Guyane : La délégation aux droits des enfants de l'Assemblée nationale en mission d’observation sur le territoire

Perrine Goulet, députée de la Nièvre et présidente de la Délégation, avec le député Philippe Fait, membre de cette délégation©Facebook / Philippe Fait

Guyane : La délégation aux droits des enfants de l'Assemblée nationale en mission d’observation sur le territoire

La délégation aux droits des enfants de l’Assemblée nationale a cloturé ce jeudi 5 décembre une mission d’observation en Guyane, entamée la semaine dernière. Ce déplacement a conduit les parlementaires dans plusieurs localités, telles que Cayenne, Saint-Laurent, Sinnamary, Cacao et Maripasoula, afin de rencontrer des acteurs clés du secteur : associations, représentants de la justice et professionnels de l’aide sociale à l’enfance.

Cette mission s’inscrit dans l’objectif principal de la délégation : veiller à ce que les droits des enfants soient pris en compte dans l’élaboration des politiques publiques. Cependant, les constats dressés sur place soulèvent des questions majeures quant à l’application de ces politiques dans le territoire ultramarin.

Des politiques nationales absentes sur le terrain

Selon Perrine Goulet, députée de la Nièvre et présidente de la délégation, certaines mesures votées à l’Assemblée nationale peinent à être mises en œuvre en Guyane. Elle cite en exemple : « Typiquement les petits déjeuners gratuits ou la cantine à un euro, c’est dans un budget que je suis particulièrement en tant que commissaire aux finances, et typiquement ça n’arrive pas du tout ici. Ça va faire partie des choses que je vais creuser dans les mois à venir, comprendre pourquoi aucun ici ne connaît les petits déjeuners gratuits et la cantine à un euro, alors que le petit déjeuner gratuit c’est normalement pour les outre-mer ».

Ce manque de mise en œuvre s’étend à d’autres initiatives comme la précarité menstruelle : « On pourrait parler de précarité menstruelle pour les jeunes filles : il y a une loi qui a été votée qui dit que les pharmacies doivent fournir des protections réutilisables aux enfants, mais ça c’est pour les enfants qui ont la sécurité sociale, donc comment on fait pour les autres ? ». La parlementaire met en lumière un problème récurrent : « On a l’impression que ça fonctionne et que c’est bon, et quand on arrive, ça ne fonctionne pas. Donc ça c’est intéressant aussi, et ce qui va nous permettre d’aller creuser et demander certaines choses aux différents ministères pour comprendre pourquoi ce dernier kilomètre n’est pas réalisé ».

Une situation alarmante pour les enfants

Le constat sur les droits des enfants en Guyane rejoint les conclusions d’un rapport de l’UNICEF publié l’an dernier : la situation est préoccupante sur plusieurs fronts. Perrine Goulet précise : « Vous avez quand même des particularités dans ce département qui font par exemple sur la protection enfance et l’aide sociale à l’enfance, des enfants mis sous protection, mais pas assez de place, des familles d’accueil qui accueillent entre 6 et 8 enfants, ce qui fait qu’on ne fait pas le même travail que quand dans la loi il y en a écrit 3 ». Elle met également en avant les obstacles à la scolarisation : « Des difficultés aussi sur l’accès à l’école puisqu’on a pu se rendre compte de l’éloignement de certains établissements avec des heures de trajet très importantes pour les enfants ». 

La situation particulière des lycéens, souvent contraints de quitter leur commune pour s’installer sur le littoral, représente une autre source de préoccupation : « Un coût de la scolarité qui est important pour les enfants, même si la CTG apporte des aides financières importantes pour ces familles hébergentes, on voit bien qu’il y a un coût qui reste à charge des parents, que ce soit la cantine, le transport scolaire, peut se trouver pour trois enfants à plus de mille euros, c’est impossible. Donc on a des déscolarisations qui ne sont pas bonnes ».

Une sensibilisation nécessaire des députés de l’Hexagone

Enfin, Perrine Goulet déplore le manque de sensibilisation des députés métropolitains aux réalités ultramarines : « Les deux premières années de la création de la délégation, on avait trois collègues ultramarins dans la délégation aux droits des enfants. Cette année je n’ai plus qu’un collègue ultramarin, donc ça ne permet pas d’avancer sur un certain nombre de sujets ».

Elle souligne la difficulté pour les élus de l’Hexagone de pleinement appréhender les enjeux locaux : « On est peut-être moins sensibilisés, nous, députés de l’Hexagone, aux problématiques ultramarines, qui plus est quand on voit tous les enjeux de la Guyane. Peut-être que pour nos collègues, les droits de l’enfant c’est un sujet parmi d’autres, et donc je pense que c’est important aussi qu’on puisse voir l’avenir avec ce que nous on connaît des droits des enfants, pour après voir nos collègues ultramarins et peut-être leur faire ressentir un certain nombre de points qu’on a vus pour attirer leur attention, pour essayer de faire progresser les droits des enfants en Guyane tout en prenant en compte les cultures et aussi les difficultés de ce territoire ».

Ce déplacement met en exergue la nécessité d’un suivi renforcé pour garantir que les politiques votées à l’Assemblée nationale trouvent un écho réel en Guyane et répondent aux besoins spécifiques des enfants de ce territoire. 

Damien Chaillot