Élisabeth Borne réveillonne aux côtés des militaires en Guyane, et annonce de nouveaux moyens contre l’orpaillage illégal

Élisabeth Borne réveillonne aux côtés des militaires en Guyane, et annonce de nouveaux moyens contre l’orpaillage illégal

Élisabeth Borne est arrivée en Guyane dimanche 31 décembre pour passer le réveillon auprès des forces armées qui luttent notamment contre l'orpaillage illégal. Sur place, elle a déjà annoncé de nouveaux moyens dans la lutte contre l’orpaillage illégal.

La Première ministre restera en Guyane le 1er janvier et démarrera l'année 2024 sur une pirogue pour visiter un point de contrôle fluvial et le village amérindien de Opoya Taluen, à Maripasoula, commune la plus grande de France, particulièrement touchée par l’orpaillage illégal.

C'est la première fois qu'Élisabeth Borne se rend dans ce département de 300 000 habitants du nord-est de l'Amérique du Sud, frontalier du Suriname et du Brésil qui a, comme l'archipel de Mayotte qu'elle a visité à la mi-décembre, voté à 60 % pour Marine Le Pen à la dernière présidentielle. Élisabeth Borne a assisté depuis ce territoire lointain aux vœux d'Emmanuel Macron du 31 décembre, alors que le chef de l'État a promis un « nouveau cap » pour 2024, alimentant les spéculations autour d'un possible remaniement du gouvernement, voire d'un changement de Premier ministre.

A son arrivée, Élisabeth Borne a rendu hommage à Cayenne aux quelque 2 200 militaires et environ un millier de gendarmes stationnés en Guyane, qui ont perdu cette année deux des leurs dans des opérations contre l'orpaillage illégal. Était notamment présente l'ancienne ministre de gauche Christiane Taubira, qui n'a plus de mandat électif.

La Première ministre s'est entretenue ensuite avec la maire de Cayenne Sandra Trochimara, qui souhaitait lui parler du désenclavement du département, grand comme le Portugal mais où existent seulement deux routes nationales, après la mort la veille de Noël de quatre enfants dans un accident de pirogue taxi. Elle a aussi des « moyens supplémentaires » contre l'orpaillage clandestin et la pêche illégale.

Renforts humains et matériels 

En réponse, Élisabeth Borne a promis des moyens supplémentaires dans la lutte contre l’orpaillage illégal. Notamment du nouveau matériel, comme des drones et des hélicoptères, ou encore du renfort humain et des moyens techniques. La Première ministre a ensuite échangé avec le président de la collectivité territoriale Gabriel Serville, avant de s'envoler pour la ville de Maripasoula dans la forêt amazonienne (sud-ouest). Gabriel Serville a accompagné la cheffe du gouvernement pour « approfondir certains sujets avec les forces armées sur place ». 

Depuis Maripasoula, la cheffe du gouvernement a salué l' « engagement constant » des militaires, se disant déterminée à lutter contre les chercheurs d'or clandestins. Sur place, elle a été accueillie par des danses traditionnelles avant d'échanger avec le maire Serge Anelli et de rejoindre la base avancée du 9ème régiment d'infanterie de marine, où le chef cuisinier de Matignon Romain Besseron avait fait le déplacement pour servir un très classique menu de foie gras, suprême de volaille des Landes, et moelleux au chocolat. Une présentation de l'opération Harpie de lutte contre l'orpaillage illégal a servi d'apéritif. Le procureur général Joël Sollier a demandé que cette politique publique soit « réévaluée » parce qu' « on a réussi à maintenir le phénomène » mais sans « l'éradiquer ».

Élisabeth Borne a reçu du 9e RIMa la médaille Etoile Forêt d'or, marque de « courage », « combativité » et d' « opiniâtreté », qui récompense les militaires aptes à « vivre en jungle dans la durée ». « Après une année marquée par des crises et l'instabilité internationale, (...) je voulais me rendre sur le terrain là où nos forces (armées) font la différence » et « risquent leur vie » pour « nous protéger », a dit la Première ministre.

La cheffe du gouvernement, accompagnée aussi de la secrétaire d'État à la Jeunesse et au Service national universel, Prisca Thévenot, visitera lundi un site souvent touché à Dorlin, où opèrent notamment les forces du 9ème RIMa. C'est là que le 25 mars un major du GIGN, Arnaud Blanc, 35 ans, a été tué alors qu'il participait avec neuf camarades à une opération contre ces chercheurs d'or clandestins. Début mai, un piroguier et chef coutumier des Teko, membre des Forces armées de Guyane (FAG), est décédé dans un accident de pirogue lors d'une opération nocturne sur le fleuve Oyapock (est). 

Après cette visite à Dorlin, Élisabeth Borne est attendue au village amérindien wayana d’Opoya Taluen, où elle échangera avec le chef du village et ses habitants, avant un tour du village et un déjeuner avec les chefs coutumiers présents. Le drame qui a coûté la vie à quatre enfants s’est déroulé non loin du village, alors que la pirogue-taxi rejoignait Saint-Laurent du Maroni depuis Maripasoula.

Avant de reprendre l'avion pour Paris, elle évoquera la lutte contre le trafic de stupéfiants à l'aéroport de Cayenne. La Guyane est connue pour être une plaque tournante d'approvisionnement de l’Hexagone en drogue, notamment la cocaïne. Un contrôle systématique des voyageurs à destination de la métropole a été instauré il y a un an, afin d'empêcher les « mules » -ces passagers qui transportent des stupéfiants dans leurs bagages ou en les ingérant- d'acheminer la drogue. Ce qui a permis de diminuer fortement les saisies de stupéfiants à l'arrivée dans l'Hexagone, mais certains contestent en justice une dérive arbitraire. 

Ce trafic explique en partie la violence à laquelle est confronté le département, qui détient le record du plus grand nombre d'homicides par habitant en France, bien qu'il soit bien doté en forces de sécurité. « Les particularités en termes de délinquance, ce sont la continentalité de son territoire et la porosité de ses frontières, longues et difficiles à contrôler. Cela favorise l'orpaillage illégal, les trafics d'armes et de stupéfiants », explique la criminologue Gaëlle Compper-Durand. A ce contexte géographique s'ajoute une grande pauvreté profitable aux réseaux criminels. En Guyane, 53 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, d'après l'Insee.

Avec AFP