L’annonce est tombée ce vendredi en conférence de presse. Le Palika se retire définitivement du FLNKS dont il était membre fondateur depuis 41 ans. Le Parti de Libération Kanak, qui continue de « porter le projet d’indépendance » explique notamment « ne plus se reconnaître dans les décisions prises sans aucune concertation » par le Front, alors que le mouvement continue de prôner « le dialogue et le consensus » avec l’ensemble des partenaires politiques. Un état d’esprit qui l’a conduit à défendre l’accord de Bougival qui « fixe le chemin d’accès progressif à la souveraineté ». Un sujet de notre partenaire Les Nouvelles Calédoniennes.
C’est un « tournant » et « un fait politique majeur » qu’a pris et annoncé le Palika, ce vendredi matin à la presse, puisque le mouvement a décidé de « se retirer définitivement » du FLNKS (Front de libération nationale kanak et socialiste) dont il était membre depuis 41 ans, mais dont il s’était mis en retrait après les émeutes, en août 2024, et l’accession à la présidence du FLNKS de Christian Tein, leader de la CCAT.
Une décision prise « à l’unanimité » des 29 structures qui ont répondu présent (sur un total de trente) au 50e congrès du Parti de Libération Kanak, qui s’est tenu à Bourail, du 7 au 9 novembre.
Le mouvement créé en 1976, premier parti politique à revendiquer une ligne clairement indépendantiste, estime ainsi que les positions du Front sont désormais « en décalage » avec « les bases » actées lors des congrès de l’Anse-Vata, en février 2023, puis de Kaïmolo, en mars 2024, dénonçant des « orientations politiques et ses décisions prises en matière de gouvernance sans aucune concertation ».
« Ce n'est pas par la destruction que l'on peut construire »
« Ce qui se fait au sein du FLNKS ne nous correspond plus. C’est-à-dire qu’on n’a pas renoncé au projet politique d’indépendance révolutionnaire et socialiste du pays. Mais on porte l’option politique de l’indépendance en partenariat, avec comme point central, la négociation. Or, on s’est rendu compte que le FLNKS nouveau, aujourd’hui, n’est plus dans cette stratégie », lance Charles Washetine, le porte-parole du Palika, pour qui « ce n’est pas par la destruction que l’on peut construire quelque chose pour nos enfants », mais bien à travers « le dialogue que le Palika continue de porter depuis 2021 ».
Et c’est dans cet état d’esprit que le Parti de Libération Kanak a signé l’accord de Bougival et qu’il continue de le défendre, à la différence du « FLNKS nouveau », dont le rejet, en dépit de la signature de leur délégation, « n’a pas donné lieu à des perspectives en matière de contenus et de discussions avec les autres partenaires politiques ». Cette stratégie du Front représente, selon le Palika, « un obstacle dans la recherche d’une solution négociée en faveur de l’accès au pays à la pleine souveraineté ».
« État de Kanaky Nouvelle-Calédonie avec la France »
Un processus que l’accord de Bougival, « qui s’inscrit dans les perspectives de l’accord de Nouméa et constitue une avancée politique majeure », peut permettre, selon le parti au tamioc et au fusil, bien qu’il soit encore « perfectible » (voir ci-dessous). « Cet accord fixe le chemin d’accès progressif à la souveraineté sur des bases innovantes, inédites et inéluctables » tout en « prévoyant un processus permettant de sortir de la Constitution française », martèle le bureau politique, pour qui Bougival « prépare le statut de l’État de Kanaky-Nouvelle-Calédonie avec la France ».
« Imaginer cet État, imaginer une nationalité calédonienne dans le prolongement du combat qu’on porte, imaginer des institutions rénovées… On se projette bien au-delà de la gestion des compétences régaliennes. Et ce n’est pas rien de donner à la Nouvelle-Calédonie la possibilité d’intervenir dans le cadre des relations internationales dans la région », insiste Charles Washetine. « C’est une avancée qui nous permet d’inscrire le processus de décolonisation et d’avoir un processus de prise en main par les Calédonien(ne)s de leur propre destin. L’idée étant d’aller chercher l’adhésion d’une majorité de la population autour de cet accord. »
Cap sur les municipales et les provinciales
Et pour ce faire, maintenant que le divorce est prononcé avec le Front, le Palika, au-delà des réunions d’information sur Bougival qu’il continue de mener, a les yeux rivés sur 2026 et notamment les prochaines échéances électorales provinciales, mais surtout municipales. Un scrutin pour lequel le bureau politique se présentera sous la bannière UNI (et donc en accord avec l’Union progressiste en Mélanésie, qui doit décider le week-end prochain à son tour de rester ou de se retirer du FLNKS).
Objectif : lutter contre l’abstention. « On demande à tous nos militants de resserrer les rangs pour ces élections municipales qui constituent le premier niveau des politiques publiques et qui peuvent être un bon tremplin pour les provinciales », poursuit Charles Washetine. Un scrutin « dont on sait les enjeux puisque ce sera aux futurs élus d’élaborer la loi fondamentale pour le prochain statut du pays ».
Pour l'UNI, il faut encore « améliorer » l'accord de Bougival
Ce mardi 11 novembre, lors des discussions bilatérales avec la ministre des Outre-mer Naïma Moutchou, la délégation de l'Uni était emmenée par Victor Tutugoro (UPM), Adolphe Digoué (Palika) et Jean-Pierre Djaiwé (Palika), qui a pris la parole à l'issue de cet entretien, assurant continuer de soutenir l'accord de Bougival et vouloir continuer le travail avec les non-indépendantistes, mais aussi le FLNKS, mais en comptant « améliorer le texte sans toucher à l'équilibre général ».
Parmi ces points à faire évoluer le transfert des compétences régaliennes à la Nouvelle-Calédonie. « Dans l'accord de Bougival, il faut qu'un groupe du Congrès dépose une résolution, que cette résolution soit adoptée par 36 élus, et une fois que cette résolution est adoptée, un groupe de travail se met en place pour voir les modalités, notamment juridiques, financières, techniques, et ensuite, si ce travail est finalisé avec l'État, avec des représentants du Congrès, des autorités politiques et coutumières dans la Nouvelle-Calédonie, ce projet est soumis au peuple, par un référendum », détaille Jean-Pierre Djaiwé. « On a donc dit à la ministre qu'il faudrait préciser, si on n'arrive pas au niveau du Congrès à trouver cette majorité de trois cinquièmes, que l'État puisse l'organiser comme ce qui est prévu dans l'accord de Nouméa. »
Par ailleurs, en cas de transfert des quatre compétences régaliennes « restantes » à la Nouvelle-Calédonie, « pour nous, la rétrocession des dernières compétences équivaut à l'accession du pays à la pleine souveraineté. Et il faudrait que l'État dise par quel acte juridique l'État acte le fait que la Calédonie devienne un pays souverain. »
Anthony Tejero pour Les Nouvelles Calédoniennes























