Le Guyana a estimé mardi que le référendum prévu par le Venezuela sur l'annexion d'une région riche en pétrole revendiquée par les deux pays constituait une "menace existentielle" pour lui, et demandé à la Cour internationale de justice (CIJ) de La Haye, plus haute juridiction de l'ONU, d'arrêter "de toute urgence" le vote.
Caracas revendique depuis des décennies la région d'Essequibo, qui représente plus des deux tiers du territoire du Guyana et où vit environ un cinquième de sa population, soit quelque 125.000 personnes. Le Venezuela prévoit d'organiser un référendum le 3 décembre sur le rejet d'une décision de justice datant de 1899, qui avait fixé la frontière du pays avec le Guyana, ancienne colonie de la Grande-Bretagne et des Pays-Bas.
"Il n'est pas exagéré de qualifier d'existentielle la menace qui pèse actuellement sur le Guyana", a déclaré Carl Greenidge, ancien ministre représentant le pays à la Cour internationale de justice (CIJ) de La Haye.
"Je ne saurais trop insister sur l'urgence de la situation qui nous a amenés ici aujourd'hui", a-t-il ajouté, estimant que le Guyana risque de subir une "perte irréparable et potentiellement permanente" de ses droits.
La revendication est devenue d'autant plus brûlante qu'une importante découverte de pétrole a eu lieu le mois dernier dans la région, ajoutant aux réserves du Guyana au moins 10 milliards de barils, ce qui les rend supérieures à celles du Koweït ou des Émirats arabes unis.
Parmi les questions posées lors du référendum du 3 décembre, l'une demande si le peuple vénézuélien doit rejeter cet accord de 1899 car il lui aurait été "imposé de manière frauduleuse".
La consultation portera aussi sur la question de savoir si le Venezuela doit continuer à rejeter toute compétence de la CIJ sur le différend, et si le pays doit mettre en oeuvre un "plan accéléré" pour donner aux habitants du territoire la citoyenneté vénézuélienne et des cartes d'identité.
Le Guyana estime que le référendum permettra au Venezula de s'emparer de la région d'Essequibo et de l'annexer de manière "unilatérale et illégale", lui causant un "préjudice irréparable".
Georgetown a donc demandé à la Cour internationale de justice de contraindre le Venezuela à arrêter le référendum "sous sa forme actuelle" et à s'abstenir de toute action visant à prendre le contrôle du territoire.
Seule la Cour s'oppose au "chaos qui menace la paix et la sécurité au Guyana, dans la région des Caraïbes et au-delà", a déclaré M. Greenidge.
Paul Reichler, l'un des principaux avocats du Guyana, a déclaré à la Cour que "des préparatifs militaires étaient déjà en cours" pour faire appliquer le résultat du référendum. Caracas, pour sa part, a rejeté la requête de son voisin qui, selon elle, "si elle n'était pas aussi tragique, serait risible".
Les avocats du Venezuela s'adresseront à la Cour mercredi. La CIJ statue sur les différends entre États, mais si ses décisions sont juridiquement contraignantes, elle n'a pas le pouvoir de les faire appliquer.
Avec AFP