Le projet de valorisation de la parcelle située derrière l’ancienne boulangerie du bagne, sur le site historique de l’île Nou, portée depuis plusieurs années par la province Sud, s’apprête à voir le jour, après une nouvelle campagne de fouilles qui vient de s’achever. L’aménagement doit commencer l’année prochaine. Détails avec notre partenaire Les Nouvelles Calédoniennes.
Ce n’est pas la première fois que l’Institut d’archéologie de Nouvelle-Calédonie et du Pacifique (IANCP) mène une campagne de fouilles sur le site historique de l’île Nou, plus précisément la parcelle située derrière la boulangerie Guillain, où se trouvent les fondations des anciens logements des magasiniers, des agents et des cuisines. En 2013, les archéologues de l’IANCP Louis Lagarde et Christophe Sand investissent les lieux pour des fouilles préventives. Car c’est là que doit, à l’origine, être aménagé le bâtiment d’accueil du site historique imaginé à l'époque (et qui sera finalement inauguré en 2021).
Or, l’IANCP découvre de nombreux vestiges, notamment un imposant escalier en pierres de taille, dont l’existence était jusque-là restée inconnue. Ces découvertes changent les plans : le projet architectural est repensé, et la construction prévue devra être réalisée sur une autre partie du terrain. Les sols investigués lors des fouilles doivent eux être intégrés à un sentier archéologique attenant au futur musée. Mais les restrictions budgétaires mettent un coup d’arrêt à la programmation des travaux, finalement reportés.
"On est contents d’avoir découvert des choses"
Plusieurs années plus tard, en mai 2021, le site historique de l’île Nou tel qu’il existe aujourd’hui, avec l’accueil et le musée dédié à l’histoire du bagne dans la boulangerie, est enfin inauguré et ouvert au public. Un moment fort notamment pour l’Association témoignage d’un passé, gestionnaire de l’endroit, qui a porté cette réalisation pendant vingt-cinq ans.
Il reste cependant toujours à aménager le sentier archéologique. Une campagne de fouilles est donc à nouveau nécessaire. Une "intervention importante" de l’IANCP, note Malia Terebo, gestionnaire du patrimoine archéologique de la province Sud, qui s'est déroulée de fin septembre à début novembre. "Notre travail a consisté à dégager l’ensemble du site, qui avait été recouvert par l’herbe et s’était dégradé", explique Sandra Maillot, directrice de l’IANCP, dont les équipes sont restées près de sept semaines sur place. Et l'opération a réservé une surprise, poursuit cette dernière. "On a trouvé les restes de ce qui semble avoir été une construction entre les logements et le mur du fond et qui n’avait jamais été explorée. Il y a des fondations anciennes, parce qu’on voit le négatif de chaux, mais il y a également une couche plus récente, donc il y a eu deux occupations de cet espace à des moments différents de l’histoire."
Autre aspect d’intérêt : le réseau d’évacuation des eaux. "On a révélé un certain nombre de caniveaux et de conduites. On voulait comprendre comment circulait l’eau, donc on les a fait fonctionner et maintenant, on sait où vont les eaux. On est contents d’avoir découvert des choses qui ne l’avaient pas été il y a douze ans."
"Marcher sur les pas de ceux qui y ont vécu"
Et pour la première fois, de nombreux élèves ont pris part aux travaux de recherche aux côtés de l’IANCP. "140 scolaires ont travaillé avec nous comme de petits archéologues en herbe", se réjouit Sandra Maillot. Mais aussi 35 étudiants en licence d’histoire à l’université. "On aimerait avoir la relève, et ce genre de démarche permet de sensibiliser les jeunes à leur histoire, de se l’approprier."

Place maintenant au projet de restauration. L’idée est, après la visite du musée, de pouvoir passer à l’arrière et découvrir les vestiges archéologiques des logements et des cuisines. Une bonne nouvelle pour Yves Mermoud, président de l’Association témoignage d’un passé, qui y voit un pas de plus dans la mise en valeur de cet espace consacré au bagne. "C’est un axe complémentaire pour les visiteurs, qui permet de donner une lecture du site."
Le début des travaux est annoncé l’année prochaine, indique Malia Terebo. "Les sols en briques vont être traités et un parcours sera créé afin que les gens puissent comprendre ce qu’ils voient. On va travailler avec des calques pour montrer le bâtiment aujourd’hui et tel qu’il était à l’origine, et marcher sur les pas de ceux qui y ont vécu. L’objectif est de valoriser le site archéologique et de pouvoir restituer une partie de son histoire aux gens." Il s’agira du premier du genre en Nouvelle-Calédonie.
L’IANCP en souffrance À l’image de beaucoup d’établissements publics, l’Institut d’archéologie de Nouvelle-Calédonie et du Pacifique n'est pas épargné, ces dernières années, par les importantes coupes budgétaires. "On était seize agents et on est passé à neuf progressivement. C’est compliqué", témoigne Sandra Maillot, directrice de l’IANCP. Ce dernier a également subi plusieurs déménagements. Les locaux initiaux, en face du parc forestier à Nouméa, ayant été visités à de nombreuses reprises, l’institut a déménagé à Doniambo dans d’autres locaux, qui eux ont été incendiés pendant les émeutes. "Tout le monde a ensuite été rapatrié vers les réserves à Païta", indique Sandra Maillot. Le problème, aujourd’hui, est que la Nouvelle-Calédonie peine à financer sa part. "Une réflexion est en cours, notamment avec les provinces, qui sont en charge du patrimoine, afin de voir sous quelle forme on peut maintenir l’activité." |
Par Les Nouvelles Calédoniennes























