À Mayotte, le « choc » après l’assassinat de trois personnes en trois jours sur Petite Terre

À Mayotte, le « choc » après l’assassinat de trois personnes en trois jours sur Petite Terre

Vue de la commune de Pamandzi sur Petite Terre, depuis le quartier de La Vigie, où ont eu lieu les trois meurtres ce weekend ©Wikicommons

Trois personnes ont été tuées depuis vendredi à Mayotte, et plusieurs habitations ont été détruites lors d’incidents qui ont réveillé les inquiétudes des habitants, excédés par l’insécurité, ont dénoncé dimanche des élus de l’île.

« Trois personnes ont été assassinées à l’arme blanche en trois jours, dont deux adolescents de 15 et 14 ans. C’est un nouveau choc pour la population de l’île qui est durement éprouvée par une augmentation sans précédent de l’insécurité et des violences qui frappent aveuglément toutes les catégories de personnes depuis 2 ans », alertent dans un communiqué les quatre parlementaires de Mayotte, le président du Conseil départemental et le président de l’association des maires et maire de Pamandzi Madi Madi Souf.

Les trois meurtres ont eu lieu dans le quartier de La Vigie sur Petite Terre. « Un premier corps sans vie a été découvert vendredi matin. Il s’agit d’un homme de 36 ans de nationalité comorienne », rapporte le Journal de Mayotte. Il s’agirait selon le procureur d’un meurtre à l’arme blanche commis par « un groupe de personnes dont le nom est pour le moment encore inconnu ». Samedi, c’est le corps sans vie d’un jeune de seize ans qui a été retrouvé, puis celui d’un second adolescent de 14 ans, dimanche matin.

Pour l’instant, les enquêteurs n’ont établi aucun lien entre les trois meurtres et les violences. « La section de recherche de la gendarmerie de Pamandzi a engagé des moyens très importants pour rechercher les auteurs de ces différents meurtres ou assassinats », a déclaré le procureur de la République Yann Le Bris. Aucune interpellation n’a été réalisée pour ces meurtres, mais le procureur de la République a annoncé qu’un homme était en détention provisoire pour une tentative de meurtre réalisée en début de semaine.

Les habitants des quartiers où ont eu lieu les violences ainsi que le maire de Dzaoudzi-Labattoir, Saïd Omar Oili, estiment qu’elles sont le fait de règlements de compte entre personnes originaires d’Anjouan, île voisine de l’Union des Comores. « Désormais, comme ce week-end en Petite-Terre, le meurtre entraine le meurtre et les règlements de compte s’enchaînent, notamment entre étrangers, plongeant le territoire dans une spirale infernale d’assassinats et de destruction, sans aucune réaction à la hauteur de la situation », ont d’ailleurs souligné les élus dans leur communiqué.

Le collectif de Petite Terre, qui se bat pour rétablir la sécurité, est allé manifester devant la résidence du préfet de Mayotte à Dzaoudzi dimanche afin de lui demander des réponses à cette violence. La directrice de cabinet Laurence Carval a promis des renforts de forces de l’ordre pour les jours à venir. Une promesse insuffisante pour le collectif qui a rappelé que trois de ses membres ont fait de la détention provisoire, soupçonnés d’avoir tué un présumé délinquant.

Les violences sont le lot quasi quotidien de Mayotte, département où les trois quarts de la population (77%) vivent sous le seuil de pauvreté national, et où près de la moitié des habitants ont moins de 18 ans. Selon l’Insee, la moitié de la population est de nationalité étrangère, dont une grande majorité vit clandestinement sur le territoire.

« Les habitants vivent la boule au ventre »

Ces trois meurtres interviennent notamment dans un climat d’insécurité constante à Mayotte. « Devant l’ampleur qu’a pris la violence ce week-end sur Petite-Terre, la préfecture a demandé au commandant de la gendarmerie de déployer une grosse opération d’interpellation ce dimanche matin tout en appelant la population au calme », précise le Journal de Mayotte.

« Dans les domiciles, dans les quartiers et les villages, dans les écoles, sur les routes, dans les entreprises, les habitants vivent la boule au ventre. En quelques années, Mayotte a évolué d’un territoire des plus paisibles à la région où le taux d’homicide par habitant est le plus élevé d’Europe (Eurostat 2020 – 5,3 homicides pour 100 000h contre 0,7 en moyenne en Europe) », ont encore déploré les élus mahorais. Le maire de Pamandzi a notamment appelé les parents à ne pas envoyer leurs enfants dans les établissements scolaires, souvent la cible de violence à Mayotte, ce lundi.

Les élus de l’île dénoncent « l’indifférence d’une partie des autorités politiques et administratives nationales vis-à-vis des Français de Mayotte », après les « reports successifs (…) d’importantes visites ministérielles pour annoncer les mesures nécessaires et la montée en puissance des moyens de lutte contre l’insécurité et l’immigration clandestine ». « Le gouvernement doit assumer sa compétence sur toutes les parties du territoire national, y compris Mayotte. Il se doit d’agir sans délai et avec résolution en matière de lutte contre les bandes violentes armées qui accablent les populations du 101ème département ».

Avec AFP.