D’après l’entourage du président de la République, ce dernier a proposé la reprise des discussions et négociations à Paris en vue d’un accord global sur l’avenir institutionnel de l’archipel, alors que le climat local se tend sur la réforme constitutionnelle visant à l’élargissement du corps électoral. Il veut au préalable le vote de cette réforme.
« À la veille de la présentation du projet de loi constitutionnelle portant modification du corps électoral à l'Assemblée nationale, le chef de l’État a tenu à faire savoir aux représentants de la Nouvelle-Calédonie qu’en cas d’adoption du texte, le congrès (de Versailles, ndlr) ne serait pas convoqué dans la foulée » a-t-on appris de l’entourage du président de la République. Le congrès devait être réuni entre fin juin et début juillet afin d’entériner cette réforme constitutionnelle.
« Réaffirmant sa volonté de privilégier le dialogue dans le cadre du chemin d'avenir qu'il avait appelé à bâtir à Nouméa en juillet dernier, le Président de la République a demandé à ce que l’ensemble des représentants soient invités à Paris pour une rencontre avec le gouvernement » ajoute cette même source. En d’autres termes, Paris propose la reprise du dialogue et des négociations en vue d’un accord institutionnel au-delà du seul corps électoral. Seule condition : l’adoption du texte constitutionnel visant à ouvrir le corps électoral, déjà adopté par le Sénat, ce lundi à l’Assemblée nationale.
L’annonce intervient dans un climat tendu en Nouvelle-Calédonie. L’archipel est en effet sous pression autour de l’ouverture du corps électoral à 25 000 personnes, natifs et résidents depuis plus de 10 ans. Depuis février, plusieurs manifestations ont rassemblé plusieurs dizaines de milliers de personnes à Nouméa, que ce soit du côté des non indépendantistes que du côté indépendantistes. Ces derniers ont organisé cette semaine plusieurs mobilisations dans le cadre de l’opération « Dix jours pour Kanaky ».
Pour l’Élysée, cette invitation à la négociation pour un nouvel accord est une marque d’apaisement, constatant par la même occasion que, malgré les cristallisations de part et d’autre de l’échiquier politique calédonien, certains acteurs calédoniens ont poursuivi le dialogue autour d’un accord global. L’idée serait pour Paris de laisser un espace qui permettrait le dialogue et l’adoption d’un nouvel accord, sans remettre en cause la réforme constitutionnelle visant au dégel du corps électoral, figé depuis 2007. Message est également envoyé aux oppositions parlementaires, de gauche notamment, qui ont vivement critiqué un « passage en force » du gouvernement.
Fin avril, la mission d’information parlementaire sur l’avenir de la Nouvelle-Calédonie appelait à la mise en place d'une « mission impartiale » en vue de parvenir à un « accord global » sur la situation en Nouvelle-Calédonie, face à « un risque d'embrasement [...] réel ». Les députés de la mission se sont dit « inquiets de la montée des tensions, de la radicalisation de certains devant les échéances à venir, dans le contexte d'une population armée et de plaies mal refermées ».
Déjà lors de l’examen de la réforme au Sénat, la majorité de droite avait amendé le texte du gouvernement, permettant de suspendre la tenue des élections provinciales jusqu’à 10 jours avant celles-ci, prévues en décembre prochain, en cas d’accord global sur l’avenir institutionnel de l’archipel, quand l’exécutif souhaitait l’acter au 1er juillet. Soutenu en commission par les groupes Renaissance, LR et RN, le projet de réforme constitutionnelle devrait sans surprise être adopté ce lundi et ce, dans les mêmes termes qu’au Sénat.