Le projet multidisciplinaire Future Maore Reefs, coordonné par Aline Tribollet (UMR LOCEAN, IRD) et François Guilhaumon (UMR ENTROPIE, IRD), en collaboration étroite avec Georgeta Stoica (CUFR Mayotte) et le Parc Naturel Marin de Mayotte, bat son plein! Pour la première fois à Mayotte, des récifs artificiels durables ont été installés. Des élèves ont également mis en place un sentier corallien avec l'aide de l'équipe du projet.
«L’objectif de cette expérimentation unique est d’identifier les assemblages coralliens les plus à même de recréer une structure récifale diversifiée, fonctionnelle et résiliente face aux changements globaux et notamment face au réchauffement climatique, en cas de dégradation ou de destruction», indique un communiqué de l'IRD. Les boutures sélectionnées ont été préalablement identifiées grâce à un suivi par photogrammétrie de l’évolution d’un récif naturel situé à proximité de l’emplacement des blocs de basalte sur chaque site pendant 12 mois (évolution de sa complexité, diversité spécifique et fonctionnelle, taux de recouvrement corallien, ...).
Des premiers récifs artificiels, pour une expérience innovante en restauration récifale
L’équipe du projet a ainsi déployé entre le 26 et 28 octobre 2022, avec l’aide d’une entreprise basée à Mayotte, cinq blocs de basalte par récif étudié, sur lesquels des plaques de béton spécial ont été installées afin de permettre la fixation des boutures coralliennes. Ces dernières ont été préparées avec précaution à bord d'un bateau loué à cet effet, puis installées sous l’eau sur des blocs entre le 8 et le 11 novembre 2022 selon les sites.
Après seulement quelques semaines d’installation des blocs de basalte, des biofilms algaux indispensables au recrutement corallien et des petits poissons demoiselles ont élu domicile ! En 2023, l'objectif est désormais de suivre l’évolution et la dynamique des boutures à court, moyen et long terme (> 10 ans) par suivi visuel et par photogrammétrie sous-marine pour pouvoir faire des recommandations aux gestionnaires (Parc Naturel Marin de Mayotte) et aux autorités locales en matière de restauration récifale, voire de compensation récifale.
Mise en place d'un sentier public marin par des élèves de Mayotte en mars 2023
En un an, c’est près d’une vingtaine de boutures qui a survécu à la casse humaine, aux intempéries, aux températures élevées et autres facteurs environnementaux étudiés qui impactent et dégradent, de manière plus ou moins directe, les récifs coralliens attenants à l'île de Mayotte. Des boutures résistantes qui ont, de surcroît, pris ampleur et se sont développées donnant pleine légitimité au chantier entrepris.
Le 30 mars dernier, 22 petits ambassadeurs de l’école élémentaire de Pamandzi 5 ont bouturé 80 branches de coraux cassées, avec l’aide des scientifiques de l’IRD (basés à la Réunion) et sous l'oeil bienveillant du Parc naturel marin (PNM). Pour dynamiser cette matinée participative, divers ateliers techniques et ludiques ont été proposés. Les biologistes en herbe ont pu notamment apprécier et participer au travail de surveillance et de répertorisation visuelle au moyen d'un processus de photogrammétrie 3D des bébés coraux fraichement bouturés et identifiés. Un atelier de jeu interactif et coopératif était également animé, basé sur les savoirs du milieu marin tropical afin de stimuler la curiosité intellectuelle et les connaissances des jeunes présents.
Pour les collégiens participants, l'activité s’est poursuivie directement sur le plan d’eau au moyen de palmes, masque et tuba, afin d’aller observer de plus près le tout nouveau sentier marin pédagogique matérialisé par 4 bouées. Au bout de ces dernières, reposant sur 2 à 4 mètres de fond, divers micro jardins coralliens, ainsi qu’un reef ball de béton sur lequel seront positionnées les toutes dernières boutures. Ces bouées sont volontairement dépourvues d’anneau d’amarrage afin d’éviter tout mouillage intempestif de la part d’embarcations loisirs mais aussi de pêcheurs. Chacune des bouées comporte des panonceaux descriptifs qui informent de manière ludique les curieux baigneurs. Deux mois plus tard, la mairie de Bandrélé devrait également équiper la plage de signalisations pédagogiques en lien avec ce sentier et avertir également la population quant aux méfaits destructeurs des marches aqua-pédestres sur coraux.
Cette matinée fut également l'occasion pour l'équipe en sciences humaine et sociale (Georgeta Stoica, Philippe Charpentier et Marta Gentilucci du CUFR, Mayotte) de questionner les élèves de CP de l'Ecole de Pamandzi 5 participant au projet, pour étudier les connaissances acquises et leur capacité à critiquer et à questionner le monde qui les entoure. La journée a également été ponctuée par la visite du recteur de Mayotte, M. Jacques Mikulovic, qui a souligné l'intérêt de reconsidérer l’approche du lagon mahorais en termes pédagogiques larges. Un panel de formations diversifiées, plus poussées et techniques permettrait ainsi de bénéficier, sur place, de l’expertise scientifique d’acteurs locaux, notamment dans les domaines biologique et marin.
Une Journée de sensibilisation grand public et une école d'été Future Maore Reef prochainement
Une nouvelle journée de restitution du travail des élèves de Mayotte impliqués cette année et de sensibilisation du grand public se tiendra le 23 mai à Chirongui. Des projections du film Future Maore Reefs (cfr ci-dessous) et d'une capsule vidéo relatant les actions des enfants seront diffusées. Une conférence-débat et l'exposition de panneaux de sensibilisation prendront également place.
En parralèle en France, se tiendra également une journée de restitution pour valoriser le travail réalisé par les élèves de l'Ecole A Boulloche, à l'IRD Bondy.
La première école d’été interdisciplinaire du programme Future Maore Reefs se déroulera du 24 septembre au 1er octobre 2023, à Mayotte. Articulée autour d’approches originales et de méthodologies innovantes en science de la durabilité, l’école d’été Future Maore Reefs propose de partager des solutions basées sur la nature pour protéger et restaurer les récifs coralliens, tout en soutenant le développement économique durable des populations locales.