Reconnu pour la richesse et l’originalité de son patrimoine naturel, l’archipel néo-calédonien héberge une biodiversité remarquable confrontée à de nombreuses menaces. Au terme d’un état des lieux conduit sur près de 10 ans, 69 espèces de lézards et 643 espèces de plantes se révèlent menacées de disparition. Pour la première fois, des espèces de Nouvelle-Calédonie intègrent la Liste rouge des espèces menacées en France, précise l'UICN dans un communiqué.
Sur 104 reptiles et 1 624 plantes analysés, 69 espèces de lézards (66 %) et 643 espèces de la flore (40 %) sont menacées et pourraient disparaître si les mesures de conservation et de réduction des menaces n’étaient pas renforcées. Tel est le constat dressé par un état des lieux mené par l'association Endemia durant 10 ans. Les résultats issus de ces observations permettent d'intégrer cette faune et cette flore calédonienne dans la Liste rouge des espèces menacées en France, coordonnée par le Comité français de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), l’Office français de la biodiversité (OFB) et le Muséum national d’Histoire naturelle (MNHN).
Des pressions multiples
Plusieurs pressions relevés viennent menacer cette biodiversité de l'archipel. D'abord, les feux de brousse, d'origine humaine ou accentués par les sécheresses, détruisent les habitats naturels de ces espèces. « L’impact de ces incendies conduit des arbustes de la forêt sèche, comme Codia xerophila, à être classés "En danger critique", ainsi que des lézards comme le Scinque Léopard de Nouvelle-Calédonie, en catégorie "Vulnérable". Plus largement, la récurrence des feux entraîne une simplification des écosystèmes et la régression des surfaces forestières, affectant de nombreuses autres espèces».
Autre pression sur cet écosystème naturel, les activités minières entraînent le défrichement de milieux naturels pour l'accès aux ressources en minerais, en particulier le nickel. « Ces activités affectent directement les espèces inféodées aux milieux exploités, provoquant la destruction des plantes, des stocks de graines du sol et des habitats naturels. Parmi les plus touchées, on trouve des espèces comme l’arbuste aux fleurs en clochettes rouges Thiollierea lenormandii et le gecko arboricole nommé Bavayia de Goro, tous deux endémiques du territoire et classés "En danger".»
La prédation et la compétition des espèces exotiques envahissantes constituent la troisième menace. « Les cerfs et les cochons introduits exercent en particulier une forte pression en consommant de nombreux végétaux et en dégradant profondément les milieux. La petite fougère Ptisana rolandiprincipis est ainsi proche de l'extinction et classée "En danger critique". La Fourmi électrique affecte quant à elle la quasi-totalité des espèces de lézards indigènes. A la fois prédatrice directe et compétitrice pour les ressources alimentaires, cette fourmi invasive contribue par exemple au
classement du Diérogecko du Sommet Poum en catégorie "En danger critique". Plusieurs espèces de lézards sont aussi les proies directes des chats harets et des rats noirs, comme le Bavayia de Goro classé "En danger".»
A noter que certaines espèces de lézards charismatiques subissent « une pression de collecte de plus en plus forte exercée par des braconniers ou des particuliers intéressés par ces "nouveaux animaux de compagnie" (NAC). Le Mniarogecko jâlu, un grand gecko endémique, fait partie de ces espèces capturées et revendues illégalement au niveau international, alors qu’il est classé "En danger"».
Enjeu de protection
Avec des taux d'endémisme parmi les plus élevés au monde, les lézards et la flore de Nouvelle-Calédonie constituent des groupes particulièrement originaux, enrichis par la découverte régulière de nouvelles espèces. Un bon nombre de ces dernières sont même "micro-endémiques", c’est-à-dire qu’elles ne vivent que sur une toute petite partie du territoire et présentent donc une forte fragilité face aux pressions. «Même si certaines espèces bénéficient déjà de mesures de préservation ou de programmes de conservation, les résultats de l’état des lieux montrent que les besoins de protection sont encore grands. Afin de ne pas voir disparaître à l’avenir des espèces remarquables et souvent uniques au monde, le bilan souligne l'importance de mettre en place des actions de conservation ciblées, de renforcer la préservation des milieux naturels et d’accentuer la lutte contre les pressions. Les résultats de la Liste rouge contribuent dès à présent à identifier les priorités et à orienter les stratégies d’action pour assurer la protection de cette biodiversité exceptionnelle.», précise le communiqué.