Outremers 360 entame aujourd’hui une série en trois volets consacrée à la sécurité maritime en Outre-mer dans les bassins Atlantique, Indien et Pacifique, d’après les données du Maritime Information Cooperation and Awareness Center (MICA Center, Centre de coopération et de sensibilisation à l'information maritime), qui vient de publier son rapport pour l’année 2024. Dans cette première partie, nous nous intéressons à la situation aux Antilles-Guyane, marquée par le narcotrafic, le brigandage et la pêche illégale, entre autres.
L’arc caribéen est essentiellement affecté par trois menaces avec le brigandage, le narcotrafic et la pêche illégale, non déclarée et non réglementée (INN). Selon le MICA Center, la piraterie et le brigandage sont demeurés à des niveaux élevés ces cinq dernières années et se concentrent principalement sur l’arc caribéen et la baie de Campêche (située au Mexique, face caraïbe, ndlr) constituant 36% des actes recensés au niveau mondial.
Ces deux zones sont sous tension permanente. « Plus précisément, la majorité des incidents se situe dans les Petites Antilles (des Îles Vierges britanniques et des Etats-Unis jusqu’à Trinidad et Tobago). Les îles les plus ciblées cette année étant Saint-Martin/Sint-Maarten (Simpson Bay), les Îles Vierges britanniques (île Jost Van Dyke), la Martinique (Cul de sac - Le Marin et Sainte-Anne) et Grenade (Woburn Bay) », détaille le rapport.
L’arc caribéen, zone d’interface de l’Amérique du Nord et de l’Amérique du Sud, porte d’entrée vers l’océan Pacifique via le canal de Panama et voie d’accès vers l’Atlantique, demeure un espace caractérisé par de nombreux flux licites et illicites. « Située à proximité immédiate des zones de production et d’exportation de cocaïne (Pérou, Bolivie, Colombie, Venezuela), la mer des Caraïbes constitue une zone particulièrement active en matière de trafic de stupéfiants. Elle sert également de zone d’export à destination de l’Amérique du Nord et de l’Europe ».
La lutte contre les trafics illicites par voie maritime constitue un enjeu majeur de coopération entre les États de la zone caraïbe. Le partage de renseignements joue un rôle essentiel en guidant l’intervention des moyens aérien et maritime, contribuant ainsi à l’efficacité des actions engagées. En complément des efforts déployés par les États riverains, des moyens aéromaritimes américain, français, néerlandais et parfois britanniques sont mobilisés tout au long de l’année afin d’intercepter les trafiquants en haute mer. « À titre d’illustration, les Forces armées françaises aux Antilles ont intercepté, cette année en haute-mer, plus de 28 tonnes de cocaïne », souligne le MICA Center.
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En Guyane, le niveau de violence observé dans ses eaux demeure relativement faible. Reste cependant une grande diversité d’activités illicites. Parmi elles, « les principales sont la pêche INN, le trafic de stupéfiants et les activités illicites en soutien des filières d’orpaillage. A noter qu’aucune action de brigandage ou de piraterie n’a été constatée », relève le Centre. La lutte contre la pêche INN dans les eaux guyanaises reste un élément crucial de mobilisation des moyens de la Marine nationale stationnée dans le territoire et de toutes les administrations concourant à la réponse de l’action de l’État en mer, avec notamment l’implication du parquet de Cayenne dans le cadre du traitement judiciaire.
« La pêche INN est le fait de navires en provenance du Brésil, du Suriname, du Guyana et du Venezuela. Le niveau de violence des équipages de ces bâtiments de pêche, et tout spécifiquement ceux en provenance du Brésil, pouvait être très élevé dans un passé proche. Ces derniers n’hésitent pas à utiliser des armes (tirs, jets de bouteilles de gaz, de planches etc.) à l’encontre des forces de police en mer. Si la tendance est à l’apaisement, il reste toujours des cas sporadiques où la violence est toujours d’actualité », constate le rapport.
En ce qui concerne le trafic de stupéfiants en Guyane, outre le phénomène bien connu des mules par voie aérienne, on observe une apparition inquiétante de nouveaux flux dans la zone maritime. « Faisant face à un marché américain saturé, de nouvelles routes maritimes se sont développées. À titre d’exemple, une opération a été menée au mois d’août et a abouti à une saisie record de 10,5 tonnes de cocaïne sur un navire traditionnel en provenance du Suriname ». Enfin l’orpaillage illégal, s’il ne représente pas un fait nouveau, induit des flux logistiques maritimes non négligeables et principalement en provenance du Suriname.
Qu'est-ce que le MICA Center ?
D'envergure mondiale, le MICA Center est le centre d'expertise français dédié à la sécurité maritime. Lancé en juin 2016, il favorise l'échange d'informations et la coopération en réponse aux menaces qui pèsent sur l'industrie maritime. Basé à Brest, le centre est animé par une trentaine d'hommes et de femmes appartenant à la Marine nationale et aux marines des pays partenaires (Espagne, Belgique et Portugal).
Il remplit deux missions : être en service 7 jours sur 7, 24 heures sur 24, pour identifier et analyser les situations et incidents affectant la navigation maritime sur tous les océans du monde, et de fournir aux navires et à leurs armateurs des informations de sécurité sur mesure, sur les zones maritimes à risques, des alertes en cas d'incident, des évaluations de sécurité, des réunions semestrielles, des briefings spécifiques, des exercices, etc. Elle apporte également un soutien direct aux équipages et aux armateurs en cas d'alerte piraterie en maintenant un lien direct avec le navire agressé, en prévenant des navires à proximité, en informant les centres concernés de l'alerte afin de coordonner une intervention et de remonter un retour d'alerte. Le MICA Center a publié son bilan annuel 2024 le 4 février 2025. (Source : MICA center).
PM