SÉRIE. Sécurité maritime (2/3) : La Réunion, Mayotte et les TAAF, trois zones d’importance stratégique

©Marine Nationale

SÉRIE. Sécurité maritime (2/3) : La Réunion, Mayotte et les TAAF, trois zones d’importance stratégique

Outremers 360 poursuit sa série en trois volets consacrée à la sécurité maritime en Outre-mer dans les bassins Atlantique, Indien et Pacifique, d’après les données du Maritime Information Cooperation and Awareness Center (MICA Center, Centre de coopération et de sensibilisation à l'information maritime), qui vient de publier son rapport pour l’année 2024. Dans cette seconde partie, nous nous focalisons sur la situation à La Réunion, Mayotte et dans les Terres Australes et Antarctiques Françaises (TAAF), où la souveraineté de la France dans cette région maritime revêt une importance stratégique.

La Zone Maritime Sud de l’océan Indien (ZMSOI) est notamment marquée par deux mutations essentielles : la densité du trafic maritime engendrée par le détournement des flux via le cap de Bonne-Espérance et les enjeux de sauvegarde des territoires français situés en océan Indien. « Le canal du Mozambique et La Réunion se situent au cœur d’un axe vital économique et commercial dont l’évolution aujourd’hui est fortement marquée par la crise en mer Rouge et la diminution du trafic maritime dans le canal de Suez et le détroit de Bab-El-Mandeb. Ce ‘déroutement du trafic commercial’ se traduit par une multiplication quasiment par deux du nombre de navires transitant dans les ZEE (zones économiques exclusives, ndlr) françaises de la région (île de La Réunion, canal du Mozambique et îles Eparses) », souligne le MICA Center.

« Dans un contexte régional caractérisé par des changements profonds, des périodes d’instabilité récurrente, une forte contestation et une augmentation notable de l’influence des grandes puissances régionales, la préservation des droits et intérêts français dans les espaces maritimes adjacents à La Réunion, Mayotte et dans les Terres australes et antarctiques françaises est cruciale », poursuit le rapport. Dans cette perspective, l’action de l’État en mer représente un cadre essentiel pour affirmer la souveraineté de Paris dans cette zone stratégique. Elle garantit la sécurité, surveille les activités maritimes et favorise les intérêts économiques de la France, tout en contribuant à la stabilité régionale.

Mais de nombreux défis demeurent. La lutte contre les migrations clandestines par voie maritime des Comores vers Mayotte constitue un enjeu majeur de la zone, même si les arrivées de migrants semblent se stabiliser depuis l’année dernière. Par contre, « le flux de migrants en provenance d’Afrique continentale est quant à lui en forte augmentation et reste un facteur de déstabilisation. De nouvelles filières d’immigration illégale se développent notamment en provenance deTanzanie et de Madagascar. (…) L’année 2024 n’a pas connu d’immigration en provenance du Sri Lanka à destination de la Réunion, mais le risque de reprise du flux ne peut pas être écarté », constate le MICA Center.

À lire ► SÉRIE. Sécurité maritime (1/3) : menaces sur les Antilles-Guyane

« La lutte contre les trafics de stupéfiants demeure un axe d’effort permanent dans la région, avec notamment une augmentation très importante des saisies, en 2023, dans la zone sud de l’océan Indien », relève également le rapport. L’année 2024 reste similaire en termes de saisies, comme celle de 1,6 tonne de méthamphétamines  au nord du canal du Mozambique. La reconfiguration des flux s’inscrit vers des routes de plus en plus au Sud. Ainsi, un deuxième trafic en direction des pays riverains du sud de l’océan Indien a été constaté, avec une saisie de 200 kg au large de la Réunion, entre autres. Dans ce contexte, les efforts déployés par l’administration française s’inscrivent dans un cadre de coopération régionale et internationale avec ses alliés, notamment de la mission européenne EUNAVFOR ATALANTA (Opération militaire de l’Union européenne visant à contribuer à la sécurité maritime dans l’ouest de l’océan Indien et la Mer Rouge, ndlr), ainsi qu’avec les pays de la Commission de l’océan Indien.

La pêche illégale, non déclarée et non réglementée représente aussi un gros problème pour les autorités, surtout lorsque l’on sait que la surface cumulée de la ZEE française en zone sud de l’océan Indien est équivalente à la surface de la mer Méditerranée. « La préservation des ressources marines et la lutte contre la pêche illicite sont des enjeux cruciaux, dans leurs implications environnementales, économiques mais aussi de souveraineté. La surpêche et la pêche illégale menacent non seulement ces ressources vitales, mais elles ont également un impact négatif sur l’équilibre écologique des mers et des océans », insiste le MICA Center.

Si les ZEE des Terres Australes et Antarctiques Françaises font l’objet d’une surveillance accrue, la situation des îles Éparses demeure une priorité en raison des incursions de pêcheurs artisanaux de la région. Pour lutter contre la pêche illégale, la France déploie des navires militaires dans la zone, constituant ainsi une première ligne de défense. Par ailleurs, les contrôles ont été renforcés, entraînant de nombreuses saisies de matériel et de produits halieutiques. Ces actions sont menées en collaboration avec le Centre national de surveillance des pêches (CNSP) d’Étel, la Direction de l’environnement, de l’aménagement, du logement et de la mer (DEALM) de Mayotte et la Direction de la mer Sud de l’océan Indien (DMSOI) à La Réunion.

PM