Guyane : Inauguration d'un mémorial en hommage aux déportés des zoos humains à Iracoubo

© Collectivité territoriale de Guyane

Guyane : Inauguration d'un mémorial en hommage aux déportés des zoos humains à Iracoubo

Un mémorial dédié aux victimes des zoos humains a été érigé, ce dimanche 11 août 2024, à Iracoubo. Deux statues de bronze, représentant une jeune femme Kali’na et une autre, plus âgée, ont été installées dans le bourg de la commune. Ce monument symbolise les 47 Kali’na et Arowaka emmenés à Paris en 1882 et 1892 pour être exposés dans les zoos humains du Jardin d'Acclimatation. Précisions avec les interviews réalisées par notre pas de Radio Peyi.



Ce projet est le résultat d'un long travail mené par Corinne Toka Devilliers et son association, Moliko Aletpo, visant à reconnaître le traumatisme subi par les communautés autochtones. Lors des Expositions Universelles de l'époque, la France exposait des « sauvages » issus de ses colonies, sous prétexte d’études scientifiques basées sur une hiérarchisation raciale. Ces voyages ont laissé des traces profondes, avec des victimes qui, au terme d’un périple humiliant, ont été examinées comme des curiosités. Nombreux sont ceux qui en sont revenus traumatisés, et près d'une dizaine ont péri loin de leur terre natale.


Pour la maire d’Iracoubo, Céline Régis, ce mémorial contribue à la réconciliation des différentes communautés de la région : « Pour Iracoubo, ce projet fait sens parce que nous sommes dans une vraie division culturelle, nous sommes dans une vraie frustration pour certaines communautés. Il faut vraiment qu’on arrive avec ce projet, à faire se comprendre, se connaitre, parce que je pense que ça part d’un sentiment qu’on ne se connait pas. Et en même temps, j’ai le sentiment que plus haut, que nous, c’est-à-dire à 8.000 km, joue de ça, et moi je voudrais vraiment qu’on arrive chacun à comprendre que nous devons faire ensemble, mais nous devons nous respecter mutuellement ».

Cependant, du côté des autorités autochtones, si le projet est salué, certains estiment qu’il aurait pu aller plus loin. Agnès Lieutenant, qui représentait le yopoto de Mana, René Lieutenant, a exprimé ce sentiment : « 47 êtres humains, bébés, enfants, adolescents, femmes, hommes, que nous ne devons plus jamais oublier. Jamais plus, et cette nouvelle génération doit connaitre leur histoire. Leurs souffrances, leurs conditions de vies, plus qu’un animal, a été meurtrière, et aujourd’hui, lors des recherches de l’association Moliko, nous avons retrouvé des restes humains, qui depuis 132 ans sont dans des boîtes, fermées. Comment cela est-il même possible, quand nous savons que nous sommes unis et que nous ne faisons qu’un avec nos morts, nous, peuples autochtones, et bien entendu, les autres peuples aussi. Le deuil reste une étape importante, pour que nous puissions retrouver une certaine paix dans notre spiritualité ».

Damien Chaillot