De passage à Paris, Outremers360 a interrogé le président de l'Union des entreprises de Guadeloupe, il tire de nouveau la sonnette d’alarme afin de tenter d’alerter sur la situation plus que tendue dans laquelle se trouvent les entreprises de l’archipel depuis quelques années. Problème d’eau, d’insécurité, de délais de paiement et maintenant de concurrence déloyale avec l’arrivée de plus en plus importante de produits de contrebande sur le marché… Pour Bruno Blandin, les acteurs doivent prendre la mesure de la situation et réagir en conséquence.
Depuis mai 2023, L’Ude-Medef Guadeloupe alerte sur la situation critique vécue par les entreprises. Presque un an plus tard, rien ne semble avoir changé. La situation se dégrade de plus en plus, d’après le constat de son président, Bruno Blandin. L’Ude - Medef Guadeloupe, première association d'entreprises de la Guadeloupe tant par le nombre d'adhérents, que par le nombre de salariés entreprises employés par les entreprises compte près de 1200 structures, principalement des petites et moyennes entreprises. Leur nombre est en croissance constante. "Ce n’est pas faute d’avoir prévenu des conditions difficiles dans lesquelles doivent évoluer les acteurs économiques. Les collectivités doivent prendre très au sérieux les problématiques de l’eau en Guadeloupe. Les entreprises risquent de mourir très vite. La situation est très inquiétante parce qu’il y a une dégradation du climat qui fait que nous avons également de plus en plus des règlements de comptes ou des attaques qui nous donnent l’impression que nous devenons une zone de non-droit».
Des entreprises au bord de l’asphyxie
Entre pénurie d’eau et insécurité croissante, les entreprises locales, adhérentes de l’Ude-Medef sont dans la tourmente. Principalement constituées de petites et moyennes entreprises (PME) et de très petites entreprises, elles doivent faire face à des délais de paiement extrêmement longs de la INIart de certaines EPCI. Pour Bruno Blandin, président Ude - Medef Guadeloupe, il faut désormais durcir le ton. « L’État paye. La Région paye. Le Département paye. Certaines EPCI, l’Hôpital et de nombreuses municipalités ne payent pas les TPE, les PME. Alors, la première des choses qu'il faut dire, c'est qu'il faut définitivement que l'ensemble des entreprises de la Guadeloupe facturent les intérêts moratoires. C'est un droit. À partir du moment où des intérêts moratoires seront facturés, certaines communes qui se soucient de leurs dépenses feront plus attention et paieront plus vite. Mais, actuellement, certains de nos adhérents se posent la question « est-ce que je continue à investir ou pas ? ». Le manque d’eau sur le territoire impacte de plus en plus l’économie locale. Si nous voulons régler le problème d'eau, il faut qu'on aille vers des délégations de services publics. Les entreprises guadeloupéennes devraient soit être appelés comme sous-traitants, soit faire partie de ces délégations. L’objectif, c’est d’inciter les donneurs d'ordre publics a privilégier les entreprises guadeloupéennes sur l’ensemble des appels d’offres». Mais pour le représentant de l’Ude-Medef Guadeloupe, d’autres priorités doivent également être prise en compte : l'insécurité grandissante qui affecte la confiance des entrepreneurs et des investisseurs, les zones commerciales et touristiques étant particulièrement touchées et l'arrivée massive de produits de contrebande, qui crée un marché parallèle où les entreprises locales qui tentent de respecter les normes et les obligations fiscales sont défavorisées. « Il y a une concurrence vis-à vis de nos producteurs, agriculteurs, commerçants qui n'est ni saine, ni tolérable. Nous avons aujourd'hui, sous le plan fiscal, un certain nombre "d'avantages", dus à notre insularité, à notre non-développement dans certains domaines, qu'on nous retire petit à petit. Il faut réformer le système pour que la production locale soit protégée, que les recettes de l’octroi de mer restent en Guadeloupe, et que l’on ait une taxe moderne que l’on puisse reexporter dans les autres pays ».
Insuffler un souffle nouveau
D’autres problématiques inquiètent l’Ude - Medef Guadeloupe à l’instar du prix du Kérosène qui impacte directement les prix des billets d’avion. Bruno Blandin espère une intervention des acteurs pour que les prix ne s’envolent pas. Parallèlement, la structure essaye de maintenir un rythme de croissance actif auprès de ses adhérents. L’une des actions qui doit voir le jour « la stratégie du bon d'achat ». « L'idée, c'est de faire en sorte que l'argent de l’Europe ne reparte pas de chez nous. Comment donner de la visibilité à nos entreprises ? Comment est-ce que mon carnet de commandes va pouvoir se remplir ? Comment je pourrais collaborer avec d'autres entreprises ? Monter en compétences ? Embaucher plus de monde ? Acheter des machines ? Investir sur des machines qui me permettent de monter mon niveau en termes de technicité et de rentabilité ? L'objectif, c'est vraiment d'utiliser ce savoir, cette stratégie du bon achat pour faire en sorte que la commande publique aide à développer le tissu économique ». Le processus devrait être opérationnel d’ici la fin de l’année.
Les priorités sont nombreuses, mais l’eau et la sécurité restent en tête des urgences pour l’Ude - Medef Guadeloupe. « Nous ferons tout ce qu'il faut pour pouvoir faire en sorte que nos compatriotes aient de l'eau et que nos entreprises travaillent dans de bonnes conditions en matière, je dirais, d'alimentation en eau et de sécurité ». Ces questions devraient être abordées dans quelques semaines avec le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, attendu mi-avril en Guadeloupe.
Abby Said Adinani