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Une délégation de l’Établissement Public Foncier et d’Aménagement de Guyane est actuellement à Paris pour participer à un séminaire intitulé “Aménager les territoires ultramarins au prisme de la transition”. Le séminaire qui commence ce jeudi 29 octobre se terminera demain. Il se déroule du côté de l’Arche de la Défense à l’initiative de l’EPFA Guyane, du Ministère de la Transition écologique et du Ministère des Outre-me . L’occasion pour Denis Girou, directeur de l’Établissement, de répondre aux d’Outremers360.
Outremers360 : Quelles sont les missions de l’EPFA Guyane ?
Denis Girou : Nous avons plusieurs métiers au sein d’un seul établissement : tout d’abord, un métier qui consiste à acheter du foncier pour les projets des collectivités, comme la mise en place d’un transport en commun ou encore le doublement de la route national , du côté de l’État. Nous avons également la mission d’aménagement : nous construisons de nouveaux quartiers, des éco-quartiers, pour répondre aux besoins de logements de la Guyane. Nous sommes également présents pour aider à structurer une agriculture durable et de proximité. Enfin, à la demande des élus, nous pouvons mettre à disposition des moyens d’ingénierie techniques et administratifs pour lancer des opérations de régularisation foncière de masse d’occupants sans titre comme celle en cours à Maripasoula.
Quelles sont les priorités sur le territoire ?
Il a un besoin de logement légal extrêmement important et nous n’arrivons pas à y pourvoir de manière habituelle. C’est pourquoi il a été mis en place une Opération d’Intérêt National ( ndlr : Opération d’urbanisme à laquelle s’applique un régime juridique particulier en raison de son intérêt majeur) pour pouvoir mettre des moyens supplémentaires. C’est une première en Outre-mer. Il y a 24 secteurs OIN qui ont été définis pour permettre la réalisation de 21 000 logements en 15 ans. Nous devons également mettre en place des espaces publics, des écoles, des espaces économiques, des infrastructures de transports et des activités des secteurs agricoles qui travaillent également sur la partie énergétique de biomasse.
Qu’est-ce qui est le plus compliqué ?
Ce qui est compliqué c’est d’aller plus vite que les activités illégales. Nous faisons les choses dans les règles, mais face à cela, le besoin de logement est tel que beaucoup de personnes construisent de manières spontanée, souvent sur les mêmes terrains. Plus de 1000 logements voient le jour tous les ans, sans aucun aménagement ou raccordement aux réseaux. Le besoin est estimé entre 4 400 et 5 500 logements neufs tous les ans, dont 75% de logements sociaux. Nous travaillons de manière à pouvoir favoriser l’accès à la propriété et au logement pour tous, dans des conditions légales et aussi rapides que nos “concurrents”. L’autre problématique, c’est que les surfaces utilisables sont souvent enclavées, entraînant des coûts d’accès élevés. En théorie ¼ du territoire est potentiellement aménageable, soit près de 21 500 km2. La réalité, c’est que la pression démographique est élevée sur le seul centre littoral, soit 1 100 km2.
Il y a d’autres spécificités guyanaises ?
Les occupations de terrain ne sont pas encadrées légalement. Elles sont souvent historiques. Parfois non. Mais cela provoque des situations assez variées. Quand on veut lancer un chantier, par exemple, des gens viennent nous voir parce qu’ils ont été là à un moment, ou ils sont toujours là… Ou on leur a fait des promesses ou encore ils ont acheté des terrains à des personnes qui n’étaient pas propriétaires. Il y a aussi des questions de Droit coutumier des occupations des peuples autochtones qui font l’objet de beaucoup de discussions.
Quelles sont les solutions auxquelles vous réfléchissez ?
Nous réfléchissons à plusieurs choses, notamment sur la question de la coordination. L’Opération d’Intérêt National va nous aider puisque tout le monde est autour de la table pour discuter. Il y a aussi une question d’optimisation des méthodes d’aménagement en aval des méthodes de construction . Sans oublier un gros chantier qui n’est pas forcement coûteux, mais qui peut beaucoup rapporter sur les questions de simplification que l’on peut avoir sur les différentes réglementations. Il faut imaginer un aménagement adapté à l’Amazonie avec des dérogations qui permettraient d’aller vite tout en respectant les réglementations pour construire légalement. Nous sommes prêts et motivés à faire les choses correctement, mais si l’on travaille ensemble, nous pouvons aller plus vite, être plus efficaces sans que cela ne soit plus cher et dans l’intérêt de la population. C’est une course contre la montre.
Par Abby Said Adinani
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