Le ministre des Outre-mer Manuel Valls a dit vouloir "ouvrir le débat" sur l'interdiction de l'exploitation des hydrocarbures en France, et notamment en Guyane, suscitant mercredi l'opposition de sa collègue de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, pour laquelle ça "n'aurait pas de sens".
"Il faut ouvrir le débat, y compris sur la loi Hulot", a déclaré mardi soir Manuel Valls au Sénat. Cette loi de 2017 a mis fin à la recherche et à l'exploitation des hydrocarbures en France, avec quelques dérogations pour les entreprises qui avaient déjà des concessions en vigueur."Nous voyons les pays voisins de la Guyane accélérer en matière de prospection et d'exploitation, au Guyana, au Suriname ou au Brésil", a observé Manuel Valls. "J'ai demandé à mes services d'étudier la conventionnalité, c'est à dire la compatibilité aux traités internationaux (...) et au droit communautaire d'éventuelles initiatives législatives pouvant émaner des parlementaires", a poursuivi le ministre, en réponse à un sénateur.
Les ressources des voisins du département français d'Amazonie alimentent depuis longtemps l'idée que celui-ci pourrait également regorger de pétrole et de gaz. Mais TotalEnergies - qui bénéficiait d'un prolongement temporaire de son permis de recherche après l'adoption de la loi Hulot - avait mis fin en 2019 à des forages exploratoires au large de la Guyane, n'ayant rien trouvé.
"Dans un contexte où les énergies fossiles sont responsables du dérèglement climatique et les territoires ultramarins les premières victimes de celui-ci, revenir sur la loi Hulot n'aurait pas de sens", a réagi mercredi Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition écologique, dans une déclaration transmise à l'AFP par son cabinet. "Ce d'autant que la France peut se prévaloir d'être un des leaders en matière d'énergies décarbonées, y compris dans les territoires ultramarins. Ce serait d'autant plus incompréhensible que la France est à l'origine de l'accord de Paris et a porté à la COP28 des avancées en matière de sortie des énergies fossiles", a-t-elle fait valoir.
Le Réseau action climat, qui regroupe de nombreuses ONG, a dénoncé de son côté une "incohérence flagrante, entre les propos du ministre des Outre-mer et les anciennes positions diplomatiques et nationales de la France", qui "menace directement les écosystèmes précieux de la région et bafoue les engagements climatiques de notre pays".
Le WWF a, dans un autre communiqué, demandé une rencontre avec Manuel Valls et son collègue Marc Ferracci, ministre de l'Industrie, "afin de proposer des solutions de développement soutenable de la Guyane cohérentes avec les engagements environnementaux du gouvernement". "Bien que le besoin de développement local en Guyane soit urgent, le WWF dénonce cette éventuelle relance du mythe pétrolier comme une erreur économique et environnementale et appelle à investir dans un développement durable" dans ce département, écrit l'ONG internationale.
Avec AFP