A Paris, les étudiants de Nouvelle-Calédonie continuent d'être accueillis malgré les difficultés

© Maison de la Nouvelle-Calédonie

A Paris, les étudiants de Nouvelle-Calédonie continuent d'être accueillis malgré les difficultés

Est-ce que les bourses seront impactées par la crise ?" Accueillis à la Maison de la Nouvelle-Calédonie (MNC) à Paris, des étudiants du Caillou sont formés à la vie dans l'Hexagone. A l'appréhension habituelle s'ajoute le contexte tendu que traverse le territoire.


Arrivés la veille au soir, harassés par 24 heures et 22.000 kilomètres de voyage (escale comprise), les néo-étudiants calédoniens écoutent patiemment Francis Ixeko, le responsable du service étudiant de la MNC, leur expliquer les subtilités de la Sécurité sociale hexagonale. "Durant trois jours d'ateliers, on va formaliser les démarches administratives, voir où ils en sont au niveau du logement", détaille M. Ixeko. "Avec le temps, on a vu que tant que les démarches administratives ne sont pas réglées, ça joue sur leur motivation à la rentrée". Jusqu'à la fin du mois d'août, environ 75 étudiants originaires de la province des Îles, la moins peuplée des trois provinces du territoire français de 270.000 habitants, passeront par la MNC.

Les émeutes qui ont touché la Nouvelle-Calédonie depuis le 13 mai ont largement épargné la province des Îles. Mais les répercussions de la crise, qui a mis à terre l'économie calédonienne et les finances des collectivités locales, inquiètent les étudiants.
"Est-ce que le paiement des bourses sera impacté par la crise?", interrompt l'un d'eux tandis que Francis Ixeko rappelle l'importance d'ouvrir un compte en banque rapidement et les modalités de versement des aides.
"C'était ma principale inquiétude parce que je savais que si je ne la recevais pas, je ne pouvais pas venir", complète Annie Rokuad, 18 ans, future étudiante en sociologie à Lille.

A midi, les étudiants s'éparpillent dans les restaurants environnants. Si beaucoup d'entre eux découvrent l'Hexagone, les responsables de la MNC ont constaté une transformation de leur attitude en quelques années. Ils sont devenus plus débrouillards, moins timides avec l'essor des réseaux sociaux les mettant en contact avec la vie hexagonale.
"Je trouve ça excitant", dit Chelsea Ajapuhnya, originaire de Lifou et future étudiante en LEA à Rodez (Aveyron), en train de faire son choix entre différents opérateurs de téléphonie mobile.
"On vit sur une île depuis des années alors on a hâte de voir autre chose", ajoute-t-elle, tout en sachant qu'elle reviendra au pays "pour l'aider à se relever de cette crise".

 "Reconstruire le pays" -

Car si certains étudiants reconnaissent être soulagés de quitter pour un temps l'ambiance pesante de la Nouvelle-Calédonie, tous disent vouloir y revenir. "Quitter la Nouvelle-Calédonie, ça me permet de pouvoir avancer dans mes études. Mais peut-être que pour la suite, avec mes diplômes, je vais pouvoir aider mon pays à se reconstruire", explique Leïlani Ita, 18 ans, qui part étudier les ressources humaines à Clermont-Ferrand et se dit persuadée que le territoire "peut remonter la pente".

La MNC aide aussi à la recherche de logement, compliquée par les problèmes de garants, donne des conseils pédagogiques ("Ils passent énormément de temps au téléphone avec leur famille au point de parfois délaisser leurs études", dit Francis Ixeko) et les sensibilise au "piège de l'argent".
"On essaie de les alerter là-dessus. Par rapport à la vie chère en Nouvelle-Calédonie, c'est un peu le paradis ici", explique Adrien Trohmae, le référent "vie étudiante" à la MNC.

Point d'ancrage incontournable des étudiants calédoniens dans l'Hexagone, la MNC garde le contact avec eux "au moins une fois par mois" et il n'est pas rare que les liens perdurent dans la durée, poursuit M. Trohmae.
Mais l'institution fondée en 1989, au lendemain de la signature des accords de Matignon-Oudinot, n'est pas épargnée par les soubresauts politiques que traverse la Nouvelle-Calédonie. Sans directeur depuis l'été 2022, elle est constamment sous la menace d'une cessation de paiement.

Les provinces Sud et Nord ne financent plus la MNC et ont confié le suivi dans l'Hexagone de leurs étudiants à leurs propres organismes, rompant avec "l'esprit de concorde" qui présidait à la création du lieu. "Cette Maison de la Nouvelle-Calédonie, c'est la maison de tous les Calédoniens. Le fait que d'autres (provinces) aient des services différents aujourd'hui, c'est un peu triste. Il y a quelque chose de bancal, cassé", regrette Adrien Trohmae.

Avec AFP