Alors que la France a connu en 2023 une nette baisse de la mortalité toutes causes confondues, les départements et régions d’Outre-mer (DROM) continuent d’afficher des niveaux préoccupants pour plusieurs pathologies majeures.
En France hexagonale, "les deux premières causes de décès restent les tumeurs et les maladies de l'appareil circulatoire", devant les maladies de l’appareil respiratoire, montre un travail de référence des chercheurs de l'agence Santé publique France, de l'Inserm et de la direction des statistiques du ministère de la Santé (Drees) publié mardi. Tous les ans, ces scientifiques examinent les principales causes de mortalité, avec un peu de décalage. En 2023, plus de 637.000 décès ont été enregistrés. "Après trois années de forte mortalité dues à la pandémie de Covid-19 et à un regain de mortalité lié aux maladies respiratoires en 2022", 2023 a connu une mortalité "plus faible qu’en 2019", détaille à l'AFP Elise Coudin, directrice du CépiDc (Inserm).
Comme dans la grande majorité des pays européens, le niveau de mortalité a été "historiquement bas" en France, mais il est resté supérieur à celui attendu si la tendance d'avant-pandémie s'était prolongée jusqu'en 2023. Le reflux par rapport à 2022 s'explique "à 60% par la baisse de mortalité liée au Covid-19" - tombé à la neuvième place des causes de décès -, avance Mme Coudin, ainsi que par des baisses des mortalités de maladies de l'appareil circulatoire et de tumeurs.
Disparités régionales
Mais cette dynamique de baisse du taux standardisé de décès standardisé diffèrent selon les territoires. Ainsi, la mortalité est bien plus marquée dans les départements et régions d'Outre-mer et, dans une moindre mesure, dans le nord et l'est de l'Hexagone. "La mortalité est 89% plus élevée à Mayotte par rapport à la moyenne nationale, 37% en Guyane, et 17% dans les Hauts-de-France", précise à l'AFP Vianney Costemalle, chef du bureau Etat de santé de la population de la Drees. La Guadeloupe présente également une mortalité supérieure de 9 %, tandis que La Réunion s’en sort mieux, avec une surmortalité plus modérée.
Plusieurs causes de décès frappent plus durement les DROM que dans l'Hexagone. Les maladies infectieuses atteignent des niveaux importants à Mayotte (5,7 fois supérieures à la moyenne nationale) et en Guyane (3 fois plus élevées). Ces territoires concentrent également une mortalité par maladies cardio-neurovasculaires très élevée : 2,8 fois plus élevé au niveau national à Mayotte, +38 % en Guyane, et +17 % à La Réunion.
Les maladies endocriniennes, nutritionnelles et métaboliques sont elles aussi nettement surreprésentées : la mortalité liée à ces pathologies est multipliée par quatre à Mayotte et par 1,7 à La Réunion.
Contrairement à ces tendances, la mortalité par tumeurs reste globalement inférieure dans les DROM à celle de l'Hexagone — à l’exception notable de Mayotte, où certains cancers (estomac, prostate, utérus) sont plus fréquents.

La mortalité liée au Covid-19 reste élevée dans certains territoires ultramarins, avec un excès de 59 % en Martinique et de 30 % à La Réunion. Quant aux maladies respiratoires, elles enregistrent un taux 2,6 fois supérieur à la moyenne nationale à Mayotte, tandis qu’elles sont moins fréquentes en Guadeloupe (-24 %) et en Martinique (-25 %), illustrant des disparités internes entre les territoires.
Les causes de décès externes (accidents, suicides, homicides) sont moins fréquentes dans les DROM, sauf en Guyane. Cependant, les noyades accidentelles y sont surreprésentées, notamment en Guadeloupe, à Mayotte et en Guyane.
Ces disparités peuvent être liées à des facteurs "comportementaux, économiques, environnementaux, territoriaux, et d'accès aux soins", résume M. Costemalle.
Le rapport pointe également une qualité inégale de la collecte de données. En 2023, 10 % des certificats médicaux de décès manquaient en Guyane, 8 % en Martinique et 5 % en Guadeloupe, contre moins de 1 % dans certaines régions de métropole. Cette lacune complique l’analyse fine des causes de décès.
En 2023, plus de la moitié des décès (53%) ont eu lieu en établissement de santé et quasiment un quart à domicile (24%).
Avec AFP