La députée de La Réunion Karine Lebon a été reçue ces derniers jours par les cabinets du Premier ministre et celui des Relations avec le Parlement pour trouver un chemin parlementaire à la proposition de loi relative aux enfants réunionnais de la Creuse. Malgré les nombreux soutiens, notamment de Manuel Valls et Yaël Braun-Pivet, la députée peine à inscrire sa PPL à l’ordre du jour du calendrier parlementaire.
Présentée en mars dernier mais rejetée en conférence des présidents de l’Assemblée nationale en mai, la proposition de loi de la députée GDR Karine Lebon, visant à réparer les abus et préjudices de ces 2 015 enfants réunionnais arrachés à leurs familles pour repeupler les départements ruraux de l’Hexagone entre 1962 et 1984, peine à s’imposer dans un calendrier parlementaire embouteillé, malgré les soutiens de Manuel Valls et Yaël Braun-Pivet.
Ce jeudi matin, à l’issue d’un rendez-vous avec le cabinet du ministre chargé des Relations avec le Parlement, Karine Lebon salue « une écoute plutôt bienveillante » face à ce sujet. « Il faut que les différents cabinets comprennent que ce n'est pas qu'un texte parlementaire, que c'est relatif à une histoire qui touche énormément de personnes ».
« On nous a très bien fait comprendre qu'il y avait un embouteillage législatif » regrette la députée. « Le cabinet du Premier ministre est prêt à nous accompagner pour mettre en place certains articles de la proposition de loi qui peuvent l'être sans que la loi ne soit votée. C'est déjà un premier pas », reconnaît-elle toutefois.
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« Maintenant, la question de l'indemnisation doit nécessairement passer par la loi. Là-dessus, on ne lâchera rien. Il y a, à nouveau, une semaine de l'Assemblée en décembre et je peux vous assurer que je ne ménagerai pas mes efforts pour que chaque groupe parlementaire sache que ces 2 015 ex-mineurs réunionnais méritent justice et doivent enfin être connus », a-t-assurée.
« Le ministre Manuel Valls nous soutient, la présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet nous soutient. Même François Bayrou a eu l'occasion d'exprimer son soutien à un ex-mineur » , a martelé Karine Lebon. « On avait des garanties et c'est vrai qu'en mai, nous étions en droit d'espérer que cette inscription soit jugée prioritaire par la Conférence des présidents ».
La députée de La Réunion dit ne pas vouloir « donner de faux espoirs aux ex-mineurs » mais assure « que le travail de lobbying, il va être sans relâche pour espérer avoir le plus de garanties possibles cette fois-ci pour que ça passe ». Il faut dire que pour certains de ces ex-mineurs arrachés à leurs familles, à leur île et à leurs identités, il s’agit aussi d’une question de santé mentale.
Tentatives de suicide
Marie-Germaine Périgogne, présidente de la Fédération des enfants déracinés des DROM (FEDD), elle-même déportée à l’âge de 3 ans et qui accompagne la députée dans cette mission de lobbying, souligne le mal-être que connaissent certains de ces enfants devenus adultes, car quelques semaines après l’espoir lors de la présentation de la PPL est venue la douche froide de la conférence des présidents de l’Assemblée nationale.
« Nous avons été terriblement déçus et surtout frustrés par cette décision du 13 mai qui a bien eu des conséquences très graves chez les ex-mineurs réunionnais de la Creuse, dont deux ont tenté de se suicider. Pour vous dire à quel point nos traumatismes sont présents », alerte-t-elle. « Pour nous, ça a été un deuxième abandon de l'État. Une autre déception serait gravissime pour ces victimes qui avaient un espoir tellement fort, tellement présent que ça a été un choc terrible ».
« Le fait qu'on ait le soutien de Manuel Valls, de la présidente de l'Assemblée nationale et d'autres députés, pour nous, c'était tout simplement gagné » admet Marie-Germaine Périgogne, son nom de naissance qu’elle n’a récupéré qu’en 2024. « Nous ne lâchons strictement rien, nous gardons espoir. Il faut que ce combat aboutisse pour la prochaine semaine transpartisane à l’Assemblée nationale, parce que nous vieillissons ».