Le Réseau Interassociatif de Mayotte lance un observatoire sur la non scolarisation, un phénomène massif aux conséquences alarmantes pour le territoire. Saturation du système, enfants invisibles, manque d’infrastructures : les obstacles sont nombreux. La question centrale reste entière : comment scolariser tous les enfants ? Précisions avec notre partenaire France-Mayotte Matin.
Une conférence organisée par le Réseau Interassociatif de Mayotte (RIAM) s’est tenue afin de présenter la création d’un observatoire consacré à la non scolarisation des enfants sur le territoire. Le projet est porté par quatre associations fondatrices : la Croix-Rouge, Mlezi Maore, les Apprentis d’Auteuil et l’association Village d’Eva. Il bénéficie du soutien de l’ASE, de la MDPH, de l’ODP, du rectorat et de l’association des maires de Mayotte.
Deux méthodes d’évaluation ont été employées : par soustraction, estimant 9 373 enfants non scolarisés ; et par addition, totalisant 5 379 enfants. Le recteur, pour sa part, a expliqué qu’il y a un écart entre les données de naissance et le nombre d’enfants effectivement inscrits, citant 10 000 naissances en 2020 contre 7 000 enfants inscrits à l’école en 2023. Il souligne donc l’importance de disposer de données pour expliquer cet écart. Sachant qu’actuellement les communes font en sorte de scolariser tous les enfants inscrits, selon le recteur, il faut déterminer pourquoi certains ne le sont pas.
C’est dans ce contexte que s’inscrit l’observatoire. Deux volets d’analyse sont prévus : d’une part, l’activité quotidienne, l’âge, le sexe, la résidence et la situation des enfants non scolarisés ; d’autre part, leur parcours de vie, leur origine, leur environne- ment familial et les freins qui empêchent la scolarisation.
Avec l’objectif d’inclure aussi les jeunes de 16 à 18 ans, soumis à l’obligation de formation. La création d’un comité stratégique incluant le rectorat et les services de l’État permettra de fournir des données concrètes pour appuyer le travail de terrain. Avec une population recensée entre 300 000 et 340 000 habitants en 2023, les chercheurs estiment qu’environ 36 % des enfants ne sont pas scolarisés. Une hypothèse qui, rapportée à une projection de 400 000 habitants, laisse envisager un déficit massif en matière d’accès à l’éducation.
Ces chiffres révèlent une impasse inquiétante : intégrer des milliers d’enfants dans un système déjà saturé compromettrait davantage la qualité de l’enseignement pour tous. À défaut, la société devra faire face à une génération supplémentaire d’adultes sans formation, dans un territoire déjà freiné par l’illettrisme de sa population.
Par France-Mayotte Matin