Parmi les participants à la dernière édition de Viva Technology, qui s’est tenue du 11 au 14 juin à Paris Expo Porte de Versailles, figurait PeersON – Innovation 4 the Planet. Cette ONG calédonienne, présidée par Philippe Farraci, a participé à l’événement aux côtés d’autres acteurs ultramarins de l’innovation, grâce au soutien du Village Pacific Tech, présent pour la première fois à ce grand rendez-vous international des startups et des technologies. Sur place, Philippe Farraci a levé le voile sur une innovation ambitieuse : une technologie de tonte robotisée autonome, pensée pour freiner la propagation des incendies dans les zones forestières et préserver les puits de carbone. Objectif affiché : sécuriser des milliers d’hectares en Nouvelle-Calédonie, en Australie, et à terme dans d’autres régions du monde.
L’idée de PeersON est née après une crise environnementale majeure : les incendies dévastateurs en Australie qui se sont produits entre 2019 et 2020. « La situation était alarmante. À plus de 2 000 kilomètres des foyers d’incendie, les fumées des feux australiens ont atteint Nouméa, où nous avons constaté l’ampleur de la menace pour notre territoire. Nous avons réalisé que notre approche devait évoluer : il ne suffisait pas de réagir après coup, il fallait prendre des mesures préventives », explique Philippe Farraci, président et cofondateur de la structure.
Ce constat a conduit l’organisation à collaborer avec Vitirover, fabricant français de robots tondeurs professionnels autonomes et solaires, afin d’adapter cette technologie aux spécificités des milieux naturels sensibles. « L’objectif est simple : éliminer le combustible avant qu’il ne devienne un risque. Nous utilisons des robots autonomes capables de tondre de grandes surfaces, dans des environnements qui sont souvent difficiles d’accès et dangereux pour les hommes. Le robot travaille jusqu’à 16 heures par jour, il est autonome et ne génère aucune pollution sonore. Ce modèle permet d’intervenir efficacement, sans perturber l’équilibre des écosystèmes. »
VivaTech, un tremplin d’accélération
À VivaTech 2025, le président de PeersON - Innovation 4 the Planet n’est pas venu seulement pour exposer, mais également pour officialiser ce partenariat stratégique avec Vitirover. La signature doit amener la création d’une entreprise industrielle en Nouvelle-Calédonie, et une mission d’exportation vers le Pacifique avec un financement de 500 000 euros. « C’est un signal très fort pour la Nouvelle-Calédonie. Ce partenariat montre que des investisseurs croient en notre modèle et en notre capacité à structurer une économie verte et durable ici, dans le Pacifique », se félicite Philippe Farraci.
L’ONG espère qu’avec ce soutien, elle pourra mettre en place une usine de production des robots, ainsi qu’un programme d’exportation pour soutenir la transition écologique dans d’autres régions. « Ce partenariat est la première étape pour ancrer durablement la Nouvelle-Calédonie comme hub technologique et environnemental dans la région Pacifique », affirme-t-il.
L’ONG PeersON, qui fait partie de la toute première délégation groupée du Pacifique à participer à VivaTech dans le cadre du "Village Pacific Tech", se félicite des retombées concrètes de ce déplacement. Le pavillon, fruit d’une coopération entre plusieurs entités, a en effet réuni 15 projets innovants issus de 11 territoires de la région. « C’est la première fois que nos territoires se réunissent pour montrer au monde ce qu’ils peuvent apporter en matière d’innovation. Pour nous, c’est une reconnaissance, mais aussi un levier pour faire entendre la voix des acteurs insulaires face aux défis globaux », souligne Philippe Farraci.
Se déployer partout où il y a des besoins
Le projet de PeersON - Innovation 4 the Planet ne se limite pas à la Nouvelle-Calédonie. L’objectif est ambitieux : sécuriser 10 000 hectares de forêts en Nouvelle-Calédonie, mais aussi 100 000 hectares en Australie, et potentiellement d’autres régions du Pacifique Sud et de l’Amazonie. L’ONG s’est d’ailleurs rapprochée des acteurs en Guyane pour explorer la possibilité de déployer sa technologie dans le bassin amazonien.
« Nous avons déjà amorcé des discussions avec des partenaires en Guyane, car la protection des forêts amazoniennes est essentielle dans la lutte contre le changement climatique. Nous voulons exporter cette technologie pour qu’elle soit utilisée là où elle peut avoir un réel impact. » Le programme prévoit également un financement par le biais de subventions internationales, notamment en Europe, afin de soutenir l’adoption de cette technologie à l’échelle mondiale.
L’ONG espère lever des fonds via des mécénats internationaux pour étendre son action. Pour le cofondateur de la structure, le programme a été pensé comme un modèle économique innovant qui combine des solutions écologiques avec une gestion intelligente des coûts. En offrant aux agriculteurs, producteurs d’énergie et collectivités la possibilité d’utiliser gratuitement ces robots, l’ONG mise sur une logique circulaire : les robots sont utilisés sur des sites agricoles ou industriels pour réduire les coûts d’entretien, et les opérateurs doivent ensuite les mettre à disposition des ONG et associations locales pour la gestion des risques incendie. « Nous mettons ces robots à disposition gratuitement, mais nous attendons des entreprises qu’elles jouent le jeu en les utilisant pour des missions de prévention incendie dans leur propre communauté. Ce modèle permet de concilier la rentabilité économique avec l’impact social et environnemental. »
En 2026, l’ONG espère changer de statut et devenir une fondation. Objectif : être en capacité de lever entre 15 et 20 millions d’euros pour financer le déploiement massif de leur solution. « Ce statut nous permettrait de porter directement les 30 % de coûts non couverts par les subventions ou les opérateurs. C’est la condition pour répondre rapidement aux besoins des territoires fragiles. On pourrait ainsi déployer jusqu’à 100 000 robots par an. »
Abby Said Adinani