Réunies ce mardi à Paris, les CPME des Outre-mer ont d’une voix commune plaidé « une prise de conscience collective » et proposé « des solutions structurelles et ciblées » pour « redresser l’économie des territoires ultramarins, avant qu’il ne soit trop tard ». Parmi ces solutions, « l’urgence absolue » d’un retour de la sécurité, notamment en Nouvelle-Calédonie et en Martinique, et l’élaboration d’une loi d’orientation pluriannuelle.
Demande prioritaire, alors que la Nouvelle-Calédonie et la Martinique connaissent encore des situations tendues : « le rétablissement de la sécurité civile et de la libre-circulation des personnes ». « Sans sécurité, il n'y a pas d'investissement. Et sans investissement, il n'y a pas de prospérité » souligne Dominique Vienne, chargé des CPME océaniques au sein du comité exécutif de la CPME.
« Si l'État-nation ne concourt pas à rétablir et à créer les conditions de sécurité, on ne peut pas entreprendre, voire même on ne peut pas demander aux banquiers de nous suivre, on ne peut pas demander à des partenaires financiers de nous suivre. Donc c'est une nécessité élémentaire, structurelle », ajoute-t-il, alors que l’assureur Generali a annoncé hier suspendre les souscriptions aux risques entreprises dans les Antilles, au même titre que la Nouvelle-Calédonie. Voilà pour ce qui est d’une demande de court terme, à laquelle s’ajoute une « évaluation des effets des abaissements du coût du travail en Outre-mer via un panel d’entreprises, émanant des secteurs de l’industrie, des services, du commerce ».
Sur le moyen terme, les CPME ultramarines réclament une loi d’orientation pluriannuelle pour sortir du « cycle répétitif et court-termiste des projets de loi de finances ». « Il nous faut un horizon beaucoup plus lointain, il nous faut une loi de programmation à 15 ans » insiste Dominique Vienne. Un horizon qui assurerait, selon les CPME ultramarines, une « pleine intégration dans la République en tenant compte des spécificités locales » ; un « suivi des politiques de contractualisation entre l’État et les collectivités » ; une « nouvelle politique économique fondée sur les atouts notamment géostratégiques et écologiques » des territoires ; et la garantie du pouvoir d’achat et du plein emploi.
« Lisibilité, visibilité, stabilité, c'est les trois ingrédients d'une loi programme » poursuit Dominique Vienne. « De la visibilité, pour permettre aux acteurs économiques de planifier leurs projets, de la lisibilité pour avoir des politiques publiques partagées et comprises par tous, et de la stabilité pour assurer les investisseurs et encourager l'engagement à long terme ». Or, pour Dominique Vienne, « on n'a pas de visibilité parce qu'il faut attendre le PLF, on n'a pas de lisibilité parce qu'on revient sur les engagements qui étaient pris (…) ». En termes de stabilité, Dominique Vienne regrette le nombre de ministres qui se sont succédé aux Outre-mer ces dernières années : « C'est difficile de construire des relations, d’établir des contrats de confiance, un dialogue structurant (…). On a même une instabilité d'interlocuteurs en outre-mer ».
Autre demande structurelle : la création d’une loi plein emploi en Outre-mer pour « répondre à l’enjeu de l’augmentation du taux d’emplois, en revenant sur les conditions du coût du travail via une LODEOM améliorée ». « Cela permettrait aussi d’augmenter les revenus issus du travail et de renforcer la cohésion sociale face à l’enjeu du pouvoir d’achat », expliquent les CPME, qui voient dans cette loi « une réponse structurelle aux maux des Outre-mer trop souvent traités de manière conjoncturels ».
Sur les réponses plus ciblées, la CPME Nouvelle-Calédonie demande le maintien du FSE jusqu’en mai 2025 pour soutenir les entreprises fragilisées ; la poursuite du chômage partiel jusqu’à la mi-2025 afin de préserver l’emploi pendant la crise ; la création d’un outil bancaire à faible taux pour injecter de la trésorerie dans l’économie locale ; et une participation active aux discussions sur l’avenir institutionnel de l’archipel, « afin d’assurer un développement économique durable et inclusif ».
« On a perdu 900 entreprises, qui ont été détruites, brûlées, pillées. On a perdu à peu près entre 20 et 25 000 salariés » et « entre 20 et 25 % du PIB » a rappelé Nicole Moreau, présidente de la CPME Nouvelle-Calédonie. « On a un gros problème avec les assurances. On a perdu toutes les garanties émeutes, ce qui fait que quand on va demander à la banque d'étaler nos dettes ou d'étaler nos créances, la banque refuse puisqu'on n'a plus d'assurance. Donc comment voulez-vous tenir une entreprise si vous n'avez plus ni assurance ni banque ? » s’interroge la présidente qui demande à l’État et surtout aux collectivités calédoniennes de réduire leurs dépenses publiques.
Si la situation en Martinique s’est, de son côté, calmée, elle reste fragile, a souligné la présidente de la CPME de l’île, Céline Rose. « Il faut rester très attentif à ce que ça ne redémarre pas dans des situations de blocage ». Pour ce qui est des demandes spécifiques à l’île antillaise, les CPME citent une « réévaluation de la situation économique, avec un focus sur l’accord signé pour lutter contre la cherté de la vie et ses impacts sur les entreprises locales » et la « mise en place de mesures concrètes pour soutenir les entreprises, notamment sur la fiscalité locale et les difficultés d’approvisionnement en produits de première nécessité ». « La Martinique n’est pas un territoire d’importations. Il faut développer la production locale et le commerce de proximité ».