Journée mondiale contre le cancer : Plongée dans le secret de fabrication des chimiothérapies au Médipôle de Nouvelle-Calédonie

©Baptiste Gouret / Les Nouvelles Calédoniennes

Journée mondiale contre le cancer : Plongée dans le secret de fabrication des chimiothérapies au Médipôle de Nouvelle-Calédonie

À l’occasion de la Journée mondiale contre le cancer, le Médipôle de Koutio en Nouvelle-Calédonie a ouvert ce mardi les portes de sa pharmacie hospitalière. C’est ici que sont soigneusement préparées les chimiothérapies injectées aux patients atteints d’un cancer. Un traitement élaboré sur mesure, dans des conditions sanitaires particulièrement rigoureuses. Reportage de notre partenaire Les Nouvelles Calédonie.

Glissée dans une cartouche, la poche disparaît brusquement, engloutie par le conduit. Dans quelques heures, le produit qu’elle contient sera injecté à un patient engagé dans un combat contre le cancer. Le résultat d’un minutieux travail de l’ombre réalisé dans un lieu réservé à une petite équipe du Médipôle : la pharmacie hospitalière. A l'occasion de la Journée mondiale contre le cancer, ce mardi 4 février, le centre hospitalier a ouvert les portes de ce service singulier à la presse.

C’est ici, au sein d’un bâtiment isolé du reste de l’hôpital mais relié par son vaste réseau souterrain, que s’activent chaque jour une pharmacienne et cinq préparatrices pour élaborer les chimiothérapies des personnes atteintes d’un cancer. « On peut préparer jusqu’à cinquante poches par jour », dévoile Alice Tourneyre, préparatrice en pharmacie hospitalière, vêtue de sa combinaison de protection.

Un dosage précis

Dans la « salle blanche » de la pharmacie, une pièce où la concentration de particules est contrôlée pour limiter l’introduction de bactéries, elle et ses quatre collègues s’affairent à constituer des mélanges précis. Composés en grande partie de produits toxiques censés détruire les cellules cancéreuses des patients, ils sont prescrits par les médecins oncologues qui suivent le traitement des patients. « C’est du sur-mesure, car la dose dépend de différents critères : le poids du patient, son bilan rénal, son bilan sanguin, etc. », explique Caroline Fijalkowski, pharmacienne hospitalière et cheffe du service.

©Baptiste Gouret / Les Nouvelles Calédoniennes

Après un passage de quinze minutes des différents composants dans un sas de décontamination, Alice Tourneyre glisse ses mains dans l’isolateur, un carré transparent dans lequel elle effectue ses mélanges, et qui garantit une manipulation des produits dans un environnement stérile. « Ce sont des produits que l’on va injecter par intraveineuse, donc c’est très important de protéger les préparations », fait remarquer Caroline Fijalkowski.

Les gestes se veulent précis. Le dosage du mélange doit être respecté au millilitre près. Une assistante accompagne la préparatrice et lui indique la marche à suivre. Chaque poche est vérifiée à plusieurs reprises, avant d’être transmise par un sas à une ultime préparatrice qui la conditionne et la transmet au service de chimiothérapie.

10 000 poches préparées en 2024

L’an dernier, la pharmacie hospitalière du Médipôle a préparé « 10 000 poches de chimiothérapie », révèle Caroline Fijalkowski, pour assurer le traitement d’environ « 650 patients ». C’est elle qui assure également l’approvisionnement du centre hospitalier du Nord, qui ne s’est jamais doté d’une telle pharmacie. Avec un budget d’1,6 milliard consacré à la chimiothérapie en 2024, le traitement pour le cancer représente le plus gros poste budgétaire de la pharmacie du Médipôle.

©Baptiste Gouret / Les Nouvelles Calédoniennes

À l’image de l’ensemble du système hospitalier calédonien, le service n’échappe pas aux difficultés du moment, à commencer par la pénurie de personnel. Avec seulement deux médecins oncologues et un hématologue (spécialiste du sang et des organes), la chimiothérapie tourne au ralenti ces derniers mois. « Ce sont les médecins qui définissent le protocole de chaque patient », souligne Caroline Fijalkowski.

« On a eu un gros pic d’activité juste après les émeutes, mais là, j’ai le sentiment que c’est vraiment retombé », juge Alice Tourneyre, sans parvenir à expliquer une telle variation. Une baisse des prescriptions par manque de médecins ? Des malades qui rencontrent des difficultés à se déplacer jusqu’à l’hôpital ? Reste que, en oncologie comme pour les autres services, la pénurie de spécialistes constitue le principal défi des mois à venir pour le Médipôle.

Reportage et images de Baptiste Gouret pour Les Nouvelles Calédoniennes