Les élus du Congrès ont habilité, ce jeudi 9 octobre, le président du gouvernement, Alcide Ponga, à signer les conventions relatives à la seconde tranche du prêt garanti par l’État à la suite de la crise de mai 2024, d’un montant de 28,6 milliards de francs. L’occasion, pour l’exécutif, de faire un point sur l’état des finances de la Nouvelle-Calédonie, qui sont au plus mal. Précisions avec notre partenaire Les Nouvelles Calédoniennes.
95,4 milliards de francs en 2025
Samedi 29 mars, le ministre des Outre-mer, Manuel Valls, et le président du gouvernement, Alcide Ponga, signaient le prêt garanti par l’État de 120 milliards de francs (1 milliard d’euros), visant à rembourser les aides accordées par Paris en 2024 et à couvrir les besoins de trésorerie de la Nouvelle-Calédonie en 2025. Une première tranche de 66,8 milliards de francs a été octroyée en avril. "Elle a permis de financer les déficits du Ruamm, d’Enercal, de soutenir le régime de chômage ainsi que les collectivités", indique Thierry Santa, membre du gouvernement en charge du budget.
C’est la veille du renversement du gouvernement de François Bayrou, le 8 septembre, que l’État a confirmé le versement de la deuxième tranche de 28,6 milliards de francs. Soit, en tout pour l’année 2025, 95,4 milliards de francs. Ce jeudi 9 octobre, les élus du Congrès ont habilité Alcide Ponga à signer les conventions qui y sont relatives, à 39 voix pour et 10 abstentions (UC-FLNKS et Nationalistes).
Des réformes jugées insuffisantes
Ce versement de 28,6 milliards de francs était conditionné par l’État au fait que la Nouvelle-Calédonie adopte un plan de réformes. Voté le 14 août, le document prévoit notamment de rétablir l’équilibre des comptes sociaux d’ici 2028, de relancer l’économie et de réduire les dépenses publiques. Il fallait également que le pays s’engage à "ne pas voter de texte ayant des conséquences en termes d’augmentation de dépenses ou de baisse des recettes".
Mais le contenu du plan de réformes n’a pas été suffisant pour l’État. De fait, la totalité des 28,6 milliards ne sera pas accordée en même temps : si 23,8 milliards de francs le seront dès la signature de la convention, 2,3 milliards le seront à la mi-décembre, si tant est que la Nouvelle-Calédonie respecte toujours la même condition, explique Thierry Santa aux élus, celle de "ne pas augmenter les dépenses et ne pas baisser les recettes". Là aussi, les fonds doivent abonder les comptes sociaux et les collectivités. Les 2,5 milliards de francs restant, eux, constituent une dotation de solidarité à destination des communes, d’une part, et un soutien à la cantine, au transport scolaire, ou à des actions jeunesse, d’autre part. Le membre du gouvernement en charge du budget insiste : "Nous sommes dans une situation de trésorerie extrêmement grave, en particulier concernant les collectivités. Si l’on n’obtient pas cette somme, qui est essentielle, les conséquences seraient désastreuses."
"Une forme de perfusion permanente"
"On ne pourrait pas faire sans ce prêt", déclare Sonia Backès, mais le prix à payer est rude, estime la cheffe de file des Loyalistes, qui regrette que l’État n’ait pas davantage participé sous forme de subventions et soulève un taux d’intérêt "très important". En conséquence, "l’État nous met sous une forme de perfusion permanente pour financer la survie du Ruamm, des retraites, etc. On ne peut pas s’en passer sous peine de s’effondrer." Mais, ce n’est pas suffisant. Ce dont a besoin la Nouvelle-Calédonie pour redémarrer son économie, poursuit Sonia Backès, c’est de "la confiance, on y a tous travaillé en signant Bougival", et d’un "électrochoc", avec "une vraie politique d’investissement" dans le BTP, pour "entraîner le reste de l’économie".
Un avis partagé par Virginie Ruffenach, qui évoque "un accompagnement de l’État crucial", mais insiste sur la nécessité de "donner un signal très fort avec la mise en place de projets structurants". La présidente du groupe Rassemblement au Congrès considère cependant que "les millions, sans stabilité politique, ne serviront à rien".
Cette méthode de prêt, Calédonie ensemble qui a également même voté pour, y est aussi défavorable, rappelle Philippe Michel. "Nous sommes opposés à ce chantage permanent de réforme contre soutien financier."
Avec ce prêt, le taux d’endettement de la Nouvelle-Calédonie explose. Il atteindra 360 % à fin 2025, soit un niveau quatre fois supérieur au seuil prudentiel de 90 % fixé par les bailleurs. Le coût total des intérêts de cette seconde tranche est estimé à 23 milliards de francs.
Le budget 2026 dans le flou Autre point soulevé par Thierry Santa ce jeudi matin au Congrès : l’état catastrophique des finances, en raison notamment du fait que les recettes fiscales sont bien moins élevées que prévu. Alors que les estimations tablaient sur une baisse de 40 milliards, ce sont finalement entre 50 et 55 milliards de francs qui ne devraient pas rentrer dans les caisses du pays par rapport à 2023 (après une baisse de 34 milliards en 2024). Cela va directement affecter les collectivités, provinces et communes, à hauteur de 3 milliards de francs, qui seront ainsi contraintes d’ajuster leur budget. "La répartition, c’est 1,7 milliard en moins pour les provinces, 800 millions pour la Nouvelle-Calédonie et 500 millions pour les communes." |
Par Les Nouvelles Calédoniennes