Au troisième trimestre 2024, l’indicateur du climat des affaires s’avère plutôt morose en Martinique. Il confirme une poursuite du ralentissement amorcé depuis le début d’année, aggravé par le mouvement de protestation contre la vie chère qui a détérioré le climat social et la visibilité des acteurs économiques depuis septembre, d’après l'Institut d’émission des départements d’Outre-mer (IEDOM). Les carnets de commandes sont en net recul, et l’activité reste en baisse dans une majorité de secteurs, même si certaines filières parviennent à tirer leur épingle du jeu. Environ 13% des chefs d’entreprise craignent une défaillance de leur affaire dans les douze prochains mois. À la fin septembre, le nombre de défaillances d’entreprises progresse de 2,1% en cumul sur un an.
« Les entreprises évoluant dans les secteurs du commerce et de la restauration ont été particulièrement impactées par les événements (barrages, pillages) et par les restrictions qui en découlent (1er couvre-feu le 18 septembre et renouvelé à plusieurs reprises), générant des baisses sensibles de l’activité. Le tissu économique dans son ensemble est fragilisé par les exactions commises en marge du mouvement : 142 entreprises ont été pillées ou incendiées selon un premier bilan de la Chambre de commerce et d’industrie de la Martinique. Au-delà de l’impact immédiat, les conséquences pourraient se faire ressentir à moyen terme sur l’attractivité du territoire », relève l’IEDOM. Toutefois, ajoute ce dernier, cela n’affecte que partiellement l’enquête de conjoncture du trimestre considéré.
Depuis le début de l’année, les carnets de commandes sont en net recul. Cette tendance se confirme au troisième trimestre. Même si l’on constate un ralentissement de l’inflation, l’étude souligne qu’entre juin et septembre, « les prix de l’alimentation sont en hausse de 1,2% et les produits manufacturés de 0,5% ». Toutefois, « les prix de l’énergie et des services sont en baisse respectivement de 1,4 % et de 0,2 % ». Au niveau de l’emploi, le nombre de demandeurs d’emploi (A, B, C) diminue légèrement (-0,1%), après une légère hausse enregistrée au deuxième trimestre. Finalement, « le solde d’opinion sur l’emploi extrait de l’enquête de conjoncture est stable », d’après l’IEDOM.
La consommation, affectée par le mouvement social, se stabilise néanmoins. À noter que « les recettes de TVA progressent légèrement (+0,6%) et celles d’octroi de mer sont en baisse (-0,9%) au 3ème trimestre ». Le rapport précise que le SMIC a été revalorisé de 2% au premier novembre 2024. « Il s’agit d’un relèvement anticipé du SMIC. Le salaire minimum ne sera donc pas revalorisé au 1er janvier 2025 ». Par ailleurs, la moitié des entreprises ont l’intention d’investir dans les douze prochains mois selon l’enquête, avec d’importantes différences selon les filières. « Les prévisions d’investissement sont bien orientées dans les secteurs de l’hôtellerie/tourisme et des autres industries, contrairement aux autres secteurs d’activité ».
Cependant, les affaires restent en baisse dans une majorité de secteurs. Concernant les industries agricole et agroalimentaire, elles ne s’en sortent pas trop mal, bien que les charges d’exploitation et le niveau des trésoreries se dégradent. « Dans le détail, les volumes d’abattage de bovins sont en hausse (+4,0%) et ceux de porcins sont stables (+0,1%). Concernant la campagne cannière 2024, les tonnages de cannes broyées sont plutôt stables par rapport à 2023 (-1,1% en 2024 par rapport à 2023). Par rapport à la campagne précédente, les tonnages de cannes livrées aux distilleries sont en hausse (+2,1%) mais en baisse pour la sucrerie du Galion (-17,9%) », selon l’étude.
Dans le secteur du BTP, l’activité se dégrade fortement au troisième trimestre. Les ventes de ciment ont diminué de -9,1%. « Le nombre de logements commencés s’établit à 1400 en septembre 2024 (en cumul sur 12 mois), contre 2600 en septembre 2023, soit une baisse de 46 %. Le nombre de logements autorisés ressort à 2200 en septembre 2024 (en cumul sur 12 mois), contre 2 700 en septembre 2023, soit une baisse de 19 % », constate l’IEDOM. Concernant le commerce, le secteur a été durement touché par les exactions commises en marge de la contestation contre la vie chère. « Les soldes d’opinion sur les charges d’exploitation, sur les effectifs, sur les délais de paiement et sur les prévisions d’investissement se dégradent sur le trimestre ».
Enfin, la filière hôtellerie et tourisme présente certains paradoxes. Le nombre de nuitées hôtelières est en baisse (-5,2% sur le trimestre), et le nombre de passagers à l’aéroport diminue légèrement (-0,8 %). Pourtant, « les autres indicateurs sont globalement bien orientés. Les soldes de gestion des entreprises (charges d’exploitation, délais de paiement, trésorerie) s’améliorent, tout comme les soldes d’opinion sur les effectifs et sur les prévisions d’investissement », résume l’enquête de conjoncture.
PM