« Le gouvernement n’est pas au rendez-vous ». Cinq mois après le passage du cyclone Chido à Mayotte, la députée Liot Estelle Youssouffa déplore la situation de l’archipel, alors que le Parlement devrait bientôt débattre du projet de loi-programme, après le texte adopté en urgence en février. « La reconstruction n'a pas commencé, c'est extrêmement pénible et douloureux pour la population ».
« On a à nouveau de l'électricité, de l'eau un jour sur deux ou trois, puisqu'il y a toujours des coupures d'eau » décrit la députée de Mayotte, interrogée par France 24. « Grâce à la venue du président de la République », la semaine prochaine, « on a enfin commencé à dégager les débris et les déchets alors qu'on avait des tonnes et des tonnes de débris qui étaient toujours à peu près partout ».
Selon Estelle Youssouffa, Emmanuel Macron, qui s’était déjà rendu sur l’archipel au lendemain du passage du cyclone qui a fait une quarantaine de victimes, est « attendu de pied ferme ». « On attend des réponses sur les grands chantiers que sont la reconstruction, mais aussi la construction des infrastructures dont Mayotte a besoin, qui étaient déjà nécessaires avant Chido, mais qui le sont d'autant plus », poursuit la députée, critique à l’égard du gouvernement.
« À ce jour, il n'y a pas de budget pour la reconstruction de Mayotte », ajoute encore Estelle Youssouffa qui souligne une situation « problématique », notamment au sujet des bidonvilles très vite reconstruits après le cyclone. « Les bidonvilles ont grignoté, ont profité de la déforestation qui a été causée par le cyclone pour gagner en surface. Comme les radars ont été détruits, on a quotidiennement des bateaux avec des clandestins qui continuent d'arriver. Et donc, les bidonvilles ont prospéré malgré les grandes déclarations ».
Estelle Youssouffa n’est pas plus indulgente envers le ministre des Outre-mer Manuel Valls, le « discours politique consternant » ou encore « les visites ministérielles (qui) se succèdent pour ne rien faire ». Même critique acerbe pour Bruno Retailleau, « qui parle beaucoup d'immigration clandestine, est venu le 16 décembre et depuis, plus aucune nouvelle pour Mayotte », alors que les élus avaient « demandé instamment au lendemain de Chido qu'on arrête de délivrer des papiers ». « L’État n’a rien fait ».
« On constate qu'il y a beaucoup de déclarations sur Mayotte, mais qu'il y a peu d'actions, alors que c'est quand même une crise sanitaire » poursuit encore la députée qui craint que l’épidémie de Chikungunya, qui sévit actuellement à La Réunion, arrive à Mayotte. « Notre système sanitaire n'est pas en capacité de faire face à une crise sanitaire aussi grave que le chikungunya qui s'annonce ».
La loi-programme pour Mayotte « n’est pas à la hauteur »
« On est un département à terre et on attend toujours que le gouvernement Bayrou se mette enfin au travail et réponde aux attentes légitimes de la population » dit encore Estelle Youssouffa qui réclame « des infrastructures qui soient à la hauteur », « l'égalité sociale », « réponses sur la question du visa territorialisé qui fixe les migrants à Mayotte » ou encore des réponses sur les infrastructures aéroportuaires.
« On a toujours considéré que la catastrophe de Chido était aussi une opportunité pour nous de reconstruire Mayotte correctement et mieux », estime la députée qui regrette que « le gouvernement Bayrou soit en train de gâcher cette crise ». « Chido a permis que l'ensemble du pays réalise la détresse dans laquelle on est, nous dise et nous exprime sa solidarité » souligne la députée qui salue au passage les 40 millions d’euros de dons récoltés. « Le gouvernement n'est pas au rendez-vous ».
Quant à la loi-programme préparée par le gouvernement, « elle n’est pas à la hauteur » lâche la députée qui rappelle « que Mayotte attend cette loi programme depuis 40 ans ». Elle déplore l’absence de calendrier sur l’égalité sociale, de réponse sur la piste longue et le désenclavement de Mayotte, et de budgétisation de la reconstruction. « Tout ce qui est dans cette loi Mayotte proposée par le gouvernement, c'est le recyclage d'anciennes mesures. Ce n'est pas à la hauteur des défis ».