Alerte tsunami dans le Pacifique : En Polynésie, une gestion de crise mitigée

Alerte tsunami dans le Pacifique : En Polynésie, une gestion de crise mitigée

À Tahiti, de nombreux usagers ont été bloqués sur les routes de l’île, ce jeudi 4 mars ©Capture TNTV

Suite au séisme de magnitude de 8,1 survenu au nord de la Nouvelle-Zélande, une alerte tsunami a été déclenchée dans plusieurs États et territoires insulaires du Pacifique sud, notamment à Wallis et Futuna, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie. Mais en Polynésie, la gestion de la crise a reçu un accueil très mitigé. 

Il est environ 9h30 à Tahiti (heure locale) lorsque la secousse de magnitude 8,1 est ressentie en Nouvelle-Zélande, et engendre une alerte tsunami dans le Pacifique. En Polynésie, la vague est prévue entre 12h30 et 14h30 selon les estimations et les îles. « Le Pacific Tsunami Warning Center et le Laboratoire de géophysique de Polynésie française ont identifié une menace très forte pour les côtes polynésiennes avec des hauteurs d’eau pouvant atteindre 1,50m par endroits », indique le Haut-commissariat de la République en Polynésie. Sont notamment concernées les îles de Tahiti et Moorea, les îles Australes au sud de la Polynésie et les Marquises, à l’extrême nord-est.

« Dans ce contexte, il a été décidé de placer les archipels des Australes et des Marquises en vigilance renforcée et de lancer une évacuation des populations sur les deux baies de Moorea et les espaces côtiers de Mahina à Mahaena identifiés par le laboratoire de géophysique comme les zones menacées par le plus fort risque de submersion », explique encore le représentant de l’État. Un plan d’évacuation qui a notamment suscité de nombreuses interrogations du côté de la population. En effet, les zones concernées se situent sur les côtes nord et est de Tahiti et Moorea, alors que le séisme ayant eu lieu en Nouvelle-Zélande, la vague consécutive arriverait par le sud-ouest, touchant donc en premier lieu les côtes sud et ouest.

L'épicentre du séisme était situé au large nord de la Nouvelle-Zélande

L’épicentre du séisme était situé au large nord de la Nouvelle-Zélande

Selon nos informations, le Haut-commissariat a décidé de l’évacuation des côtes nord et est en suivant les données recueillies par les balises marines de l’Institut de recherche et développement (IRD). Il était ainsi prévu que la vague soit plus forte et dangereuse sur les côtes évacuées, malgré une situation géographique qui aurait pu faire croire qu’elles seraient épargnées. Les fonds marins ont aussi un rôle fondamental dans la vitesse de propagation et la force d’une vague liée à un tsunami. Les côtes nord et est de Tahiti sont également dépourvues de barrières coralliennes, tout en étant plus montagneuses que la côte ouest.

Outre l’évacuation de certaines côtes, c’est la fermeture des axes routiers qui a quelque peu exaspéré les usagers polynésiens, pris au piège sur les routes en pleine journée. « Cette situation a occasionné une congestion importante de la circulation routière sur l’agglomération de Papeete mais cette mesure était indispensable pour faciliter l’évacuation des populations résidentes et pour préserver la sécurité des automobilistes en les empêchant d’accéder aux zones risquant d’être submergées », justifie le Haut-commissaire.

Autre point de confusion : la prise en charge des élèves dans les établissements scolaires. Selon les remontées locales, certains établissements ont demandé aux parents de récupérer leurs enfants, rajoutant une couche de panique et de cacophonie. « Quand on applique le plan de sauvegarde communal, il appartient au maire d’évacuer ou pas sa population. Aujourd’hui, il y a eu un petit vent de panique, j’ai pris la décision de laisser les enfants à la charge de leurs parents (…). On a dérogé au règlement et j’en prends la responsabilité » a expliqué le maire de la commune de Mahina, une des communes concernées par les évacuations et donc inaccessible, interrogé par Polynésie La 1ère.

Si le maire reconnaît « quelques ratés », il assure toutefois que les élèves ne pouvant être récupérés par les parents bloqués sur les routes ont été pris en charge par les établissements. Sur l’île voisine de Moorea, les élèves des écoles maternelles et primaires ont été évacués à leur domicile par bus, rapporte TNTV. De leurs côtés, les grands navires tels que les ferries assurant la liaison Tahiti et Moorea ont été amenés au large, tandis que les petits bateaux de pêcheurs mis à l’abri sur terre.

Sirènes défectueuses, lacunes au niveau de l’information, confusions sur la prise en charge des élèves : l’alerte tsunami de ce 4 mars en Polynésie a mis en exergue les améliorations à apporter à la gestion de crise. « La chaîne d’information n’a pas été véhiculée au bon moment et au bon endroit », a commenté le maire de Mahina. « Les routes ont été bloquées dès midi, alors même que le protocole veut que la population se rende dans les zones de refuge en hauteur (…). Le haut-commissariat a privilégié Facebook quand la population scrute la moindre information sur leur poste radio, et cela aussi c’est diffusé dans les consignes de sécurité », explique la journaliste de Polynésie La 1ère , Aiata Tarahu. « La citation ‘c’est en faisant des erreurs que l’on apprend’ a pris tout son sens ».

Pour rappel, les deux dernières alertes tsunami en Polynésie avaient eu lieu en 2010 et 2011, la seconde suite au séisme au Japon. L’alerte avait alors était donnée en pleine nuit et les populations réfugiées sur les hauteurs assez rapidement pour attendre la vague prévue au petit matin. Pour ce jeudi, la hauteur d’eau a été relevée entre 30 à 40 cm et surtout, « aucune victime ou dommage matériel significatif n’est à déplorer ». L’alerte tsunami a été levée à 15h30 (heure locale).