Covid-19 : En Polynésie, un « appui » régional possible pour le Centre hospitalier sous tension

Covid-19 : En Polynésie, un « appui » régional possible pour le Centre hospitalier sous tension

Le Haut-commissaire de la République et le président de la Polynésie en visite au CHPF en mars dernier ©Haut-commissariat de la République en Polynésie

  • En prévision du pic épidémique de décembre ou janvier prochain, la direction du Centre hospitalier de Polynésie française (CHPF) a demandé à ses équipes de repousser tous leurs congés au-delà du mois de février. 
  • Mais pour les représentants du personnel, beaucoup d’infirmiers, médecins, brancardiers et autres soignants ont déjà besoin de repos après plusieurs semaines de tensions. Côté recrutements, le vivier polynésien est limité, rapportent nos partenaires de Radio 1 Tahiti
  • Devant l’Assemblée nationale, le député polynésien Moetai Brotherson a souligné cette tension du CHPF, face à l’accélération de l’épidémie. Demandant notamment une aide régionale de la Nouvelle-Zélande et de l’Australie, la ministre déléguée en charge de l’Autonomie a répondu que la « question d’un appui supplémentaire est en cours de discussion ». 

« Les agents sont invités à annuler leurs congés programmés sur la période à venir, et ce, jusqu’au 28 février 2021 ». Voilà ce que stipule une note de service, diffusée la semaine dernière au sein du centre hospitalier de Polynésie française, et révélée mardi matin par la Dépêche de Tahiti. La direction y rappelle que l’établissement doit s’organiser face aux « projections épidémiques » qui « convergent vers une montée en puissance de l’épidémie de Covid-19 pour atteindre potentiellement un pic au mois de décembre et janvier prochains ».

Car plus que le nombre de lits ou le matériel disponible, c’est sur les capacités humaines que l’hôpital craint de buter dans les semaines à venir. C’est ce suggérait déjà, début octobre, le Dr Philippe Dupire au micro de Radio 1 Tahiti. Ce matin, le président de la commission médicale d’établissement, expliquait au journal Le Monde, qui a consacré un article à la « propagation galopante du Covid-19 en Polynésie », que l’hôpital avait fait un « appel du pied auprès de l’État » pour recevoir des renforts de la réserve nationale. L’urgence serait de trouver des infirmiers et des anesthésistes-réanimateurs.

Car même si du personnel soignant supplémentaire est arrivé de l’Hexagone, depuis le mois dernier, même si certains professionnels ont été sortis de la retraite et des élèves infirmiers devraient gonfler les rangs des aides-soignants, le CHPF craint de ne pas réussir à trouver les compétences nécessaires pour affronter une vague épidémique qui ne fait que commencer.

Stress, fatigue… Et risque de contamination

La demande au personnel de repousser ses congés, est donc, pour la direction, une mesure « d’anticipation » de la surcharge à venir. Problème : pour Mireille Duval, une partie des équipes a déjà été très sollicitée ces dernières semaines, avec la montée progressive des hospitalisations de la filière Covid. Stress, fatigue… « Ce qu’on craint c’est que les agents se mettent en arrêt maladie parce qu’ils n’en pourront plus », explique la déléguée syndicale CSTP-FO de l’hôpital.

Beaucoup de professionnels pourraient toutefois répondre positivement à la demande de la direction. « Tout le monde a conscience que c’est notre mission première de soigner les gens », explique Mireille Duval. Encore faut-il pour cela être en capacité de le faire. Début septembre, une douzaine de soignants, du côté des urgences notamment, avaient dû s’isoler après une contamination au Covid-19. Les équipes de l’hôpital « ne sont pas à l’abri », et sont même particulièrement « exposées », insiste la syndicaliste. Meilleure façon de les protéger : appliquer les gestes barrières dans et à l’extérieur de l’hôpital.

À noter que la direction a dû faire une piqûre de rappel des gestes barrières dans l’hôpital. Certains professionnels, 7 mois après le premier déclenchement du plan blanc au CHPF, accusaient un certain « relâchement ». « Les mesures ont été rappelées strictement à tout le monde », précise la déléguée CSTP-FO.

Un « appui » régional en « cours de discussion »

Lors des questions au gouvernement ce mardi, le député Moetai Brotherson a demandé si l’État serait prêt « à soutenir le gouvernement polynésien pour demander cette coopération régionale et internationale de venir aider la Polynésie française ». Il faisait notamment référence à l’accord FRANZ entre la France, l’Australie et la Nouvelle-Zélande. « Vous savez que ces deux pays disposent de personnel médical, de réanimation, compétents et reconnus par l’OMS. Nous avons vu aussi un contingent de médecins cubains envoyés en Martinique », a-t-il rappelé.

Reconnaissant une « évolution de l’épidémie (…) très préoccupante en Polynésie française », la ministre déléguée à l’Autonomie, auprès du ministre des Solidarités et de la Santé, Brigitte Bourguignon, a assuré que « la question d’un appui supplémentaire est en cours de discussion, nous en sommes favorables ». « Un des enjeux porte également sur la disponibilité des tests en nombre suffisant afin de tester plus largement et rapidement la population et limiter la diffusion du virus, notamment dans les archipels », a-t-elle ajouté, tout en rappelant que « de nombreux soutiens ont été mobilisés depuis le début de la crise notamment matériels et humains ».

Avec 26 décès enregistrés ce lundi, la Polynésie a « dépassé en nombre absolu de décès, ceux de la Nouvelle-Zélande, pays de 5 millions d’habitants », a alerté le député Brotherson. « Le nombre de lits en réanimation va, d’ici deux à trois semaines, se révéler totalement insuffisant mais le plus important c’est les ressources humaines ». Le nombre de cas actifs s’élèvent à 2 315, soit 6 405 depuis le 15 juillet, contre seulement 62 de mars à juin. 86 personnes sont actuellement hospitalisées, dont 19 en réanimation.

« Le nombre de cas actifs a plus que doublé en une semaine, il y a eu 17 hospitalisations supplémentaires sur cette période et le nombre de personnes en réanimation a pratiquement doublé en sept jours. C’est un taux d’incidence de 500 cas pour 5 000 habitants, c’est exorbitant », a également souligné Brigitte Bourguignon devant la représentation nationale.

Outremers360 avec Radio 1 Tahiti.