L’entrepreneuse Sarra Vencatachellum est la nouvelle présidente de la French Tech La Réunion. Connue pour être la fondatrice de The Island Cosmetics, une marque de maquillage solaire, 100 % naturelle, la Réunionnaise a, dans les prochaines semaines à préparer plusieurs rendez-vous en faveur des start-up, autour de l’innovation, dans la région mais aussi dans l’Hexagone. Et alors que sa marque vient d’être distinguée lors des Indies Days, le rendez-vous où peuvent être repérées les jeunes marques cosmétiques par les grands noms de la distribution, la nouvelle présidente espère que l’écosystème de l’innovation de son territoire pourra se saisir de nouvelles opportunités dès le mois de juin, à l’occasion de Viva Technology 2025.
Elle est, depuis quelques semaines, la nouvelle présidente de la French Tech La Réunion. Après avoir été membre pendant plusieurs années, puis siégé au Conseil d’Administration, Sarra Vencatachellum a désormais pour mission de déployer la stratégie de l’entité qui rassemble les entrepreneurs et les acteurs de la tech et de l’innovation de son territoire. « C’est un choix collectif, un choix de confiance, parce que toutes les start-up peuvent se reconnaître dans mon parcours. Je suis partie de rien. Je n’étais pas de ce milieu, mais je suis passée par toutes les étapes de l’entrepreneuriat dans ce domaine de l’innovation. » Si rien ne prédestinait Sarra Vencatachellum à évoluer dans le milieu de l’innovation et de la tech, elle dispose néanmoins d’une solide expérience, qui trouve un prolongement naturel dans la prise de ses nouvelles fonctions. La jeune femme a en effet travaillé pendant près de vingt ans dans le secteur très exigeant de l’hôtellerie haut de gamme. « C’est un milieu où on n’a pas d’autre choix que de trouver des solutions : pour les clients, les partenaires, les propriétaires… »
Cette culture du service, du compromis et de la réponse concrète, elle la porte aujourd’hui pour défendre l’écosystème de l’innovation et de la tech à La Réunion. « J’ai appris à toujours m’adapter, à ne pas me décourager face à la complexité. Aujourd’hui, cette capacité à trouver des solutions, à rassembler et à anticiper, me sert tous les jours dans mon rôle à la French Tech. » Son ambition est claire : faire du territoire un laboratoire à ciel ouvert, où les innovations locales peuvent être testées, affinées, puis propulsées à l’international. Mais si, pour la nouvelle présidente, le terrain est propice, des freins demeurent, notamment l’accès à l’investissement. « Dans l’Hexagone, les jeunes entreprises innovantes bénéficient d’un écosystème dense, structuré, où les rendez-vous sont monnaie courante. Il y a la possibilité de s’entraîner, de recevoir des retours, de perfectionner son pitch… », reconnaît-elle. L’un des enjeux majeurs sera donc de renforcer ce volet « levée de fonds ». Sarra Vencatachellum y sera elle-même confrontée très prochainement dans le cadre du développement de sa marque The Island Cosmetics. L’un des moments clés pour toutes ces start-up sera VivaTech. Le grand rendez-vous annuel de l’innovation et de la tech se tiendra à Paris, du 11 au 14 juin 2025.
Des rendez-vous d’importance
Si VivaTech est une priorité pour les entrepreneurs de La Réunion, d’autres événements contribueront également à créer des conditions optimales pour le bon développement de ce tissu économique. « On entend souvent : “Ah, mais vous êtes à La Réunion.” Il faut alors redoubler de pédagogie pour convaincre qu’un projet peut naître ici et rayonner à l’échelle mondiale. » Face à cette problématique, plusieurs actions sont menées pour permettre la fédération des synergies autour de cet objectif d’internationalisation. En mai, la troisième édition de la French Tech Connect se tiendra sur l’île et réunira des acteurs publics, privés et des start-up afin de favoriser les mises en relation et d’accélérer les collaborations concrètes.
Juste après la participation de la délégation à VivaTech, une ‘learning expedition’ est prévue à Lille. « Cette année, toutes les start-up sélectionnées pour VivaTech vont rencontrer l’écosystème privé et public de Lille. L’année dernière, à Dijon, cela avait permis un partenariat entre une start-up réunionnaise et une structure locale en cybersécurité. On croit beaucoup à ces échanges. Notre objectif, c’est de leur permettre de se confronter à la réalité du terrain, de créer des ponts, et surtout, de montrer qu’à La Réunion aussi, on peut viser loin. »
Le calendrier s’annonce dense pour la French Tech La Réunion, qui multiplie les initiatives pour connecter les start-up locales aux réseaux d’influence nationaux et internationaux. À l’horizon également : Outre-mer French Tech Days, l’évènement pour mettre en lumière les start-up de toutes les communautés French Tech des outre-mer et d’autres du monde. « Nous travaillons ensemble sur des crash tests mensuels, par exemple. Une fois par mois, des start-up se retrouvent pour pitcher leur projet, recevoir des retours critiques et affiner leur posture devant des interlocuteurs bienveillants mais exigeants. C’est un outil précieux, mais encore insuffisant. » Derrière toutes ces initiatives, une conviction forte : conjuguer l’ancrage territorial avec une ambition mondiale. « Nous avons une résilience incroyable, liée à notre environnement. On a appris à faire avec peu. C’est un tissu dynamique qui ne demande qu’à être organisé, structuré. Nous ne sommes pas un marché test. Nous sommes un centre d’innovation. »

Des parcours individuels qui deviennent force collective
Si l’innovation est collective sur le territoire de La Réunion, les initiatives, elles, naissent souvent de besoins personnels, très précis et concrets. Pour Sarra Vencatachellum, tout a commencé avec une histoire profondément intime. « Le maquillage a été une thérapie pendant une période difficile de ma vie, et en parallèle, j’ai une personne de ma famille qui a eu un cancer de la peau. On a tous été sensibilisés à la question de la protection solaire… Il y avait ce préjugé selon lequel les peaux foncées seraient naturellement protégées. Or, ce n’est absolument pas vrai. » Une situation qui l’a amenée à vouloir créer un produit à la fois protecteur, esthétique, et adapté à toutes les carnations. « Beaucoup d’initiatives ici partent de cas concrets, de réalités de terrain. Ce sont des gens qui inventent parce qu’ils n’ont pas le choix, parce qu’ils ne trouvent pas de réponses ailleurs. Et ces réponses finissent par parler à beaucoup plus de monde qu’on ne l’imaginait. » Trois ans et demi de recherche, soixante versions testées, et des mois de formation plus tard, Island Cosmetics voit le jour. Commercialisée à La Réunion, à l’île Maurice, dans certains points de vente en Asie et à New York, la marque vise aujourd’hui à conquérir le marché français, en plus de son expansion internationale. La gamme qui se décrit comme « première marque de maquillage solaire, qui a pour mission de rendre la protection solaire un geste beauté simple du quotidien » s’est déjà distinguée à deux reprises, et notamment il y a quelques jours, à l’occasion des Indies Days 2025 organisés par Cosmétique Mag. À Paris, l’évènement qui met en lumière les marques indépendantes à suivre a récompensé The Island Cosmetics de la médaille d’argent. « The Island Cosmetics est née à La réunion mais a vocation à aller ailleurs. Et c’est pareil pour toutes les idées fortes qui émergent sur notre île. »
Cette année encore, le mot d’ordre est donc la poursuite de l’internationalisation. La French Tech La Réunion, à travers sa nouvelle présidente, entend faire entendre sa voix dans le milieu très compétitif de l’innovation mondiale.
Abby Said Adinany