Actuellement en visite en Nouvelle-Calédonie, le Président de la République, Emmanuel Macron, a accordé un entretien à notre partenaire Caledonia et en commun avec RBB et NC la1ere afin d’évoquer la situation actuelle du territoire, mais aussi son avenir, notamment sur les questions institutionnelles et économiques. Plusieurs annonces ont marqué cet échange, le Président de la République s’inscrivant notablement dans une volonté de construction commune, tournée vers le futur de l’archipel. Résumé des échanges.
Une volonté de consensus, d’échanges, de travail commun, et de construction, tourné vers l’avenir du territoire. C’est en résumé la position tenue et affirmée du président Macron lors de l’entretien accordé aux médias de Nouvelle-Calédonie.
En premier lieu, la situation institutionnelle et le résultat du référendum en 3 étapes prévu dans les accords de Nouméa, qui s’est conclu en décembre 2021. Une écrasante majorité pour le Non à l’indépendance, mais entachée par le boycott du décisif troisième et dernier scrutin par les indépendantistes, qui prônent la pleine souveraineté du territoire.
Un contexte difficile, mais les engagements pris ont été tenus démocratiquement, rappelle le président de la République : « Je pense qu’on a besoin de consensus pour avancer. J’ai tenu les engagements pris par nos prédécesseurs, collectivement, ceux des accords de Nouméa, les 3 référendums se sont tenus (…) et durant toute cette période, depuis les accords, nous avons consolidé une chose essentielle, qui est la paix. Maintenant, il nous faut bâtir l’avenir (…) ce qu’il faut, c’est construire le projet d’avenir de la Nouvelle-Calédonie à l’issue de ces 3 référendums ».
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La suite devra s’écrire par le dialogue, les échanges, et le consensus, avec toutes et tous, poursuit-il : «Je veux à la fois ouvrir des chemins d’avenir, mais je pense qu’il faut le faire de manière consensuel le, en engageant l’ensemble des forces politiques, les coutumiers, l’ensemble de la population, pour bâtir ce projet d’avenir à l’issue de ces 3 référendums. Je pense qu’il est essentiel que tout le monde se parle et c’est ce que je vais tâcher de faire durant ce déplacement (…) On sait que les visions ne sont pas les mêmes, est-ce qu’elles sont incompatibles ? Je ne crois pas (...) il y a un choix qui a été fait, qui s’est exprimé 3 fois. Donc on ne peut pas dire qu’il est insincère. Est-ce qu’il dit pour autant, il n’y a plus de question il n’y a plus rien, circulez ? Non. Il y a un travail de mémoire, de réconciliation, de vérité ».
Le référendum a été tenu conformément aux accords de Nouméa, et en ce sens, il s’agit de bâtir l’avenir, exprime Emmanuel Macron. La suite passera nécessairement par un changement et une réforme constitutionnelle. Le président annonce à l’occasion de l’entretien, en prendre l’engagement : « Il faudra de toute façon un changement de la constitution, et ce changement se tiendra. Et je prends ici l’engagement que le gouvernement, portera, sur la base du consensus qui sera fait, une réforme. Alors le degré et son ambition dépendent à la fois du calendrier et de ce sur quoi on sait se mettre d’accord, mais il y aura de toute façon pour permettre cette avancée, et peut être davantage, une réforme constitutionnelle. Elle portera sur la Nouvelle-Calédonie, je l’assume comme tel, et après avoir parlé avec la présidente de l’Assemblée nationale et le président du Sénat, je sais aussi qu’ils partagent cette volonté que ce sujet puisse avoir son cadre constitutionnel propre ».
La Nouvelle-Calédonie dans l’axe Indo-Pacifique
C’est ensuite le sujet de l’axe Indo-Pacifique, enjeu stratégique et géopolitique identifié des prochaines années, devenu un point névralgique des actions diplomatiques des grandes puissances, qu’aborde le Président. Dans cette partie, la Nouvelle-Calédonie, avec la France, aura un rôle déterminant à jouer, affirme Emmanuel Macron. Il évoque un calendrier de décision afin d’éviter de faire du sur-place face aux enjeux majeurs de ce secteur du globe, dans un contexte, qui plus est, de changement climatique particulièrement prégnant dans cette partie du globe, où la France est présente depuis de nombreuses décennies :
« Nous avons près d’un million et demi de compatriotes et environ 8.000 de nos militaires qui y sont déployés. Nous avons noué des partenariats historiques avec l’Inde, les Émirats Arabes Unis, l’Australie, le Japon ».
Évoquant nombreux exercices militaires tel que Pegase, le président rappelle que « La France n’avait pas eu une telle signature stratégique dans la région depuis bien longtemps (…) tout ça nous donne de la crédibilité, et à complètement changé aussi nos discussions avec l’Indonésie ou avec d’autres (...) donc oui, nos territoires ultramarins ont un rôle essentiel à jouer ».
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Enjeu géostratégique majeur, l’axe Indo-Pacifique peut aussi être le théâtre de tentatives de déstabilisations étrangères, notamment par le soutien aux mouvements indépendantistes. Un sujet sur lequel Emmanuel Macron affiche une certaine fermeté, et met en avant la France comme gage de stabilité : « Il y a des déstabilisations qui se font, par la voie de l’information, par des contacts qui sont pris par des puissances tierces. Moi, je dis simplement, regardez ce qu’il se passe ailleurs. Et quand des gens vous font des cadeaux mirifiques en vous expliquant qu’ils vous respectent et qu’ils aiment la culture d’indépendance que vous prônez et que ce sont des puissance impériales qui ont plutôt une action de prédation et qui ont mis d’autres gouvernements à genou à quelques encablures, il faut être bien naïf (…) L’inscription dans la France et dans la République, c’est une gage de stabilité, c’est un gage de respect, et c’est éviter d’être trop petit, dans un monde bousculé par de trop grandes puissances ».
Dans ce contexte, c’est une politique de l’échange, du partenariat, de la co-construction à l’échelle régionale que prône le président Macron, et ce, sur de nombreux domaines. Une ligne politique qui doit se faire régionalement, sur des sujets comme l’université et la recherche, qui sera mis en exergue et en pratique dans quelques jours, avec le déplacement prévu au Vanuatu et en Papouasie-Nouvelle-Guinée, qui se fera en compagnie du président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, Louis Mapou, et du président de la Polynésie française, Moetai Brotherson : « Il faut mettre des moyens en Nouvelle-Calédonie, être une puissance info-pacifique également scientifique, avec l’IRD, le Cirad, on va continuer de le faire et d’engager. On va le faire pour nos territoires, mais aussi en lien avec les autres pays de la région, c’est tout le sens de mon déplacement ensuite au Vanuatu puis en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Et je serai d’ailleurs accompagné du président Mapou et Brotherson. On le fera ensemble, ils m’accompagneront. Il y a à la fois du respect, mais il y a la puissance de la France, dans sa diversité. Et c’est ça la France, et beaucoup l’ont parfois publié ».
Une situation économique et industrielle difficile : «La France répondra présent, sous condition d’une vision commune»
Sur le plan économique et financier, la Nouvelle-Calédonie montre des faiblesses structurelles depuis plusieurs années, au point que le territoire soit considéré par certains observateurs comme proche d’une situation de la cessation de paiement. L’aide de l’État à de nombreuses fois été demandée, sur le plan économique comme industriel. Sur ces points, la France pourra répondre présent, mais pour cela, il s’agira d’élaborer un travail et des objectifs commun, prévient Emmanuel Macron : « Il y a le gouvernement, il y a les Provinces, il y a les communes, et il faut les distinguer. Ensuite, on ne peut pas rester durablement dans une situation où l’on demande plus de compétence, mais plus de rallonges. C’est bizarre (…) alors ça rentre dans le débat qu’on doit avoir sur l’avenir. Qui fait quoi, comment, comment on est aidé, et la République a toujours été là quand il a fallu aider ».
Un travail qui doit se faire sur ces mots : « Sincérité, amitié, responsabilité », affirme le président de la République, avant de poursuivre sur le sujet du Nickel : « La France a toujours cru en cette filière, et nous avons beaucoup investis ces dernières années face aux difficultés. Quand je regarde ces dernières années, des milliards d’euros ont été investis. J’ai demandé ce soir à ce qu’il y ait une réunion qui se tienne avec les élus, industriels, l’ensemble des parties prenantes pour que ce sujet soit abordé. On a des difficultés. Ces difficultés vont conduire encore à des investissements. Mais il faut qu’on bâtisse. Ce que je veux, dans le cadre du projet d’avenir, c’est qu’on ait une stratégie crédible sur le nickel ».
Et pour ce faire, c’est un rapport, demandé par l’exécutif, qui sera présenté à l’occasion de cet entretien, et qui servira de base de planification, en accord avec les acteurs du secteur minier: « J’ai demandé un rapport, il a été fait, il sera présenté ce soir. Sur cette base-là, en transparence, il faut bâtir une stratégie, et sur cette stratégie, on investira. Mais on investira sur quelque chose qui marche dans la durée, et quelque chose qui est aussi honnête et qui permet à la Nouvelle-Calédonie de se projeter dans la compétition internationale (…) et de réconcilier ce qui sont pour moi les 3 axes essentiels : la souveraineté, les emplois industriels, et le climat, et produire une énergie qui soit bas carbone ».
Damien CHAILLOT