La stabilité en Indopacifique, une des priorités du Ministère des Armées

Exercices militaires dans la zone indopacifique ©Marine nationale/Ministère des Armées

La stabilité en Indopacifique, une des priorités du Ministère des Armées

Dans sa dernière livraison, le magazine Esprit Défense du Ministère des Armées a réalisé un dossier sur le défi de la stabilité en Indopacifique. Tensions internationales, rivalités multilatérales, bouleversements climatiques, la France, avec ses territoires d’Outre-mer, est au cœur des menaces qui planent sur ce carrefour de la mondialisation, et sa stratégie de défense doit y faire face.

Dans une zone où résident plus de 1,8 million de nos concitoyens (sept des treize territoires ultramarins y sont situés), la France doit notamment protéger sa souveraineté, ses ressortissants, les flux maritimes et la sécurité environnementale. « Plus globalement, le futur ordre mondial, façonné par la rivalité sino-américaine, se joue dans cette région qui est également le point focal de défis transversaux majeurs comme la piraterie maritime, les impacts du réchauffement climatique ou les proliférations nucléaire ou balistique », souligne Esprit Défense.

Selon Léonie Allard, détachée par la Direction générale des relations internationales et de la stratégie (DGRIS) du ministère des Armées auprès de l’Atlantic Council à Washington, interrogée par le magazine, « aujourd’hui, l’Indopacifique concentre plusieurs des plus grands pôles de la croissance mondiale. Préserver l’accès à ces espaces maritimes pour le commerce et les échanges mondiaux est donc essentiel. Le concept est également politique. Par rapport à celle d’Asie-Pacifique, la notion d’Indopacifique intègre mieux l’océan Indien, et elle met en avant le rôle de plus en plus important de l’Inde ».

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La chercheuse rappelle que la position de la France est unique au sein de l’Union européenne, que sa stratégie de défense appuie les efforts des vingt-sept pour qu’ils s’engagent davantage dans la région, et que les territoires d’Outre-mer représentent, avec les forces armées, un rôle essentiel pour défendre l’accès à des zones vitales. « Ces flux circulent par le cap de Bonne-Espérance et par le canal du Mozambique, près duquel se situent La Réunion, Mayotte et les îles Éparses. Les tensions actuelles et les blocages en mer Rouge provoqués par les attaques des Houthis rappellent l’importance de ces routes et la pertinence de notre approche », explique-t-elle.

Le magazine revient sur l’importance de la Réunion des ministres de la Défense du Pacifique sud (SPDMM), que la France a accueilli pour la première fois à Nouméa le 4 décembre 2023, présidée par le ministre des Armées Sébastien Lecornu. Principaux enjeux : impacts du dérèglement climatique, sûreté maritime et pêche illégale. L’intervention des forces armées en cas de catastrophe naturelle, la coordination entre États, les standards d'opérations et les procédures communes ont notamment alimenté bien des discussions. Constatation : « Il convient de s’entraîner ensemble lors d’exercices récurrents dits HADR (Humanitarian Assistance and Disaster Relief, pour mission d’aide humanitaire et de secours). Le SPDMM en planifie quatre d’ampleur régionale, comme l’exercice Croix du Sud organisé tous les deux ans par les Forces armées en Nouvelle-Calédonie (FANC) ».

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Enfin, d’après Antoine Bondaz, directeur de l’Observatoire du multilatéralisme en Indopacifique à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS) « nos forces de souveraineté et nos forces de présence possèdent une valeur ajoutée reconnue comme telle par nos partenaires, en particulier en matière de présence, de projection et d’assistance ». Il constate cependant l’émergence de la Chine qui change profondément les équilibres stratégiques, sans se résumer à une seule rivalité sino-américaine. « S’y ajoutent la crise de prolifération nucléaire et balistique nord-coréenne, le conflit interethnique en Birmanie, la guerre civile au Yémen, la menace terroriste en Somalie et au Kenya… »

Il existe une voie française indépendante, mais pas suffisante pour constituer une alternative face à la Chine et aux États-Unis, relève Antoine Bondaz. « Lors de la mise à jour prochaine de La Stratégie de défense française en Indopacifique, la France gagnerait donc à se présenter comme le « catalyseur de souveraineté » qu’elle est. Par ses actions et ses coopérations, elle contribue en effet à faciliter l’expression de la souveraineté de ses partenaires en dévoilant une offre spécifique. Celle-ci concourt à renforcer leurs capacités nationales et à créer des coalitions pour qu’ils puissent effectuer des choix non contraints », écrit-il.

Le saviez-vous ? Pégase, une « projection de puissance » aérienne française en Indopacifique

Depuis 2021, l’armée de l’Air et de l’Espace mène chaque année pendant un mois et demi, au départ de la France hexagonale, la mission Pégase vers l’Indopacifique. Objectif : montrer sa capacité à projeter dans la zone un dispositif conséquent en quelques heures pour y protéger les intérêts et les citoyens français. En 2023, le dispositif est monté en puissance avec le déploiement de 19 aéronefs – dix Rafale, cinq avions ravitailleurs A330 MRTT Phénix et quatre avions de transport A400M Atlas. Ils ont notamment participé à de nombreux entraînements et exercices avec nos partenaires de la région – Australie, Corée du Sud, États-Unis, Indonésie, Japon, Malaisie, Qatar, Singapour… En 2024, Pégase passera un nouveau cap puisque, grâce à l’impulsion française, l’Allemagne, l’Espagne et le Royaume-Uni se joindront à la mission pour lui donner une dimension européenne. (Source : Esprit défense)

PM