Dans « L'embrasée », son nouveau roman-jeunesse, l'auteure guadeloupéenne Estelle-Sarah Bulle réaffirme son art de conteuse

Dans « L'embrasée », son nouveau roman-jeunesse, l'auteure guadeloupéenne Estelle-Sarah Bulle réaffirme son art de conteuse

Après « Les fantômes d'Issa » en 2020, l'auteure d'origine guadeloupéenne Estelle-Sarah Bulle nous propose son deuxième roman-jeunesse intitulé « L'Embrasée » paru chez Caraïbéditions. Une histoire d'amitié entre adolescents et de conflits de génération sur fond d'intempéries climatiques qui confirme ses talents de conteuse notamment dans le genre littéraire consacré  à la jeunesse.

Dès son premier roman « Là où les chiens aboient par la queue » paru en 2018 aux éditions Lian Lévi, Estelle-Sarah Bulle qui a décidé, aux abords de la quarantaine, de se consacrer exclusivement à l'écriture, s'est révélée comme une écrivaine à part entière dans le cercle assez restreint de la littérature française.

Ce premier ouvrage qui, tout en mêlant autobiographie et fiction, racontait les péripéties d'une famille antillaise écartelée entre la Guadeloupe et l'Hexagone, entre son identité culturelle guadeloupéenne et la culture française, a été salué par la critique littéraire. Certains comme Télérama ont parlé de « poésie facétieuse » où le thème de l'exil et du déracinement est traité de « manière délicate ». D'autres, à l'instar de La Croix ont estimé que c'est « une épopée poétique et politique ».

C'est en tout cas un accueil élogieux pour cette première tentative qu'illustrent les nombreuses distinctions reçues comme le Prix Carbet de la Caraïbe et du Tout-Monde initié par Edouard Glissant, le Prix Stanislas du premier roman ou encore le Prix Eugène Dabit du roman populiste.

Une écriture chatoyante adaptée à un public jeune

En 2020, consacrée et auréolée de nombreuses marques de reconnaissance, cette originaire de la Guadeloupe née il y a 48 ans à Créteil,  en région parisienne, tente alors une excursion dans la littérature jeunesse avec un nouvel ouvrage baptisé « Les fantômes d'Issa » paru aux éditions « l'école des loisirs ».

Dans ce roman consacré à des adolescents, dont les parents sont originaires de Mayotte, mais ayant grandi en région parisienne, Estelle -Sarah Bulle nous propose, dans une écriture toujours « chatoyante » bien qu'elle soit adaptée à un public jeune, un travail sur le sentiment de culpabilité de ces ados.

En 2021, retour à la littérature pour adultes avec « Les étoiles les plus filantes » où Estelle-Sarah Bulle s'essaie à retracer l'histoire du tournage du film « Orfeu Negro » de Marcel Camus tiré de la plus célèbre histoire d'amour de la mythologie grecque « Orphée et Eurydice ».

Un film culte qui a reçu la palme d'or au festival de Cannes en 1959 et l'Oscar du meilleur film étranger à Hollywood en 1960. Son ouvrage est un savant mélange de réalité et de fiction où l'auteure guadeloupéenne nous fait revivre le contexte politico-économico-social qui prévalait à l'époque au Brésil, lieu du tournage, et comment le cinéma peut-être aussi un instrument de pouvoir politique et géopolitique.

Des dialogues émaillés d'expressions créoles

En cette année 2022, Estelle-Sarah Bulle se replonge dans la littérature jeunesse en nous offrant son deuxième roman-jeunesse intitulé « L'Embrasée » publié chez Caraïbéditions dans lequel l'auteure guadeloupéenne continue à explorer les tourments des adolescents. Cette fois-ci, il y est question d'amitié, d'entraide, de solidarité,  mais aussi de conflits de génération sur fond d'intempéries climatiques.

Paul, 14 ans, originaire de Guyane, est un ado particulièrement brillant, mais timide qui cache une profonde blessure et qui sent une menace permanente planer sur lui sans pouvoir tout à fait l'identifier. Il va rencontrer deux autres ados, Amalia et Jory et se lier d'amitié avec eux à l'occasion d'une mission scientifique menée par ses parents dans un village appelé Vauclerc, niché sur les pentes de l'Embrasée, un puissant volcan se trouvant dans l'île. Les trois nouveaux amis vont apprendre à se connaître,  à s'entraider et à surmonter les relations compliquées qu'ils entretiennent avec leurs parents respectifs. Tout cela sur fond de tempête tropicale.

Une belle leçon d'amitié et un livre plein d'enseignements à tirer sur le fossé générationnel qui sépare les enfants des parents avec les conséquences traumatisantes qui peuvent en résulter.

Dans « L'Embrasée », Estelle-Sarah Bulle réaffirme tout son art de conteuse illuminant son récit d'un dialogue riche émaillé d'expressions créoles, exprimant ainsi l'oralité du créole qui démontre qu'il est une vraie « langue romanesque », comme l'assure très justement l'écrivain martiniquais Patrick Chamoiseau.

E.B.

L'Embrasée    

De Estelle-Sarah Bulle

Roman-jeunesse

Chez Caraïbéditions

424 pages