Marc Abensour, ambassadeur de France pour l’Indopacifique, a fait un bref passage en Polynésie. Il réaffirme la pertinence de la stratégie de la France, et son engagement accru dans les domaines militaire, humanitaire, économique ou climatique, pour renforcer la souveraineté, l’intégration et la résilience des partenaires de la région. Il assure avoir eu des échanges « constructifs et prometteurs » avec les autorités locales, gouvernement et assemblée territoriale de Polynésie. Un sujet de notre partenaire Radio 1 Tahiti.
« Ce qu’il est important d’avoir à l’esprit, c’est qu’il y a un engagement accru de la France dans le Pacifique et le Pacifique Sud », dit Marc Abensour en introduction. Il énonce les trois objectifs principaux de la France : « renforcer la souveraineté des partenaires dans la région et des états insulaires », renforcer l’intégration régionale des territoires français dans le Pacifique, et « renforcer les organisations régionales, pour défendre un multilatéralisme efficace qui est le garant du respect de la règle de droit, pour éviter de basculer dans une sorte de transactionalisme tous azimuts, on est bien conscients de ce risque ». Marc Abensour a évidemment en tête les efforts de la Chine dans la région, qu'il connaît bien pour avoir été, de 2016 à 2022, ambassadeur de France à Singapour.
La France « alliée mais non alignée » avec Washington
« Nous récusons cette logique de sphère d’influence », affirme l’ambassadeur qui insiste sur la « singularité du positionnement français » : « Je crois qu’il a fallu en effet dans un premier temps peut-être expliquer davantage la singularité du positionnement français. Et comme je le rappelle souvent, on a dit clairement qu’il n’y avait pas d’équidistance pour nous entre Pékin et Washington. On est un allié des Américains. On a un dialogue exigeant avec la Chine et donc on évite ce qu’on appellerait une approche confrontationnelle avec Pékin. Et que selon la formule « allié mais non aligné », on n’est pas dans une logique d’alignement stratégique avec Washington ».
Avant de venir en Polynésie, il est passé par Washington -avec l'ambassadrice de France dans le Pacifique- pour une prise de contact avec l’administration Trump, qui prend encore ses marques et qui « est dans cette phase qui est encore très préliminaire. J’ai pu également me rendre à Hawaii, et donc rencontrer certains responsables du Commandement Indopacifique. Alors eux, évidemment, sont beaucoup plus informés, parce qu’en effet, ils interagissent quasiment quotidiennement avec la France dans l’espace Indopacifique. On pense que ce dialogue est important et qu’il aura vocation à se poursuivre ».
Des capacités françaises renforcées d’intervention militaire et civile
La complémentarité dans l’espace Indopacifique est aujourd’hui réelle, dit Marc Abensour, au titre de la coopération militaire, qui s’est beaucoup élargie depuis deux ans notamment dans le domaine de la formation, et voit, par exemple, la Marine française présente jusqu’aux Philippines, au Japon et à la Corée, mais pas seulement. Il cite aussi les capacités d’intervention humanitaire et sanitaire, la surveillance multilatérale des pêches dans toute la région, la future place de hub numérique de la Polynésie, l’ouverture récente d’une ambassade à Samoa, ou encore l’adaptation du mandat de l’Agence française de développement aux enjeux climatiques.
« C’est ce qu’on appelle les partenariats de souveraineté, qui permettent aussi bien à nos partenaires qu’à nous-mêmes de réduire nos dépendances, d'accroître nos résiliences dans tous les domaines. Alors, évidemment, on pense au domaine sécurité-défense, mais la question des dépendances, elle se vérifie dans beaucoup de domaines, les technologies émergentes, ça peut être dans le numérique, ça peut être sur les enjeux qui consistent à rendre nos chaînes de valeur, y compris sur certains matériaux critiques, plus résilientes ».
Concourir à l’intégration régionale de la Polynésie
L’autre mission de Marc Abensour, c’est « de faire ressentir comment la stratégie sert aussi les intérêts de nos territoires dans leur intégration régionale et dans leur diversification économique. Et j’ai eu des échanges très intéressants et je crois très constructifs, prometteurs, avec aussi bien le président de l’assemblée et le président Brotherson sur comment on peut mobiliser également notre réseau diplomatique pour accompagner la Polynésie dans cette intégration, cette insertion accrue au niveau régional. (…) Et donc maintenant, il faut qu’on arrive ensemble, en effet, à avoir une sorte de feuille de route partagées sur quelles sont nos priorités. »
Caroline Perdrix pour Radio 1 Tahiti