Cette année, le mondial de rugby est exceptionnel à plus d’un titre. Il se déroule en France (cocorico !) et l’équipe nationale compte dans ses rangs 4 joueurs originaires des îles de Wallis-et-Futuna. Et ça, c’est une performance quand on sait que l'archipel regroupe 11 562 habitants au dernier recensement de 2018.
Pourtant cela n’est pas si étonnant. Car l’archipel a une longue tradition de jeux et de sports traditionnels. Ces jeux, souvent pratiqués lors de cérémonies et de festivités, impliquent généralement une participation collective. Tout l’archipel est alors concerné.
A Wallis, les événements sportifs sont l’occasion de mettre à l’honneur la culture et les traditions locales.
Wallis, une terre de tradition
L’été dernier, lors de la Manatai Cup, les courses de pirogues traditionnelles appelées « fakatete » en wallisien et « kumete » en futunien, ont vu concourir quelque 52 participants. Et pour célébrer cet événement emblématique de la région, les compétiteurs extérieurs ont été présentés dès leur arrivée aux rois Takumasiva au Palais Royal de Sagato Soane et Ma’utamakia. Une journée était dédiée à la cérémonie du kava.
Dans un autre domaine, le lancer de javelot « pa ulutoa » se pratique également selon un rituel ancestral. L’équipement est taillé dans du bois de « kaho » avec un embout pointu extrait de l’arbre de bourao recouvert d’une potion magique légèrement huileuse, préparée par les anciens. Religion, coutume et croyance sont étroitement liés à Wallis et Futuna.
Mais le sport emblématique de l’archipel est sans conteste le « Kilikiti », le cricket wallisien.
Les origines, du cricket au Kilikiti
Selon les témoignages des ancêtres, le Kilikiti aurait été pratiqué pour la première fois dans le village de Vailala par des Tongiens venus habiter au nord de Hihifo. L’Angleterre berceau du cricket a en effet largement exporté ce sport dans les colonies britanniques du Pacifique au XIXe siècle.
Au fil des siècles, les wallisiens ont modifié les règles qui aujourd’hui diffèrent quelque peu du cricket traditionnel. Par exemple, alors que le cricket compte communément deux wickets (ensemble de trois piquets de bois défendus par les batteurs), le Kilikiti n’en a qu’un seul. Et le règlement, qui fixe les distances entre des piquets, les techniques de lancer, le nombre de joueurs et les limites du terrain de jeu, est décidé la veille du match par les capitaines et les juges.
Les rituels d’avant-match
Les cérémonies rituelles d'avant-match sont un aspect important de la culture locale. La veille d’une partie, chaque équipe invoque les esprits protecteurs et leurs forces. Cette cérémonie a une signification symbolique. Outre le fait qu’elle vise à renforcer les liens communautaires, à favoriser la paix et l'harmonie, elle est un moyen d’honorer les ancêtres dans une atmosphère de respect mutuel.
L'hommage continue. Plusieurs groupes sont ensuite désignés parmi les gens du village pour se rendre chez les « Aliki », les chefs coutumiers, et leur offrir le kava afin de recueillir leurs conseils et leur bénédiction pour la compétition. Ce rassemblement se déroule généralement au mitan de la nuit. Les anciens prodiguent alors des consignes aux jeunes joueurs dans l’espoir de remporter la victoire.
Tous ces préparatifs d’avant match relèvent de la tradition et de l’irrationnel. Une connexion de l’au-delà protège les joueurs et l’organisation des jeux.
Le jour J, avant de se lancer dans la compétition, les équipes effectuent un tour de terrain. L’occasion de se présenter au public et de saluer les « Aliki » en prononçant un discours solennel. Un mélange de sons parfois confus monte des tribunes et marque le début du tournoi. Sifflets, tambours, conques, pieds frappés au sol. Tout est bon pour rythmer la cérémonie d’ouverture. Le match peut alors commencer.
Ces tournois sportifs sont surtout pratiqués lors de grandes fêtes comme la fête nationale du 14 juillet et la fête du territoire du 29 juillet. C’est l’occasion pour chaque wallisien et futunien de célébrer sa culture, de prolonger la tradition autour des générations.
EG