Une véritable fracture numérique en Nouvelle-Calédonie, les inégalités d'accès au numérique sont particulièrement marquées dans l'archipel. Les îles Loyautés accusent un retard criant dans ce domaine, expliqué notamment par un besoin d'infrastructure plus complexe à mettre en œuvre. Le développement de l'accès au numérique est aujourd'hui une priorité pour la Province des Îles. Le point grâce au reportage de notre partenaire de Caledonia.nc.
Constat sans appel, selon la dernière étude de l'Observatoire du numérique en Nouvelle-Calédonie datée de 2018, seuls 38% des habitants des Loyautés ont accès à un ordinateur portable, contre 53% en Province Nord et 70% pour le Grand Nouméa. Également, seuls 30% des îliens disposent d'une connexion internet fixe, 50% pour la Province Nord et 72% pour le Grand Nouméa. Ces disparités marquées sont devenues enjeux de politique locale, à l'image de la Province des Îles qui fait de l'accès au numérique l'une de ses priorités de mandature.
Dans les faits, l'écart est jusqu'à aujourd'hui très difficile à combler, comme l'explique Michel Oroffino, professeur de mathématique au collège Havila, au micro de Caledonia.nc : “Cela fait plus de 30 ans que je suis sur l'île et ça fait à peu près 20 ans qu'on avait démarré une association qui avait pour but d'aider les habitant de cette île à maîtriser l'outil informatique, et on voit que 20 ans après on a encore du retard. Le retard s'accélère en fait. On est loin d'avoir les outils sur les îles pour pouvoir proposer un suivi pédagogique des élèves à travers l'outil informatique, ça c'est clair”.
Pour la Province des Îles, ces disparités sont notamment dues à l'insularité qui complexifie grandement la mise en place des infrastructures dédiées. Cependant, l'accès au numérique est annoncé aujourd'hui comme une priorité pour les Loyautés. En 2019, l'établissement de lieux communs d'accès à internet, en 2020, la couverture wifi dans des infrastructures publiques, à l'image des aérodromes des îles Loyautés, pour 2021, un contrat de développement passé avec l'Etat permet le financement de points information jeunesse qui serviront aussi de cyber-base à Ouvéa, Maré et Lifou.
Éric Olivier, coordinateur de l'observatoire du numérique en Nouvelle-Calédonie, était l'invité du journal de Caledonia.nc, l'occasion d'évoquer les disparités constatées. Il fait une première distinction des difficultés d'accès étudiées sur 3 strates distinctes. La couche réseau, concernant la couverture des infrastructures permettant l'accès à internet fixe et mobile, la couche équipement, qui concerne l'accès au matériel, téléphone, tablette ou ordinateur fixe et portable, et enfin la couche service et usage, représentant les possibilités d'accès grâce au wifi publique, espaces publiques numériques, accès au réseau pour des services commerciaux ou administratifs.
“Sur la partie réseau, on a effectivement un réseau fixe un peu plus compliquer à développer sur les zones insulaires et surtout sur les zones où les populations sont moins denses (…) par contre, là où on va pouvoir pour l'instant pallier au manque de réseau fixe pour les populations c'est les réseaux mobiles”. L'offre de service mobile, notamment par le système de cartes prépayées, permet au final à environ 68% des habitants de la Province des Îles d'avoir eu accès à internet en 2018, selon le baromètre de l'observatoire du numérique en Nouvelle-Calédonie.
La problématique du manque de fournisseurs internet est abordée, la situation de monopole de l'OPT empêchant toute baisse des prix motivés par une concurrence des marchés. Une piste de réflexion qui se doit d'être modérée, selon Éric Olivier. “Attention, le modèle métropolitain d'internet est quasiment une exception mondiale. C'est avec l'entrée de l'acteur Free sur le marché en métropole qui a cassé les prix de l'internet avec des solutions de consommation illimitée (…) Mais il faut savoir que dans la plupart des pays du monde, on prend un abonnement internet et on va payer en plus notre niveau de consommation”.
Plusieurs politiques sont menées dans le but de réduire la fracture numérique dans l'archipel Calédonien, à l'image d'une convention signée entre la gendarmerie et le gouvernement, qui a permis de redistribuer du matériel informatique vers des associations des îles Loyautés, leur permettant de s'équiper et de proposer un service d'accès aux populations.
Damien Chaillot avec Caledonia.nc.
