C’est en tout cas les termes d’un « accord de ralliement » passé entre un élu de la ville de Papeete, candidat souverainiste aux Législatives, et un cadre du parti d’Éric Zemmour, Reconquête !, que s’est procuré la rédaction de Tahiti-infos.
« Que la Polynésie devienne un État associé » est-il écrit sur l’accord de ralliement signé entre Tauhiti Nena, élu à la maire de Papeete, et Benjamin Cauchy, ex-Debout La France devenu conseiller d’Éric Zemmour et parmi les cadres du parti Reconquête ! en charge des Outre-mer. L’accord prévoit l’« ouverture de discussion sur les modalités d’association entre l’État et les Polynésiens » si Éric Zemmour est élu à la Présidence de la République. Une position surprenante venant du candidat qui, en décembre, défendait une Nouvelle-Calédonie « dotée d’un statut institutionnel durable au sein de la République française ».
Pourfendeur de la « propagande anti colonialiste », le médiatique essayiste rejette régulièrement, dans ses écrits et ses discours, toute « repentance » sur le passif colonial de la France, rappellent nos partenaires de Radio 1 Tahiti. « Je me moque des pages sombres de notre histoire », avait notamment déclaré le candidat de la « grandeur de la France ». Éric Zemmour défend aussi une hausse historique du budget des armées, qui permettrait entre autres un « accroissement des moyens militaires dans le Pacifique ». La France, « nation mondiale, présente dans tous les océans », doit « redevenir suffisamment puissante pour imposer ses vues dans le Pacifique » avait-il ainsi déclaré dans un message de soutien au camp anti-indépendantiste calédonien, en décembre. « Le nostalgique revendiqué de l’empire français serait prêt à pousser la Polynésie vers la souveraineté ? » s'interroge Radio 1 Tahiti.
Opposition au pass vaccinal, reconnaissance du fait nucléaire et du « fait colonial »
On retrouve également, parmi les points de ralliement entre Tauhiti Nena et Éric Zemmour, l’ « opposition au passe vaccinal », la « liberté vaccinal » et « la garantie des libertés individuelles pour les Polynésiens » ; la « reconnaissance du fait nucléaire » et la « prise en charge rapide des victimes des essais nucléaires » ; la « reconnaissance du fait colonial » et sans surprise, une « investiture de Tauhiti Nena aux Législatives ». Le candidat de la 1ère circonscription doit présenter deux autres candidats en concertation avec Reconquête !, a précisé Tahiti-infos.
Sur la « reconnaissance du fait nucléaire » et du « fait colonial » ou encore, « la prise en charge rapide des victimes des essais nucléaires », si les termes employés sont plutôt timorés, ils tranchent tout de même avec les prises de positions habituelles de l’ancien journaliste, dont les sorties sur l’immigration, le communautarisme ou une supposée « guerre d’extermination de l’homme blanc » lui ont valu de nombreux procès, et des condamnations, notamment pour provocation à la haine raciale, analyse encore Radio 1 Tahiti.
Âgé de 53 ans, Tauhiti Nena est bien connu dans le paysage sportif et politique polynésien. Ancien champion de boxe, ancien président du Comité olympique polynésien et ancien ministre des Sports, il a concouru aux Législatives de 2012 et aux Municipales de 2014, sous l’étiquette du parti indépendantiste d’Oscar Temaru. En 2020, il réitère sa candidature à Papeete, soutenu cette fois par le Amuitahira’a de Gaston Flosse. Tauhiti Nena, avec ses deux anciens mentors, fera de bons scores électoraux, à faire vaciller l’historique maire de Papeete Michel Buillard, mais peinera à s’imposer seul aux Législatives de 2017 et aux Territoriales de 2018.
Pour Tauhiti Nena, Éric Zemmour « va être Président de la République. La France va l'élire et on a besoin d'un partenaire comme lui pour développer la Polynésie » a-t-il déclaré à Tahiti-infos. L’élu de Papeete doit présenter ce samedi son nouveau parti Hau Ma’ohi Ti’ama, littéralement « État Ma’ohi indépendant » (Hau ti’ama se traduisant par État ou gouvernement indépendant). Le mois dernier, Tauhiti Nena avait été évincé du Amuitahira’a Huiraatira pour avoir émis le souhait de se présenter dans la 1ère circonscription de Polynésie, contre l’avis de Gaston Flosse, artisan de l’autonomie devenu lui aussi souverainiste.
Maxette Pirbakas, artisane de ce ralliement
Sur Facebook, le nouveau soutien d’Éric Zemmour en Polynésie a souligné le rôle de l’eurodéputée guadeloupéenne, Maxette Pirbakas, dans ce ralliement. « La connexion au plus haut niveau a ainsi pu se faire grâce à elle, grâce à une ultramarine comme nous » a-t-il écrit, saluant la « ténacité » de l’ancienne élue du Rassemblement national. « Maxette Pirbakas porte les Outre-mer pour Éric Zemmour, et sans elle, nous n’aurions pas pu lui porter ce message jusqu’à son quartier général à Paris. Elle lui a expliqué nos convictions à nous, les Polynésiens, car elle les connaît », a-t-il assuré.
Sur Twitter, Benjamin Cauchy a salué « le soutien » et « le parrainage » du « nouvel homme fort de la Polynésie française ». Tauhiti Nena n’est pas le seul élu Outre-mer à avoir annoncé son soutien à Éric Zemmour ce vendredi puisque, Bruno Magras, président de la Collectivité territoriale de Saint-Barthélemy qui a annoncé son retrait de la vie politique au lendemain des Territoriales 2022, s’est aussi prononcé en faveur de sa candidature.
Avec Radio 1 Tahiti