Une feuille de route sur 15 ans, pour la protection des cétacés, a été publiée par l’aire marine protégée des Antilles française, dédiée à la conservation des mammifères marins créé en 2010. Après 14 ans d’existence et un premier plan de gestion, le Sanctuaire publie aujourd’hui son nouveau document stratégique pour la période 2023- 2037.
Dans un document cadre d’un peu plus de 200 pages, le nouveau plan de gestion du Sanctuaire Agoa invite dans une première partie à découvrir ces mammifères marins qui peuplent les eaux du Sanctuaire, les paramètres environnementaux de leurs habitats, ainsi que les usages et facteurs d’influence impactant ces espèces.
Dauphins, orques, baleines, ou encore lamantin, aujourd’hui éteint dans les Antilles françaises, autant d’espèces, parmi d’autres, que le sanctuaire protège, les mammifères marins étant menacés par les pollutions, le risque de collisions, le dérangement lors de mauvaises approches, les captures accidentelles ainsi que les effets du changement climatique.
Au sein du Sanctuaire Agoa, ce ne sont pas moins de 22 espèces qui vivent ou migrent dans sa zone d’influence, qui s’étend sur 143.256 km² dans les eaux de Martinique, de Guadeloupe, de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy.
Les mammifères marins constituent un maillon essentiel des écosystèmes marins à l’origine de nombreuses codépendances, à l’image du rôle des baleines à bosse, qui contribuent à la fois à la croissance du phytoplancton, qui est à la base des réseaux trophiques marins, ainsi qu’à la capture du CO2 atmosphérique. De fait, les cétacés sont qualifiés d’espèces « parapluie », car en les protégeant, on protège toutes les autres espèces de leur écosystème.
Ainsi, dans ce nouveau plan de gestion pour la période 2023-2037, le Sanctuaire Agoa s’attache à détailler les actions à entreprendre pour toujours mieux les protéger.
Ce plan est rédigé autour de 8 stratégies d’action, élaborée par l’équipe technique du Sanctuaire Agoa, qui organisait en 2022 des ateliers de concertation avec toutes les parties prenantes de la protection des cétacés.
Des acteurs variés des 4 îles composant le Sanctuaire ont participé à la définition des actions à mettre en place pour répondre aux objectifs à long terme de protection des mammifères marins dans les Antilles françaises : associations de protection de la nature, collectivités territoriales, services de l’Etat, aires protégées, instituts de recherche et acteurs socio-professionnels usagers de l’espace maritime.
Ces objectifs à long terme visent ainsi la croissance des populations de grands cachalots, à l’amélioration de la capacité d’accueil des baleines à bosse afin d’assurer la quiétude de leur migration reproductrice, ainsi qu’au maintien des autres espèces de mammifères marins dans nos eaux, tout au long de leur cycle de vie.
Les 8 stratégies d’action détaillées dans le document sont les suivantes :
- Améliorer les connaissances sur la chasse aux cétacés dans la Caraïbe, en évaluer l’impact et accompagner les territoires souhaitant développer des alternatives durables.
- Améliorer les connaissances sur les collisions et renforcer l’application de la réglementation en vigueur.
- Analyser les sources et le devenir des pollutions dues aux contaminants et déchets, documenter les impacts et mettre en place des actions ciblées.
- Améliorer les connaissances sur la pollution acoustique, évaluer son impact sur les cétacés et accompagner les acteurs à la réduction des émissions sonores.
- Approfondir les connaissances sur les interactions avec la pêche professionnelle, réduire les impacts potentiels et renforcer les collaborations avec les pêcheurs.
- Accompagner les acteurs du whale watching vers une pratique d’excellence environnementale.
- Structurer l’acquisition de connaissances sur les espèces, renforcer les collaborations avec les organismes de recherche et les universités locales et valoriser les travaux du Sanctuaire à l’international.
- Renforcer les efforts de coopération au niveau caribéen et participer aux instances internationales concernées.
De ces axes stratégiques, et pour plus d’efficacité, ce plan de gestion à 15 ans a été divisé en trois plans d’action quinquennaux. Le premier de ces plans d’action, qui s’étale sur la période 2023-2027, est d'ores et déjà mis en œuvre par l’équipe du Sanctuaire Agoa en collaboration avec les organismes scientifiques, les associations de protection de la nature, les collectivités, les organisations professionnelles et entreprises concernées, les administrations publiques et ce à l’échelle des Antilles françaises et de la Caraïbe en général.
Pour répondre aux objectifs de la stratégie Pêche, le Sanctuaire Agoa a ainsi réalisé une étude sur les interactions entre la pêche professionnelle et les cétacés dans les territoires des Antilles françaises et travaille à la mise en place d’un réseau de remontée d’observations avec ces professionnels. Une nouvelle campagne d’études acoustiques permettra par ailleurs de mieux caractériser le paysage sonore, et plus particulièrement les sources de pollution acoustique, dans lequel baignent les cétacés. La réglementation d’approche dans le Sanctuaire est également en cours de révision.
Enfin, le Sanctuaire a mis en place un projet de coopération caribéenne, le projet Interreg Caraïbes CAMAC, porté avec le WWF des Antilles néerlandaises et l’association haïtienne HOP, dédié à l’étude et l’amélioration des interactions entre la mégafaune marine et les activités humaines. La première phase de ce projet s’est achevée fin 2023.
Au total, ce premier plan d’action 2023-2027 répond à 25 objectifs opérationnels, comporte 80 mesures et 167 actions pressenties.
Le plan de gestion 2023-2037 est à retrouver sur le site internet du Sanctuaire Agoa.
Damien CHAILLOT