Le gouvernement polynésien a relancé mardi un projet de six hôtels à Tahiti, pour près d'un millier de chambres et un demi-milliard d'euros, visant à accueillir un nombre grandissant de touristes, alors que certains établissements n'ont pas survécu à la crise du Covid.
Le ministre polynésien des Grands travaux, René Temeharo, a annoncé la sélection d'« investisseurs locaux » à l'issue d'un appel d'offre, mardi à Papeete lors d'une conférence de presse. Les projets précédents menés avec des investisseurs étrangers étaient tombés à l'eau.
Pour rappel, cette nouvelle procédure d’appel à projets avait été lancée le 6 septembre 2022. Les candidatures ont été remises le 9 janvier 2023 « et nous avons réceptionné 9 propositions », détaille le ministre. « Il a fallu un mois à G2P (Grands projets de Polynésie, ndlr) pour analyser les candidatures et les propositions pour chaque lot, et pour évaluer les propositions de loyer et la viabilité des investissements » a-t-il ajouté, alors que les auditions des porteurs de projet ont été menées sur deux jours, ces 13 février et 14 février. « C’est vous dire que le choix du jury est encore tout chaud ».
Le projet hôtelier Village tahitien permettra donc la construction de six hôtels en bord de mer sur une parcelle de 16,5 hectares, soit 943 clefs réparties du 3 aux 5 étoiles, dont un projet avec galerie marchande, et dont le coût est estimé à 60 milliards de francs pacifique (500 millions d'euros) sur la commune de Punaauia, sur la côte Ouest de Tahiti, près de Papeete et de l’aéroport international de Tahiti-Faa’a.
Le gouvernement a retenu quatre investisseurs pour les six lots : Tahiti Beachcomber, acteur de l’hôtellerie déjà connu en Polynésie avec des établissements sur Tahiti, Bora Bora et sur l’atoll de Tetiaroa, avec le groupe City, qui mène d’autres projets sujets décriés notamment sur Tahiti, les groupes des entrepreneurs polynésiens Louis Wane (distribution et hôtellerie) et Albert Moux (hydrocarbures), et Poe Ura, un groupement constitué par Joël Allain et Éric Minardi, entrepreneur connu en politique pour être député européen et représentant local du Rassemblement national.
Le ministre a aussi assuré qu’un espace vert de près de 4 hectares sera maintenu dans cette zone comme souhaité par la commune de Punaauia. « Cet espace sera public et aménagé en promenade accessible aux familles, y compris la plage et le bord de mer, dans l’idée que le complexe soit intégré dans la ville de Punaauia. La livraison de ces espaces publics avec leurs aménagements sont ainsi programmés en 2025/2026 pour le parc public, et 2026/2027 pour la plage ».
L'économie polynésienne est fondée sur le tourisme et a déjà retrouvé les chiffres d'avant-crise, avec 218 000 touristes en 2022 et des prévisions encore plus optimistes pour 2023. Les pensions de familles et Airbnb se développent, mais le tourisme haut-de-gamme reste la priorité dans les îles les plus visitées, comme Bora Bora et Tahiti.
La desserte aérienne en provenance des États-Unis s'est encore accrue ces derniers mois, avec l'ouverture d'une nouvelle ligne directe depuis Seattle par la compagnie locale Air Tahiti Nui, qui a désormais quatre concurrentes entre Papeete et la côte Ouest des États-Unis : Air France, French bee, United Airlines et Delta Airlines. L'offre de sièges est donc importante, alors que certains hôtels ont fermé pendant la crise : la Polynésie veut rapidement retrouver les mille clefs perdues, à Tahiti mais aussi dans les nombreuses autres îles polynésiennes, réparties sur une surface aussi grande que l'Europe dans l'océan Pacifique.
C'est aussi un enjeu social : le tourisme génère 5 000 emplois directs et l'exploitation du Village tahitien permettra la création de 1 846 nouveaux emplois d'ici 2028, selon le gouvernement local. René Temeharo a toutefois reconnu que ce projet hôtelier était une « Arlésienne » : il a été maintes fois annoncé puis repoussé ou revu à la baisse depuis dix ans. « Je crois que cette dimension nouvelle et plus réaliste devrait garantir la réussite du projet », a-t-il assuré.
Pour rassurer les investisseurs, la Polynésie a proposé « l'établissement des baux emphytéotiques privés de 99 ans, au lieu de 35 ans renouvelable une fois, afin d'être en adéquation avec l'importance des investissements », a précisé le ministre de grands travaux. L’annonce de la relance du Village tahitien intervient à quelques semaines des élections territoriales, mais le ministre des Grands travaux René Temeharo et le vice-président Jean-Christophe Bouissou ont réfuté tout lien avec cette grande échéance électorale en Polynésie.
En attendant, « un protocole d’accord doit être négocié et signé entre le Pays et les lauréats « très prochainement ». « Ce protocole viendra fixer les conditions financières définitives du futur bail » précise l’exécutif local. Des travaux sont déjà en cours sur la partie Nord de la parcelle. Ils concernent notamment l’assainissement pluvial. D’autres travaux de terrassement suivront, pour une mise à disposition des lots entre 2024 et 2028.
Avec AFP.