INTERVIEW. L’IEDOM se penche sur la situation économique de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, cinq ans après le passage de l’ouragan Irma

INTERVIEW. L’IEDOM se penche sur la situation économique de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, cinq ans après le passage de l’ouragan Irma

Les îles du Nord ont été lourdement affectées par le passage de l’ouragan Irma fin-2017. Encore convalescentes, elles subissent de plein fouet la crise Covid et ses conséquences sur le tourisme, secteur sur lequel repose une partie essentielle de leur activité économique. L’IEDOM, qui vient de publier les rapports annuels économiques 2021 de ces territoires, nous donne un éclairage sur la situation économique actuelle et les perspectives.

Cinq ans après le passage d’Irma fin 2017, où en est la reconstruction dans les îles du nord ?

Les deux territoires se sont montrés résilients après le passage de l’ouragan, grâce au soutien apporté par l’État et par les Collectivités, mais aussi à la forte mobilisation de leurs populations respectives pour réparer les dégâts occasionnés. Mais il faut reconnaître que la reconstruction a été plus rapide et plus complète à Saint-Barthélemy qu’à Saint-Martin : dans la première, les traces de l’ouragan ont été totalement effacées après une année à peine alors que, dans la seconde, des stigmates sont encore visibles aujourd’hui : épaves de bateaux et de voitures, constructions endommagées ou à l’abandon, offre hôtelière non reconstituée… Rappelons toutefois que les vents de plus de 300 km/h ont détruit ou sévèrement détérioré plus de 30 % des bâtiments (contre 5 % « seulement » à Saint-Barth).

Quel impact l’ouragan Irma puis la crise sanitaire Covid ont-ils eu sur l’activité économique des îles du Nord ? 

Les deux principales activités économiques à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy, à savoir le tourisme et le BTP, ont souffert de ces épreuves successives. Mais le rebond a été différent. Dans le BTP, les effets bénéfiques de la reconstruction post-Irma à Saint-Martin s’estompent progressivement : les effectifs salariés tout comme la consommation de ciment retrouvent peu à peu leurs niveaux d’avant-Irma.  Tandis qu’à Saint-Barthélemy, la commande publique, avec la réfection du réseau routier par exemple, et la construction de logements et de villas « boostent » l’activité du BTP. Dans le tourisme, le rebond après chaque crise a été plus rapide et plus marqué à Saint-Barthélemy qu’à Saint-Martin.

Justement, comment le secteur touristique se porte-t-il après ces épreuves, à Saint-Martin ?

Grâce à la bonne résistance de ses infrastructures, la fréquentation à l’aéroport de Grand Case Espérance a plutôt bien résisté à Irma. Mais elle a chuté de moitié avec la crise sanitaire et les restrictions de déplacement qu’elle a entraînées. Elle peine à redécoller depuis. Côté néerlandais, le nombre de passagers à l’aéroport international Princess Juliana s’est effondré après Irma puis la crise sanitaire, malgré un sursaut en 2019. Il rebondit depuis fin 2021 mais ce regain d’activité est entravé par les retards pris dans la reconstruction de l’aérogare. Rappelons que les flux à l’aéroport Princess Juliana sont 5 à 6 fois supérieurs à ceux de l’aéroport de Grand Case, qui n’est pas dimensionné pour accueillir des gros porteurs.

Et à Saint-Barthélemy ?

La fréquentation à l’aéroport Rémy de Haenen a fortement chuté après Irma, mais elle a retrouvé quasiment son niveau d’avant-ouragan dès 2019. Pendant la crise sanitaire, le nombre de passagers débarqués a plongé de nouveau. Mais le rebond, observé depuis fin 2021, est manifeste.

Qu’en est-il de la croisière ?

À Saint-Barthélemy, l’activité de croisière reste volontairement limitée, en termes de nombre comme de taille des paquebots qui mouillent dans la rade de Gustavia. La Collectivité ne dispose pas en effet de la logistique et des infrastructures adéquates, et privilégie un tourisme haut de gamme. À Saint-Martin, l’activité de croisière a toujours été marginale côté français. Par contre, elle est importante côté néerlandais, avec plus de 2 millions de passagers accueillis les meilleures années (2015 par exemple). Mais cette activité est tombée quasiment à l’arrêt après Irma puis la crise sanitaire. Depuis début 2022, elle redémarre doucement, le public restant méfiant sur la croisière à cause des risques de contamination et de confinement à bord des navires.

Quelles perspectives pour le tourisme dans les îles du Nord, avec la saison 2022-2023 qui s’ouvre bientôt ?

Selon les professionnels interrogés, la saison touristique qui s’ouvre -dès le mois d’octobre, au lieu de fin novembre habituellement- s’annonce « exceptionnelle » à Saint-Barthélemy ; « meilleure » même que 2019, qui avait battu des records. À Saint-Martin, les professionnels sont optimistes également mais voient plusieurs freins : une offre hôtelière toujours inférieure à celle qui prévalait avant Irma, et les retards pris dans la reconstruction de l’aéroport international Princess Juliana, qui limitent sa fréquentation et détournent des compagnies aériennes –américaines surtout- vers d’autres destinations voisines (Anguilla…).

Retrouvez les rapports annuels économiques, disponibles sur le site de l’IEDOM :

Rapport annuel 2021 de Saint-Martin - Edition 2022 - IEDOM

Rapport annuel 2021 de Saint-Barthélemy - Edition 2022 - IEDOM