Cyclone Chido : à Mayotte, la communauté de communes du Centre Ouest passe à l’accompagnement des entreprises avec « la cellule Économie et Relance »

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Cyclone Chido : à Mayotte, la communauté de communes du Centre Ouest passe à l’accompagnement des entreprises avec « la cellule Économie et Relance »

Depuis le passage du cyclone Chido, la communauté de communes du Centre-Ouest de Mayotte (3CO) et ses partenaires se sont mobilisés pour évaluer l’ampleur des dégâts subis par les entreprises locales. Après un mois d’enquête et de terrain, la cellule de crise interinstitutionnelle, installée au Pôle d’Économie Rurale de Coconi, a finalisé son recensement des structures impactées. Désormais, une nouvelle phase s’ouvre : l’accompagnement des entrepreneurs dans leurs démarches de reconstruction et d’accès aux aides financières. Une transition clé qui marque un tournant dans la relance économique du territoire.

Depuis le 31 janvier, la mission de la cellule de crise interinstitutionnelle mise en place par les acteurs économiques de Mayotte a changé de nature. Après plusieurs semaines de travail sur le terrain, le recensement des entreprises affectées par le cyclone Chido est désormais clos dans le Centre Ouest. A présent, l’heure est à l’analyse et à la mise en place des dispositifs de soutien. 

« La Cellule Économie et Relance a terminé son recensement, place maintenant à l’accompagnement », annonce Anrafati Combo, directrice du service développement économique de la communauté de communes du Centre-Ouest (3CO) de Mayotte. Depuis ce début de semaine, la cellule, qui était jusqu’alors un observatoire actif des dégâts économiques, se transforme en une plateforme d’appui destinée à aider les entreprises à obtenir des aides et à reprendre leurs activités.

Le dispositif a été mis en place plus ou moins rapidement dans les intercommunalités du territoire. Il ne se déploie donc pas à la même vitesse selon la localité. Dans le Centre-Ouest, la première phase est close. Avec l’appui de la Direction de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (DEETS) et des chambres consulaires, les équipes de la 3CO vont désormais se concentrer sur le traitement des informations collectées et la mise en relation des entreprises avec les dispositifs d’aide. L’enjeu ? Accélérer le processus de redémarrage des activités et éviter que des structures déjà fragilisées ne s’effondrent sous le poids des pertes accumulées.

Un travail de terrain sans précédent

Dès le lendemain du passage du cyclone Chido, ce sont tous les agents de la 3CO qui ont été mobilisés pour partir à la rencontre des entrepreneurs des 5 communes de l’intercommunalité. « On voyait les dégâts, mais certaines conséquences économiques restaient invisibles. Il fallait un état des lieux précis et rapide », souligne Anrafati Combo. Une vingtaine d’agents sont alors répartis en plusieurs équipes. Certains travaillaient depuis la cellule de crise au Pôle d’Économie Rurale de Coconi, où un accueil était assuré tous les jours de 8h30 à 12h30. 

D’autres sillonnaient le territoire, allant à la rencontre des entrepreneurs. « On a dû mettre tout le monde sur le terrain, quitte à déployer des collègues qui n’avaient pas l’habitude de ce genre d’exercice », explique la directrice. Deux méthodes ont été employées. La première, numérique, s’appuyait sur l’application QField, qui permettait de collecter des données sur place et de les géolocaliser.

« L’idée, c’était d’avoir une vision claire et actualisée de la situation, et pas seulement des estimations approximatives », précise Anrafati Combo. Cependant, dans certaines zones, l’absence de connexion ou de conditions favorables a nécessité une alternative plus classique : le papier. « On a dû faire du terrain à l’ancienne, avec des fiches manuscrites. Ce n’était pas idéal, mais l’important était de ne laisser personne de côté. »

L’objectif était double : recenser les dégâts et informer les entreprises sur les démarches à suivre. « Il y avait aussi un besoin d’écoute et de réassurance. Beaucoup de chefs d’entreprise étaient désemparés, ils ne savaient même pas par où commencer. » Certaines entreprises pouvaient redémarrer rapidement, dès lors qu’elles avaient accès à l’électricité et à l’eau. D’autres, notamment dans le secteur touristique, avaient perdu l’intégralité de leur outil de travail. « Dans la restauration, si la structure a été détruite, il n’y a pas d’activité possible. On a rencontré des hôteliers et des gérants de bungalows qui se retrouvaient sans rien, obligés de mettre leur personnel au chômage technique. »

Un autre enjeu était de toucher un maximum d’acteurs, au-delà des seuls entrepreneurs ayant spontanément fait remonter leurs difficultés. « On sait que certains n’osent pas demander de l’aide, soit par peur de la paperasse, soit parce qu’ils pensent ne pas être éligibles », explique Anrafati Combo. Pour contourner ce problème, la cellule a multiplié les canaux de diffusion : WhatsApp, Instagram, Facebook, mais aussi des relais physiques, à l’instar des locaux de l’Office de Tourisme de la 3CO.

Vers une refonte des politiques économiques locales ?

Si la mission première de la cellule de crise était d’apporter une réponse immédiate aux entreprises sinistrées, elle a aussi révélé des lacunes structurelles dans la gestion des données économiques du territoire. « Depuis quatre ans, nous essayons de mettre en place un projet de recensement des entreprises, mais nous n’avons jamais pu aboutir », confie Anrafati Combo.

Jusqu’à présent, les informations disponibles sur le tissu économique local étaient souvent incomplètes ou obsolètes. La crise provoquée par le cyclone Chido a donc paradoxalement servi de catalyseur pour structurer un recensement à grande échelle, avec des données géolocalisées et mises à jour. « Nous avons toujours manqué d’un véritable outil de suivi des entreprises, ce qui nous obligeait à nous fier à des bases de données souvent incomplètes. Aujourd’hui, grâce au travail réalisé sur le terrain, nous avons une photographie bien plus précise de notre tissu économique », détaille la directrice du service développement économique de la 3CO. « On prend souvent des décisions sur la base de chiffres qui ne reflètent pas la réalité du terrain. Ce travail de recensement, même s’il est né d’une crise, nous offre une opportunité unique de mieux adapter nos actions aux besoins réels », insiste-t-elle. 

Cette refonte des politiques économiques locales ne se limitera pas à la gestion post-cyclone. L’ambition est d’établir un cadre plus pérenne, où la mise à jour régulière des informations sur les entreprises permettra d’anticiper les crises plutôt que d’y réagir dans l’urgence. « Nous voulons aller plus loin et inscrire cette dynamique dans la durée. Ce travail de fond sur les données économiques doit devenir une habitude, et non une réponse ponctuelle à une catastrophe », explique Anrafati Combo. Le défi est aussi financier. Mettre en place un observatoire économique efficace nécessite des moyens, et la 3CO espère obtenir des financements pour pérenniser cette initiative.

Des aides financières sous conditions

Si le travail de recensement a permis de dresser une photographie plus précise des dégâts, l’enjeu est désormais d’orienter les entreprises vers les dispositifs d’aide mis en place.

Avec la publication du décret n°2025-43 du 14 janvier, de nouvelles possibilités de soutien sont apparues. « Le décret nous permettra d’orienter et d’accompagner les acteurs à faire leurs demandes », indique Anrafati Combo. Toutefois, toutes les entreprises ne seront pas éligibles : certaines conditions doivent être remplies, notamment être à jour de ses cotisations fiscales. Dans ce contexte, la cellule de crise a un rôle clé à jouer pour accompagner les entrepreneurs dans les démarches administratives. Avec la fin du recensement et l’entrée dans une phase d’accompagnement, la cellule de crise de la 3CO entame une transition importante.

« Il ne s’agit pas seulement de se relever, mais de mieux se préparer pour l’avenir », conclut la directrice du service développement économique de la communauté de communes du Centre-Ouest de Mayotte. Les premières analyses à la suite de la récolte des données pourraient être connues dans les prochaines semaines, le temps de tout centraliser. Les acteurs économiques, eux, s’organisent en se réunissant régulièrement pour faire le point sur les aides et les dispositifs possibles pour les entrepreneurs.

Abby Said Adinani