Les ministres de l’Intérieur Bruno Retailleau et de la Justice Didier Migaud ont appelé à Marseille ce vendredi à «faire front commun» et à agir «vite» dans la lutte contre le narcotrafic, érigée en «cause nationale».
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Les deux hommes ont annoncé en fin de matinée des mesures destinées à renforcer la lutte contre le narcotrafic, fléau grandissant contre lequel l’exécutif appelle à une «mobilisation générale».
Les deux hommes ont choisi de dévoiler leur plan contre la criminalité organisée dans la cité phocéenne, théâtre d’une guerre de territoire sanglante entre gangs de narcotrafiquants. «La menace s’est amplifiée et nécessite que l’État s’arme davantage», a lancé le garde des Sceaux dans un entretien à La Provence vendredi, qui veut «agir immédiatement pour apporter une réponse ferme». «Les saisies de cocaïne ont été multipliées par cinq en dix ans, les drogues les plus dures sont disponibles sur tous les territoires et tout le temps. Le rajeunissement des personnes qui tuent et qui sont tuées est effroyable. Le narcotrafic est une cause racine de la violence et de la corruption», a abondé Bruno Retailleau.
Mise en place d’une «cellule de coordination nationale»
Le ministre de la Justice Didier Migaud a annoncé vendredi à Marseille la mise en place «dans les prochaines semaines» d’une «cellule de coordination nationale» pour lutter contre le «fléau» du narcotrafic.
«J’instituerai dans les prochaines semaines, en présence du premier ministre, une cellule de coordination nationale chargée de dresser un état de la menace, fixer une stratégie opérationnelle et de la mettre en oeuvre », a-t-il dit lors d’une conférence de presse avec Bruno Retailleau (Intérieur), précisant que «les équipes du parquet de Paris travaillant sur la lutte contre la criminalité organisée au niveau national (seraient) ainsi renforcées de 40%».
Des moyens renforcés
«Les équipes du parquet de Paris travaillant sur la lutte contre la criminalité organisée au niveau national seront ainsi renforcées de 40%», a détaillé le ministre de la Justice, ajoutant que les effectifs dans les juridictions interrégionales (JIRS) «seront sanctuarisés sur l’ensemble du territoire, et notamment à Marseille». Bruno Retailleau a lui indiqué qu’il allait augmenter «les moyens des 15 antennes et neuf détachements de l’Office antistupéfiants (Ofast)» en région. La «filière investigation» sera également «renforcée», a-t-il ajouté, sans détails.
À Marseille, où la criminalité organisée constitue une «cause nationale», selon Bruno Retailleau, 25 enquêteurs supplémentaires seront nommés et les effectifs de police de la voie publique renforcée de 95 fonctionnaires. Le ministère de la Justice va également installer un «magistrat de liaison à Bogota», la Colombie figurant parmi les États «source des trafics», a précisé Didier Migaud.
Étendre le champ des cours d’assises spéciales
Le ministre de la Justice a également dit envisager le jugement des «crimes en bande organisée» liés notamment aux stupéfiants par des cours d’assises spéciales, composées uniquement de magistrats professionnels, à l’image des affaires de terrorisme.
Recourir uniquement à des magistrats professionnels plutôt qu’aux jurys populaires qui composent normalement les cours d’assises «permettrait d’éloigner le risque de pression exercée sur les jurés en vue d’orienter la décision judiciaire finale», a-t-il précisé. Le ministre de l’Intérieur a aussi rappelé son souhait de «transposer» à la criminalité organisée les «techniques d’enquête» utilisées en matière de lutte contre le terrorisme.
Prévention et nouvelle infraction
Didier Migaud a également rappelé la nécessité d’un «électrochoc» auprès de la population, annonçant le lancement d’une «campagne de communication» pour «révéler les liens entre l’usage de stupéfiants, les violences des trafiquants et les infractions qui en découlent». «Au-delà de l’incarcération, il faut frapper les criminels au portefeuille, en renforçant les possibilités de saisie et de confiscation judiciaire», a aussi estimé le garde des Sceaux.
Il a également précisé que la création d’«une infraction d’association de malfaiteurs au niveau criminel» qui devra «être étendue aux assassinats et être assortie d’une peine de réclusion criminelle» pourra également être envisagée.
Avec AFP