Les députés ont donné mardi en commission leur feu vert à une réforme constitutionnelle sensible qui élargit le corps électoral lors des élections provinciales en Nouvelle-Calédonie, avant l'arrivée du texte dans l'hémicycle les 13 et 14 mai.
En commission, le projet de loi constitutionnel a été soutenu par le camp présidentiel, la droite et l'extrême droite, mais combattu par la gauche. Il sera débattu en séance lundi prochain et soumis à un vote solennel le lendemain. Après le vote favorable du Sénat, son adoption dans les mêmes termes ouvrirait la voie à une réunion du Parlement en Congrès à Versailles pour réformer la Constitution, peut-être fin juin ou début juillet.
Assez technique, cette révision constitutionnelle est aussi décisive que contestée et exacerbe, à 17 000 km de Paris, les tensions entre non indépendantistes et indépendantistes, avec d'importantes manifestations dans l'archipel. La réforme vise à ouvrir les élections provinciales aux résidents installés depuis au moins dix ans et aux natifs, soit environ 25 000 personnes. Prévu à ce stade d'ici au 15 décembre, ce scrutin est essentiel sur l'archipel où les trois provinces détiennent une grande partie des compétences.
Établi en 1998 par l'accord de Nouméa, le corps électoral est en effet gelé, ce qui a pour conséquence, 25 ans plus tard, de priver de droit de vote près d'un électeur sur cinq. Pour le ministre de l'Intérieur et des Outre-mer Gérald Darmanin, ce gel « n'est plus conforme aux principes de la démocratie ». Les indépendantistes critiquent à l'inverse un dégel qui risque de « minoriser encore plus le peuple autochtone kanak ».
Au Sénat, un mécanisme a été ajouté pour permettre la suspension de cette réforme constitutionnelle si un accord local survient jusqu'à 10 jours avant les prochaines élections provinciales, alors que le gouvernement fixait un « ultimatum » au 1er juillet.
En commission à l'Assemblée, les députés de gauche ont présenté une série d'amendements pour s'opposer à cette révision constitutionnelle en l'état. « En l'absence de négociation et de consensus, les conditions ne sont pas réunies pour modifier le corps électoral », estime ainsi le socialiste Arthur Delaporte. « N'allumons pas un incendie que personne ne saurait éteindre », insiste l'Insoumis Bastien Lachaud.
« Notre main est toujours tendue pour une discussion trilatérale » avec les acteurs calédoniens, mais « la procrastination ne fait pas une bonne politique », répond Gérald Darmanin.