Dans une interview accordée à la rédaction d’Outremers360, le président de la Région Réunion, Didier Robert, revient sur l’année 2020 et les aides économiques mises en place face à la crise sanitaire, la poursuite de ce soutien en 2021, la filière tourisme particulièrement touchée, le cas des étudiants réunionnais ou encore, les prochaines élections régionales. 

L’année 2020 a été très difficile pour les entreprises locales. La Région Réunion en tant que cheffe de file de l’économie réunionnaise a mis en place un certain nombre de mesures en direction des entreprises comme le Fonds de Soutien Régional. Quel bilan dressez-vous ? Ces aides conjuguées à celles de l’État ont-elles été suffisantes pour éviter l’effondrement du modèle réunionnais ?

Dès l’annonce du confinement en mars 2020, j’ai souhaité réunir l’ensemble des forces vives économiques de notre territoire. Cette première réunion de crise nous avait permis d’identifier leurs besoins en termes notamment de fonds de roulement et de nécessaire digitalisation de leurs activités à opérer. Je tiens à souligner l’agilité dont ont fait preuve nos entreprises en créant notamment leurs e-shops et en développant les circuits courts. Je pense particulièrement au secteur de la pêche qui a su se repenser en mettant en place des plateformes de vente en ligne et des espaces de drive.

Au total, ce ne sont pas moins de 120 millions d’euros que la Région Réunion a pu injecter dans l’économie réunionnaise sous la forme d’aides directes (fonds de solidarité régionale, avances remboursables, chèques numériques…) ou indirectes (recapitalisation d’Air Austral via la SEMATTRA, prêt à taux zéro, chèques tourismes…). Ces aides ont incontestablement contribué d’une part, à maintenir des entreprises sur le marché et d’autre part à consolider les emplois. Ainsi, on constate qu’en 2020 après deux trimestres de baisse, l’emploi salarié est reparti à la hausse au troisième trimestre. En revanche, le commerce, le transport et l’hébergement-restauration n’ont pas retrouvé leur niveau avec plus de 1000 emplois perdus dans ces secteurs.

À ce stade, le plan volontariste que nous avons déployé a permis de limiter les impacts de la crise sanitaire sur notre économie. Un signal positif est celui du taux de créations d’entreprises, – créations que nous accompagnons également par le biais de subventions du FEDER-, qui a augmenté de + 19% sur le second semestre 2020.

Comment la Région Réunion va-t-elle continuer à soutenir le tissu économique local en 2021 ? Mettez-vous en place de nouveaux dispositifs ?

La crise sanitaire et économique reste d’actualité en 2021. Grâce à l’intervention volontariste de l’Union Européenne et de l’État, nous avons pu bâtir un Plan régional de relance doté de 786 millions d’euros pour accompagner le rebond de nos entreprises. L’objectif, à travers ce plan, est notamment de consolider les fonds propres des entreprises et de relancer la commande publique par le biais d’un soutien financier renforcé des investissements portés par les communes de La Réunion.

Notre ambition est de permettre aux entreprises réunionnaises d’une part, de consolider leur activité cette année et d’autre part, de disposer d’outils financiers (subventions et outils de haut de bilan) afin de réunir toutes les conditions pour préparer leur rebond en 2022. S’agissant des secteurs fortement touchés, nous allons déployer des dispositifs d’aides directes tels que le fonds de solidarité en direction des discothèques, des agences de voyages et des entreprises de l’évènementiel….

Le tourisme en particulier qui représente plus de 25% de l’économie réunionnaise est durement impacté par les motifs impérieux qui freinent les arrivées sur l’île. Comment la Région peut-elle aider à garder à flot ce secteur ? 

Comme partout dans le monde, il s’agit du secteur le plus touché. Ainsi, en novembre 2020, le nombre de nuitées avait chuté de 56%, compte-tenu des motifs impérieux imposés aux touristes. Autre secteur également durement impacté, celui des agences de voyages qui sont pour la plupart quasi à l’arrêt depuis mars 2020.

C’est pour toutes ces raisons que nous avons initié deux dispositifs d’aides directes pour ce secteur et un chèque mon île 974 destiné aux Réunionnais aux revenus modestes, afin qu’ils puissent consommer local. La fréquentation des locaux sur les périodes de vacances scolaires et les week-ends grâce à ce dispositif et à une campagne de communication sur le thème de « Local lé vital » (consommer local est vital) a permis de limiter les pertes. A titre d’exemple, la baisse du nombre de nuitées dans les hôtels a été contenue à -17% en octobre 2020, comparé au même mois de 2019.

En 2021, mon ambition est de redonner un coup de fouet à notre industrie touristique en accompagnant les structures d’hébergement et de restauration d’une part, dans la mise en place des équipements de protection sanitaire, mais aussi et surtout dans la rénovation de leurs établissements afin de rendre l’offre réunionnaise plus compatible avec les attentes des touristes français et étrangers.

Je veux souligner également l’appétence des investisseurs qui n’a pas fléchi pour la création d’établissements hôteliers. En effet, la Région accompagnera financièrement par le biais des fonds européens en 2021 la création de 5 nouveaux hôtels. Cela répond à un besoin identifié dans notre Schéma d’aménagement touristique et leur ouverture correspondra sans nul doute à la reprise des voyages internationaux. Nous voulons toutefois inscrire ce développement dans un cadre de tourisme durable.

La pandémie continue à avoir des répercussions sur l’activité. Cependant, des secteurs comme le BTP continuent d’avancer dans leur programmation. Où en est-on aujourd’hui du chantier NRL ?

Les travaux de la Nouvelle Route du Littoral se poursuivent comme prévu du côté de La Possession. Je vous confirme que la livraison anticipée des 9 km de route auront lieu en fin de cette année. De façon concomitante, les travaux initiés par la Région à l’entrée de Saint-Denis seront livrés en fin d’année

Les étudiants réunionnais installés dans l’hexagone sont durement touchés par les mesures sanitaires en vigueur en sur place. Comment comptez-vous les accompagner ?

Pour répondre à leurs besoins, la Région a voté le 9 février en Commission Permanente une mesure exceptionnelle qui permet aux jeunes Réunionnais étudiant en métropole ou à l’étranger de revenir temporairement sur l’île. Beaucoup d’entre eux nous avaient fait part d’une vraie souffrance. Les difficultés liées aux mesures restrictives du couvre-feu et l’éloignement de la famille affectent leur quotidien. Nous souhaitons à travers cette aide exceptionnelle qu’ils puissent continuer à étudier à distance, mais dans des conditions moins compliquées, auprès de leurs proches.

Les élections départementales et régionales se profilent. Le calendrier du mois de juin vous satisfait-il ? Avez-vous l’intention de vous présenter à votre propre succession ?

Quel que soit le calendrier retenu, il est important que ces élections soient en cohérence avec la situation sanitaire en cours sur notre île. Nos citoyens doivent pouvoir accomplir leur devoir civique en toute quiétude. Pour l’heure mes équipes et moi-même sommes quotidiennement à la tâche afin notamment de mettre en place les outils économiques permettant à nos chefs d’entreprises mais aussi à chaque Réunionnais de faire face à cette pandémie mondiale qui frappe également notre île. C’est là notre priorité.

Propos recueillis par Marie-Christine Ponamalé