Tourisme Outre-mer : Les touristes hexagonaux interdits de Polynésie

Tourisme Outre-mer : Les touristes hexagonaux interdits de Polynésie

Le motif dérogatoire « touristique », s’il figure bien dans l’arrêté du Haut-commissaire de la République en Polynésie, encore valable jusqu’au 16 décembre inclus, n’est plus considéré comme un motif valable dans l’Hexagone depuis le rétablissement du confinement. Résultat : les touristes n’ont même pas le droit de se rendre à l’aéroport pour attraper un vol pour Papeete. Le point et les explications avec notre partenaire Radio 1 Tahiti. 

« Voyage en Absurdistan avec escale en Confusie », commente la rédaction de Radio 1 Tahiti. « C’est un coup dur pour notre tourisme, pour l’aérien, pour toute l’industrie » convient de son côté la ministre du Tourisme Nicole Bouteau qui confirme que les nouvelles dispositions prises dans l’Hexagone empêchent désormais les déplacements des résidents hexagonaux vers la Polynésie pour motif touristique : « Cela impacte de façon très forte notre fin d’année ».

Hier, en réaction aux déclarations du PDG d’Air Tahiti Nui Michel Monvoisin à nos confrères de TourMag.com – disant « les Français ont parfaitement le droit de venir en Polynésie » – le Haut-commissariat diffusait un communiqué précisant que, « s’agissant du cas particulier des voyageurs provenant du territoire hexagonal », leurs déplacements hors de leur résidence étaient à présent strictement limités par l’article 4 du décret du Premier ministre en date du 29 octobre dernier : c’est-à-dire pour « motif familial impérieux, pour l’assistance aux personnes vulnérables et précaires, pour la garde d’enfants, ainsi que pour les déménagements ».  Alors que Dominique Sorain, pressé de questions sur le sujet, affirmait encore dans un communiqué le 3 novembre, soit 5 jours après le décret de Matignon, que le tourisme était bien un motif dérogatoire.

Sur son site internet, le représentant de l’État en Polynésie fait bien la distinction entre le « territoire de la République » et le « territoire hexagonal », rien de plus normal. « Les déplacements de personnes par transport public aérien entre la Polynésie française et tout point du territoire de la République sont interdits, sauf s’ils sont fondés sur un motif impérieux d’ordre personnel ou familial, un motif de santé relevant de l’urgence, un motif professionnel ne pouvant être différé » et « un motif en lien avec l’impératif de reprise économique du territoire, dont notamment l’investissement, le tourisme ou les manifestations culturelles », indique donc le communiqué du Haut-commissariat.

Il poursuit : « S’agissant du cas particulier des voyageurs provenant du territoire hexagonal, le Haut-Commissaire souhaite par ailleurs rappeler le cadre réglementaire applicable qui interdit actuellement les déplacements de personnes hors de leur lieu de résidence, à l’exception des seuls déplacements pour les motifs limitativement énumérés dans l’article 4 du décret du décret du 29 octobre 2020 ». « Dans ce cadre, les déplacements pour les motifs d’ordre familial et ceux relatifs à la santé et au travail sont possibles s’ils sont dûment motivés. En revanche, les déplacements au sein du territoire hexagonal liés à l’impératif de reprise économique de la Polynésie française ne figurent pas dans la liste des dérogations et sont donc interdits jusqu’à nouvel ordre », conclut-on.

Rappelons que mis à part Paris et donc l’Hexagone, le seul « territoire de la République » auquel la Polynésie est rattachée par voie aérienne est la Nouvelle-Calédonie. Cette dernière ayant prolongé la fermeture de ses frontières jusqu’à l’été 2021, peu de chance que des passagers effectuent un trajet Nouméa – Papeete, en dehors de la seule rotation du 2 décembre prévue par le gouvernement calédonien, uniquement pour rapatrier des résidents dans les deux sens.

Pas le droit d’aller à l’aéroport

La tolérance qui avait permis au Haut-commissaire en juillet dernier d’ajouter aux dérogations ce « motif en lien avec l’impératif de reprise économique du territoire, dont notamment l’investissement, le tourisme ou les manifestations culturelles » n’a donc plus cours, en tout cas pour les résidents de l’Hexagone. Non pas parce qu’il serait « interdit » de venir faire du tourisme en Polynésie française, mais parce que, rappelons le communiqué du Haut-commissariat, « les déplacements au sein du territoire hexagonal liés à l’impératif de reprise économique de la Polynésie française ne figurent pas dans la liste des dérogations et sont donc interdits jusqu’à nouvel ordre ».

Autrement dit, même les hexagonaux qui parviennent à se procurer un billet n’ont de tout façon pas le droit de se rendre à l’aéroport – sauf à vivre à moins d’un kilomètre de l’aéroport et de s’y rendre en jogging, ou en promenant le chien ? Étant donné que Jean Castex vient de prolonger le confinement dans l’Hexagone pour au moins 15 jours, les touristes qui y résident ne sont pas près de pouvoir embarquer pour Papeete, à moins d’accepter de rajouter à leurs frais de voyage les 135 euros d’amende qu’ils risquent s’ils se font rattraper par la patrouille sur le chemin de Roissy ou d’Orly.

Des courriers sans effet à Jean Castex

Depuis juillet dernier les touristes hexagonaux représentaient 54% des arrivées en Polynésie, soit environ 15 000 personnes. Le Pays aurait bien voulu leur laisser la porte ouverte. Ce n’est pourtant pas faute d’avoir essayé, explique Nicole Bouteau selon qui le président du Pays et le Haut-commissaire ont adressé au Premier ministre des courriers plaidant pour le maintien des dérogations en vigueur depuis juillet. Jean Castex, compte tenu de la situation épidémique en France (et sans doute aussi au fenua) a répondu « qu’il ne souhaitait pas accorder de dérogation » au tourisme polynésien.

Air France a déjà réduit la fréquence de ses rotations entre Paris et Papeete. Air Tahiti Nui (qui accorde un remboursement sans frais en cas de confinement dans le pays de résidence) devrait faire de même, disait Nicole Bouteau en début d’après-midi.

Rappelons que dans les autres Outre-mer, les préfets ont pris des arrêtés spécifiques à leurs situations respectives. Ainsi, il n’est également plus possible de se rendre à La Réunion depuis l’Hexagone sauf motif impérieux, tout comme le préfet de Guadeloupe a limité les déplacements depuis la Martinique à ce même motif et il en va de même pour la Guyane avec les deux îles antillaises. Mais dans tous les cas, les voyages depuis l’Hexagone sont, au minimum jusqu’au 1er décembre, contraint par les règles du confinement.

Avec Radio 1 Tahiti.