Guyane : Vives réactions après l’usage de chien de maintien de l’ordre pour disperser un carnaval non-autorisé

Guyane : Vives réactions après l’usage de chien de maintien de l’ordre pour disperser un carnaval non-autorisé

Capture réseaux sociaux

Ce dimanche, environ 150 personnes se sont rassemblées à Cayenne pour vivre un carnaval non-autorisé en raison de la crise sanitaire. L’usage de gaz lacrymogène et d’un chien de maintien de l’ordre pour disperser la foule a suscité l’indignation dans la classe politique guyanaise. 

En raison de la crise sanitaire, le traditionnel carnaval de début d’année a été interdit en Guyane mais environ 150 personnes, selon Guyane La 1ère, se sont rassemblées pacifiquement pour braver l’interdit et honorer la coutume. Pour disperser les participants, les forces de l’ordre ont alors usé de gaz lacrymogène et d’un chien de maintien de l’ordre. Un dispositif jugé disproportionné selon les témoins sur place.

Le Mouvement de décolonisation et d’émancipation sociale a dénoncé « des interventions musclées des forces de police » et « l’usage brutal, abusif, voire intentionnel de chiens par les policiers ». Le parti évoque une « dérive autoritaire et cynique » rappelant le « pire passé » de l’histoire du département. « L’utilisation de chiens hier par les forces de l’ordre contre les manifestants à Cayenne est inadmissible ! », a commenté de son côté le député GDR Gabriel Serville. Il annonce avoir écrit au nouveau préfet Thierry Queffelec « pour condamner ces méthodes ».

Dans un communiqué commun, le député LREM Lénaïck Adam et le sénateur RDPI Georges Patient « condamnent avec la plus grande fermeté ces méthodes d’un autre temps, renvoyant aux pans les plus obscurs de l’histoire (…) ». Ils en appellent néanmoins « à la responsabilité de tous dans cette lutte contre la propagation du virus ». Pour sa part, la sénatrice Marie-Laure Phinéra-Horth s’indigne « de voir des compatriotes se faire attaquer par un chien sans muselière et gazer alors qu’ils manifestaient sans violence dans nos rues. Ces images ont heurté beaucoup d’entre nous, ravivant des souvenirs d’une période qu’on espérait tous révolue ».

Plainte contre X

Le président de la Collectivité territoriale de Guyane, Rodolphe Alexandre, estime « disproportionné la présence d’un chien parmi les forces de l’ordre. Nous savons très bien que les manifestants d’hier sont des carnavaliers et ne sont pas belliqueux ». L’ancienne ministre de la Justice, Christiane Taubira, a condamné une méthode « inconcevable » et « inadmissible », « quoi que l’on pense des organisateurs, et des participants, et des motifs de la manifestation ». « Le Maître-chien et le Directeur départemental de la Sécurité Publique doivent être lourdement sanctionnés pour ces actes de violence, les mêmes que ceux pratiqués par les colons pendant l’esclavage » déplore un conseiller territorial.

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Albert Tacy, participant à ce carnaval non-autorisé et « violemment attaqué » par le chien de la brigade cynophile a annoncé un dépôt de plainte contre X. « Je voulais rentrer chez moi, j’étais avec un camarade, nous défilions, quand sur le chemin je suis tombé nez à nez face à deux policiers, dont l’un tenait un chien muselé », a-t-il raconté à Guyane La 1ère. « Je leur ai dit de me laisser passer et la situation a dégénéré. Ils ont lancé le chien une première fois, il était muselé, je me suis défendu, là ils ont enlevé la muselière et le chien m’a à nouveau attaqué. Le maître-chien n’a pas rappelé son animal. Je me suis défendu seul. Cela m’a extrêmement choqué. J’ai été aux urgences par mes propres moyens ».

Évoquant « un cas de violence gratuite », son avocat Me Jérôme Gay a balayé toute forme de « racisme » et de « colonialisme ». « Il faut faire attention à l’interprétation des faits. La bêtise est universelle et n’a pas de couleur », a-t-il déclaré, précisant que « les protagonistes sont tous les deux de la même couleur de peau ». L’usage de chien de maintien de l’ordre aurait été suspendu et le parquet de Cayenne a ouvert une enquête préliminaire pour « violence aggravée sans ITT », confiée à la délégation régionale de l’IGPN située à Fort-de-France en Martinique.