En déplacement en Nouvelle-Calédonie, Naïma Moutchou à « l’écoute avant de répondre » aux attentes de l’archipel

En déplacement en Nouvelle-Calédonie, Naïma Moutchou à « l’écoute avant de répondre » aux attentes de l’archipel

La ministre des Outre-mer a entamé, ce lundi, son premier déplacement en Nouvelle-Calédonie. Après des hommages militaires et une commémoration dans la matinée, elle a rencontré des responsables politiques et les acteurs économiques cet après-midi. Une première journée suivie en direct par nos partenaires des Nouvelles calédoniennes.

Elle est très attendue par les responsables politiques calédoniens. D’abord d’un point de vue politique. Alors que les élections provinciales ont été reportées à juin 2026, les soutiens de l’accord de Bougival signé le 12 juillet veulent désormais l’inscrire dans la Constitution. Sébastien Lecornu a promis un examen de la réforme constitutionnelle par le Parlement d’ici la fin de l’année. 

Un projet que ne partage pas le FLNKS, toujours opposé à l’accord qu’il a rejeté un mois après sa signature. Naïma Moutchou a toutefois affirmé qu’elle n’entendait pas faire « sans le FLNKS ». Le mouvement de libération nationale a indiqué être prêt à discuter avec la ministre, dans le cadre d’un « dialogue sincère » et d’une « méthode de discussion et de négociation claire ». Une délégation du Front devrait la rencontrer ce mardi.

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Les élus attendent également de Naïma Moutchou des réponses à la crise économique et sociale traversée par la Nouvelle-Calédonie. Sans aide significative de l’État, la construction d’un budget 2026 semble en effet impossible, alors que les pertes de recettes fiscales pour l’année prochaine sont estimées à 60 milliards de francs par rapport à 2023. Le reliquat du prêt garanti par l’État, à peine 25 milliards pour 2026 et 2027, sera très insuffisant.

Une partie des responsables politiques souhaite également renégocier les conditions de cette aide, estimant que ce prêt d’un montant total de 120 milliards a considérablement endetté le territoire. Arrivée lundi matin, Naïma Moutchou a débuté sa visite par la traditionnelle cérémonie d'honneurs militaires sur la place Bir Hakeim à Nouméa.

Par la suite, la ministre s’est rendue au Sénat coutumier, « avec beaucoup de respect et de reconnaissance », a-t-elle assuré. « C'est avec beaucoup d'humilité que je vais emprunter vos chemins coutumiers cette semaine » a-t-elle ajouté, consciente que l’institution, pas non plus favorable à Bougival, attend « un engagement fort de l'État ». 

Ludovic Boula, président du Sénat coutumier, demande à la ministre « d'aller au-delà de Bougival et de maintenir l'irréversibilité du processus de décolonisation ». « Un accord sans consensus et sans véritable projet de société n'apporterait aucune stabilité à court et long terme ». Naïma Moutchou a profité de ce premier rendez-vous pour rappeler sa « méthode » et son « état d’esprit » : à « l’écoute avant de répondre ». 

Après un dépôt de gerbes à la mi-journée sur la statue de l’historique poignée de main entre Jacques Lafleur et Jean-Marie Tjibaou, la ministre s’est entretenue avec les chef(fe)s des différentes institutions : Gouvernement, Congrès, province Sud, ville de Nouméa. « Il y a une urgence économique, financière et budgétaire » a notamment rappelé le président du gouvernement Alcide Ponga. 

Naïma Moutchou n'a, de son côté, rien annoncé quant à l'aide de l'État pour la Nouvelle-Calédonie en 2026, alors que le pays devrait être confronté à une perte de recettes fiscales d'environ 60 milliards par rapport à 2023. « Le projet de loi de finances est débattu en Métropole, je crois que le sujet de la Nouvelle-Calédonie et des outre-mer sera abordé le 18 novembre. Nous, on lui donne des pistes de réflexion. Ensuite, les députés trancheront. »

De son côté, le gouvernement calédonien continue de s'appuyer sur une estimation du besoin global pour l'année prochaine, envoyée au ministère des Outre-mer. « Le budget 2026 est risqué si on ne trouve pas des solutions pour combler le déficit issu de l'absence de reprise économique et d'une situation politique qui peine à avancer. » 

Après le gouvernement collégial calédonien, la ministre s’est entretenue avec la présidente du Congrès de l’archipel, Veylma Falaeo, notamment pour aborder les « mesures à prévoir » pour la Nouvelle-Calédonie dans le cadre du projet de loi de finances 2026. « La ministre a bien conscience que notre situation, notamment budgétaire, est catastrophique et elle compte bien nous aider », a assuré la cheffe du Congrès, qui a également évoqué le projet de loi constitutionnelle, qui pourrait être examiné à l'Assemblée nationale et au Sénat avant la fin de l'année. 

« J'ai souhaité savoir si le Congrès sera consulté sur ce projet de loi constitutionnelle et la ministre n'y est pas fermée », ajoute Veylma Falaeo, qui a également profité de cet échange pour présenter à Naïma Moutchou, les « projets phares » qu'elle porte au sein de l'hémicycle : l'évaluation des politiques publiques et la démocratie participative. 

Autre échange, autre présidente : Naïma Moutchou a poursuivi ses entretiens avec Sonia Backès, présidente de la province Sud, également cheffe de file de la coalition Les Loyalistes. « On a rappelé notre ouverture à la discussion avec le FLNKS », a déclaré Sonia Backès à la sortie de la rencontre, « en indiquant que le camp non-indépendantiste a fait beaucoup de concessions » et qu'il a défendu l'accord de Bougival auprès de sa base. 

Ce sujet, il en sera à nouveau question ce mardi 11 novembre, journée consacrée aux bilatérales, a indiqué Sonia Backès, alors que la ministre des Outre-mer doit également recevoir au haut-commissariat le FLNKS dès le matin. L'autre point au cœur de la rencontre concerne le volet économique, sur lequel la ministre est particulièrement attendue par les élus calédoniens, alors que la situation financière de la Nouvelle-Calédonie est désastreuse. « Il y a quand même globalement un consensus de l'ensemble des forces politiques pour dire qu'on est maltraité par Bercy. »

Ce qu'il faut, insiste Sonia Backès, « c'est redonner du travail aux Calédoniens, ce qui passe par de l'investissement et des aides aux entreprises ». La présidente a également demandé des « choses très concrètes pour la province Sud », notamment concernant la mise en œuvre d'un dispositif en lien avec la BPI (Banque publique d'investissement) qui permettrait de faire des avances remboursables aux entreprises.

« Il y a des sociétés qui ont besoin d'un tout petit peu de trésorerie pour redémarrer. Or, les banques sont frileuses à accorder des lignes de trésorerie, des découverts. Ce système d'avance remboursable où la province mettrait 1 et la BPI 3,4, permettrait aux entreprises de retrouver un peu d'air », a ajouté Sonia Backès. 

Autre élément très important, avance Sonia Backès, mettre en place une politique de grands travaux, notamment, concernant la province Sud, le viaduc du Mont-Dore, la traversée Koutio-Ducos, ou encore la rénovation d'un certain nombre de collèges. « On a pas mal de projets qui, s'ils étaient soutenus par l'État, redonneraient du travail aux Calédoniens rapidement. » La présidente attend des réponses d'ici la fin de la semaine, la ministre devant quitter le territoire vendredi soir. « Naïma Moutchou m'a dit qu'elle avait quelques annonces à faire. » 

La maire de Nouméa Sonia Lagarde a clos le bal des entretiens entre les chef(e)s d'institution et Naïma Moutchou, ce lundi en fin d'après-midi. Une ministre que la première magistrate de la capitale estime « être très à l'écoute » et « animée par un souci de bien-faire ».

Alors que les finances des communes du pays sont exsangues, Sonia Lagarde sait que « ce n'est pas le moment d'aller réclamer (de l'argent) à la France, qui est aussi dans une situation extrêmement compliquée ». Pour autant, la maire a fait part de son souhait de « revoir » certains dispositifs sur le fonctionnement du financement des communes, dont « l'effet cliquet » qui leur permettrait de revoir à la hausse les investissements qui « servent l'intérêt général ».

Prochain rendez-vous vendredi 14 novembre, pour une réunion entre l'ensemble des maires calédoniens et la ministre des Outre-mer. « Un moment privilégié » qui devrait permettre « d'avancer un peu plus concrètement » sur les problèmes rencontrés par ces collectivités, espère Sonia Lagarde. 

Les Nouvelles Calédoniennes