On les encourage à se professionnaliser. C’est important, parce qu’ils sont les gardiens de l’image et de l’information de leur île. »

Enfin, Bud Gilroy nous a confié que le successeur de Jean-Marc Mocellin à la direction générale de Tahiti Tourisme sera révélé le 28 février prochain.

Caroline Perdrix pour Radio 1 Tahiti